2 mai 2019

White Dog, quand la fragile marionnette de papier vient mordre la brûlante question de la manipulation et de la violence

Vendredi 29 et samedi 30 mars à Quai des Arts, Pornichet, s’est joué le spectacle « White Dog » de la compagnie « Les Anges au plafond », inspiré du roman « Chien blanc » de Romain Gary. Spectacle de marionnettes certes mais un univers bien loin du classique et fameux Guignol.

White Dog, quand la fragile marionnette de papier vient mordre la brûlante question de la manipulation et de la violence

02 Mai 2019

Vendredi 29 et samedi 30 mars à Quai des Arts, Pornichet, s’est joué le spectacle « White Dog » de la compagnie « Les Anges au plafond », inspiré du roman « Chien blanc » de Romain Gary. Spectacle de marionnettes certes mais un univers bien loin du classique et fameux Guignol.

La compagnie « Les Anges au plafond » met en scène des marionnettes de papier froissé de taille humaine. Les décors sont de carton, de papier blanc, de cordes et de poulies. Les personnages s‘animent au milieu de pop up, jeux d’ombres et projections d’images.
Cet univers fragile nous plonge en pleine magie, poésie et douceur.

La Poésie du blanc

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LesAngesAuPlafond-WhiteDog-©VincentMuteau-3

Vincent Muteau

Mais les histoires racontées ici par les deux comédiens marionnettistes Camille Trouvé et Brice Bertoud sont elles aussi loin des classiques contes pour enfants. Ils nous plongent dans des récits de vie haletants.

Cette année « White Dog » nous raconte l’histoire de Batka, un mignon toutou tout doux, fraîchement adopté par l’écrivain Romain Gary et sa femme l’actrice Jean Seberg.

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LesAngesAuPlafondWhiteDog-©VincentMuteau-4

Vincent Muteau

Qu’il est attachant ce petit chien blanc ! Et pourtant…

Batka se révèle monstrueux et agressif en présence de personnes noires. Le couple alors en pleine lutte contre les discriminations raciales dans l’Amérique des années 60’s, va tenter de guérir l’animal, qui se trouve avoir été dressé pour tuer et haïr.

Un poignant récit autobiographique de Romain Gary qui questionne sur les conditionnements de l’esprit humain

Peut on désapprendre la haine ? Peut on arrêter la bêtise humaine ? Telle est la question qui nous tient en haleine, en contraste avec cette mise en scène de matières légères et poétiques, accompagnée d’une bande son jouée en live sur scène, sur les rythmes fiévreux du jazz et du hip hop.

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LesAngesAuPlafond_WhiteDog_©VMuteau_VM_0418

Vincent Muteau

La manipulation marionnettique vient en écho à la question du conditionnement raciste.

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LesAngesAuPlafond-WhiteDog-©VincentMuteau-2

Vincent Muteau

Le spectateur est pris dans un tourbillon de vie, ici on plie, on déchire, on froisse, on découpe, on construit en direct sur un plateau tournant, pour parler d’amour (les tourments du couple Gary /Seberg), d’animalité et de rêve de fraternité.

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LesAngesAuPlafond_WhiteDog_©VMuteau_VM_0619

Vincent Muteau

On en ressort chargé d’émotions (rire, angoisse, révolte, émerveillement) et d’interrogations. Partagé entre le plaisir d’être enveloppé dans cet univers magique, doux, et ludique ; et la dureté de l’histoire brûlante et toujours actuelle abordée ici.
En effet, l’idée de questionner la possibilité de rééduquer les comportements violents est venu aux comédiens le soir des attentats du 13 novembre 2015, en sortant de la représentation de leur autre spectacle R.A.G.E.

Une compagnie à suivre !

Les autres spectacles de la compagnie en tournée en 2019:
R.A.G.E, sur la censure et l’identité secrète de Romain Gary
Du rêve que fut ma vie, qui explore la correspondance de la sculptrice Camille Claudel
Les mains de Camille, sur l’enfance et le combat de femme artiste de Camille Claudel
Au fil d’Oedipe, tentative de démêlage du mythe
Une Antigone de papier, le personnage indomptable manipulable sur scène ?
Le cri quotidien, autour de la lecture et de la noyade dans la masse d’actualité,
Les nuits polaires, d’après des histoires vraies extravagantes.

Pour en savoir plus sur la compagnie, les spectacles et voir la tournée 2019, c’est par ici

Papooz, vague d’exotisme à Stéréolux

Un stage pour réaliser un agenda culturel interactif avec de jeunes orvaltais

Heureuse nantaise, curieuse, amatrice de spectacle vivant et manifestations artistiques. J'ai envie de m'essayer à l'écriture pour me découvrir, aller chercher ce qui se vit lors des représentations et le partager.

L'édito

Touche pas à mon info !

L’investigation vit-elle ses derniers mois sur l’audiovisuel public en France ? Contraints par une réduction budgétaire de 50 millions d’euros en 2018 par rapport au contrat d’objectifs et de moyens conclu avec l’ancien gouvernement, les magazines « Envoyé Spécial » et « Complément d’enquête » verront leurs effectifs drastiquement diminués et une réduction du temps de diffusion au point de ne plus pouvoir assurer correctement leur mission d’information. Depuis l’annonce, les soutiens s’accumulent, notamment sur Twitter avec le hashtag #Touchepasàmoninfo, pour tenter de peser sur les décisions de Delphine Ernotte, présidente de France Télévisions, déjà visée par une motion de défiance. L’association Fragil, défenseur d’une information indépendante et sociétale, se joint à ce mouvement de soutien.

Après la directive adoptée par le Parlement européen portant sur le secret des affaires en avril 2016, il s’agit d’un nouveau coup porté à l’investigation journalistique en France. Scandales de la dépakine, du levothyrox, du coton ouzbek (pour ne citer qu’eux), reportages en France ou à l’étranger sur des théâtres de guerre, à la découverte de cultures et de civilisations sont autant de sujets considérés d’utilité publique. Cela prend du temps et cela coûte évidemment de l’argent. Mais il s’agit bien d’éveiller les consciences, de susciter l’interrogation, l’émerveillement, l’étonnement ou l’indignation. Sortir des carcans d’une société de consommation en portant la contradiction, faire la lumière sur des pratiques, des actes que des citoyens pensaient impensables mais bien réels. Telle est « la première priorité du service public », comme le considère Yannick Letranchant, directeur de l’information.

En conclusion, nous ne pouvions passer à côté d’une citation d’Albert Londres ô combien au goût du jour, prix éponyme que des journalistes d' »Envoyé Spécial » ont déjà remporté : « Je demeure convaincu qu’un journaliste n’est pas un enfant de chœur et que son rôle ne consiste pas à précéder les processions, la main plongée dans une corbeille de pétales de roses. Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort, il est de porter la plume dans la plaie. »


Valentin Gaborieau – Décembre 2017