16 novembre 2018

Fabuleux Fabrice

Son nouveau spectacle s'intitule « Plus rien à perdre » mais on se demande s'il n'aurait pas prévu de l'appeler « plus rien à foutre » avant de s'auto-censurer : Fabrice Éboué pratique l'humour noir (sans mauvais jeu de mots) mais de manière si politiquement incorrecte que c'en est un régal. Il a rempli la Cité des Congrès, où 1971 âmes ont ri à gorge déployée le samedi 10 novembre dernier. Une salle, une ambiance, et quelle ambiance !

Fabuleux Fabrice

16 Nov 2018

Son nouveau spectacle s'intitule « Plus rien à perdre » mais on se demande s'il n'aurait pas prévu de l'appeler « plus rien à foutre » avant de s'auto-censurer : Fabrice Éboué pratique l'humour noir (sans mauvais jeu de mots) mais de manière si politiquement incorrecte que c'en est un régal. Il a rempli la Cité des Congrès, où 1971 âmes ont ri à gorge déployée le samedi 10 novembre dernier. Une salle, une ambiance, et quelle ambiance !

Le one-man-show, ou stand up, on en a soupé au point qu’il devient difficile pour les artistes de sortir du lot. Force est de constater que Fabrice Éboué possède un talent hors pair. Ce n’est pas nécessairement le contenu de ses vannes qui est extra-ordinaire, c’est la façon dont il les sert, avec sa diction désabusée, son ton ironique (« ça va, j’te dérange pas ?! » quand il imite les bien-pensants prêts à l’offensive), et un rythme qui fait fuser les rires à la minute. Bref, ce qu’a Fabrice Éboué, en un mot, c’est du style.

Loin de moi l’idée de spoiler son spectacle mais pour vous donner envie d’aller l’acclamer à son prochain passage (samedi 23 mars 2019), il me faut partager les raisons de l’engouement pour ce quadra à la tonsure aussi inesthétique qu’assumée, puisqu’elle est au premier plan de l’affiche. C’est qu’il tient à cet improbable mix entre afro et calvitie, préférant « ressembler à Tsonga qu’à Guy Georges ».

Le ton est donné : on va rire de tout et surtout de nous. Et c’est parti pour une heure et demie pendant laquelle tout le monde en prend pour son grade, des cathos aux Québécois, en passant par les djihadistes, les féministes, les écolos, les grammairiens, les végans et les naturistes, les gays, les lévriers afghans, les orangs-outangs, Philippe Croizon et j’en passe. Le tout, en mode franc du collier, total désinhibé, voire salace. On dirait qu’Éboué essaie de repousser les limites du risible pour dédramatiser l’angoisse des temps modernes.

Convoquant une galerie de personnages prétexte à dénoncer les radicaux de tous bords, Fabrice se livre aussi plus intimement, comme pour adoucir la dureté des propos. Ce jeune papa se révèle parfois touchant jusqu’à ce que le Bigard qui sommeille en lui ne s’éveille à nouveau.

Extraits : « En France, si t’es enceinte à 14 ans, t’es un cas soç’ : sur l’île de la Réunion, enceinte à 14 ans, on te dit ‘il était temps, ta petite sœur attend son troisième’ ! »

« Michael Jackson n’est pas mort, il s’est réfugié sur l’île aux enfants. »

A propos de la grammaire inclusive : « J’ai un pote, il est nain, il milite pour l’abolition des majuscules ! »

Sur les complotistes : « le 11 Septembre, c’est pas les avions qui sont rentrés dans les Tours, c’est les Tours qui sont rentrées dans les avions! »

Et de conclure ce tête-à-tête avec un public nantais hilare, avec la verve qu’on lui connaît désormais et ce manque de réserve si charmant…
« YouTube/YouPorn : une tête bien pleine/des c***lles bien vides » !

Effectivement, Fabrice Éboué n’a plus rien à perdre, mais surtout plus rien à prouver. On a vu et approuvé.

Odezenne met le feu à Stéréolux

Fragil intervient à la médiathèque Floresca Guépin dans le cadre du mois du film documentaire

Journaliste/correctrice/traductrice/blogueuse/heureuse maman, je redécouvre Nantes à travers le regard de mon fils né en Afrique, après avoir passé 3 ans à Londres à officier sur des fashion websites, puis 9 ans à Casablanca à œuvrer dans la presse généraliste aux rubriques mode, tendances, culture, lifestyle... Je me suis reconvertie dans la presse de proximité depuis...

L'édito

Touche pas à mon info !

L’investigation vit-elle ses derniers mois sur l’audiovisuel public en France ? Contraints par une réduction budgétaire de 50 millions d’euros en 2018 par rapport au contrat d’objectifs et de moyens conclu avec l’ancien gouvernement, les magazines « Envoyé Spécial » et « Complément d’enquête » verront leurs effectifs drastiquement diminués et une réduction du temps de diffusion au point de ne plus pouvoir assurer correctement leur mission d’information. Depuis l’annonce, les soutiens s’accumulent, notamment sur Twitter avec le hashtag #Touchepasàmoninfo, pour tenter de peser sur les décisions de Delphine Ernotte, présidente de France Télévisions, déjà visée par une motion de défiance. L’association Fragil, défenseur d’une information indépendante et sociétale, se joint à ce mouvement de soutien.

Après la directive adoptée par le Parlement européen portant sur le secret des affaires en avril 2016, il s’agit d’un nouveau coup porté à l’investigation journalistique en France. Scandales de la dépakine, du levothyrox, du coton ouzbek (pour ne citer qu’eux), reportages en France ou à l’étranger sur des théâtres de guerre, à la découverte de cultures et de civilisations sont autant de sujets considérés d’utilité publique. Cela prend du temps et cela coûte évidemment de l’argent. Mais il s’agit bien d’éveiller les consciences, de susciter l’interrogation, l’émerveillement, l’étonnement ou l’indignation. Sortir des carcans d’une société de consommation en portant la contradiction, faire la lumière sur des pratiques, des actes que des citoyens pensaient impensables mais bien réels. Telle est « la première priorité du service public », comme le considère Yannick Letranchant, directeur de l’information.

En conclusion, nous ne pouvions passer à côté d’une citation d’Albert Londres ô combien au goût du jour, prix éponyme que des journalistes d' »Envoyé Spécial » ont déjà remporté : « Je demeure convaincu qu’un journaliste n’est pas un enfant de chœur et que son rôle ne consiste pas à précéder les processions, la main plongée dans une corbeille de pétales de roses. Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort, il est de porter la plume dans la plaie. »


Valentin Gaborieau – Décembre 2017