21 mai 2019

L’information à l’ère numérique, 4 jours pour en savoir plus

Pendant quatre jours Fragil a accueilli des employés de mairie et de structure jeunesse de la région pour parler journalisme et numérique. Retour sur ces temps d'ateliers !

L’information à l’ère numérique, 4 jours pour en savoir plus

21 Mai 2019

Pendant quatre jours Fragil a accueilli des employés de mairie et de structure jeunesse de la région pour parler journalisme et numérique. Retour sur ces temps d'ateliers !

Nous avons accueilli pendant quatre jours des participantes et participants travaillant en mairie ou en structure d’accueil jeunesse dans la région nantaise. Ils sont venus dans nos locaux pour participer à quatre journées d’ateliers sur le thème des réseaux sociaux et de l’information à l’ère numérique.  Ces journées sont un dispositif engagé et financé par la DRAC des Pays de la Loire. Les deux premières journées se sont déroulées les 7 et 8 février dernier, les deux dernières les 4 et 5 avril.

Jour 1 – Initiation au journalisme

Pour cette première journée, nous avons plongé nos stagiaires dans la peau de journaliste. Dans un premier temps nous leur avons proposé de réfléchir aux différentes missions que doivent réaliser les journalistes. Chacun et chacune des participant.e.s est amené à donner son avis, proposer des idées à propos du métier de journaliste.

Nous proposons de détacher trois grandes missions qui sont confiées au journaliste :

  • rechercher l’information
  • vérifier l’information en croisant les sources
  • diffuser l’information en utilisant des médias

Toujours dans cette optique de réflexion, nous proposons aux stagiaires de réaliser un atelier d’initiation à l’écriture journalistique. Après avoir noté sur une feuille les 6 questions auxquelles un journaliste doit répondre pour écrire son article ( Qui ? Quoi ? Où ? Quand ? Comment ? Pourquoi ? ), les stagiaires observent une action qui se déroule devant leurs yeux : un salarié de Fragil fait basculer ses clefs d’une main à l’autre et celles-ci tombent à terre. Une fois l’action passée, chacun et chacune doit écrire les réponses aux 6 questions. Puis faire des phrases avec ses réponses pour constituer un court texte semblable au chapô d’un article. Pour finir le texte doit s’accompagner d’un titre. Après lecture de quelques textes, l’atelier révèle quelques dissonances selon l’auteur de celui-ci, ce qui peut être expliqué par l’absence de questions posées au protagoniste de l’action. Cet atelier permet non seulement d’initier aux techniques d’écritures journalistiques, mais aussi à souligner l’importance de la source et de l’usage de questions afin de réaliser un article aussi complet que possible.

Nous enchaînons cette première journée avec un quiz sur la culture web. Les participantes et participants sont donc amenés à interagir entre eux, discuter et réfléchir ensemble pour trouver la solution aux questions posées.

Exemple de questions:

Que sont Firefox, Windows Explorer, Safari, Google Chrome ?

  • des moteurs de recherche
  • des navigateurs web
  • des systèmes d’exploitation

Un serveur web, c’est …

  • Un homme qui sert les commandes dans les cybercafés.
  • Un espace de stockage connecté au web.
  • Une machine pour faire le café

Pour terminer cette première demi journée, nous proposons un atelier d’initiation au HTML, le langage de balisage conçu pour représenter les pages web. À l’aide d’un éditeur de texte les stagiaires sont guidés pour créer une page HTML . À partir de rien ils créent une page contenant du texte, un hyperlien et une photo.

Dans la deuxième partie de journée nous continuons de traiter le journalisme, mais cette fois ci sous l’angle du numérique. Nous commençons l’après midi avec une initiation au GIF et aux MEME.

via GIPHY

Afin de faire découvrir ou redécouvrir les GIF, nous proposons un court quiz, où tous doivent deviner quel.s message.s se cachent derrière un GIF. Les stagiaires y vont de leurs ressentis et de leur imagination pour décrypter les messages donnés à ces images et les potentielles références auxquelles elles se rapportent. L’atelier a pour but de faire découvrir la culture de ces nouveaux langages utilisés sur le web, qui les utilisent ? Dans quels buts et quelles sont leurs utilités ?

Atelier de découverte des GIF et des mèmes.

La journée se termine par un dernier atelier consacré à la réalisation d’une revue de presse numérique. Après une initiation à Twitter et à son utilisation, il est temps pour nos participantes et participants de se lancer dans la création d’une revue de presse sur ce réseau social. Pour chaque groupe le défi est de trouver 3 articles sur un même sujet qu’il ont choisi, 3 tweets, 1 gif, 1 vidéo et 1 chapô. Le tout doit être accompagné de # et de @.

Exemple de revue de presse réalisée lors de cet atelier :

Jour 2 – Les réseaux sociaux et les fake news

Les réseaux sociaux

La deuxième journée de formation débute par un tour des pratiques des réseaux sociaux. Chacun et chacune des stagiaires est convié.e à parler de ses propres pratiques des réseaux au quotidien. Sur quels réseaux sociaux sont-ils inscrits ? Quels usages en font-ils ? Autant d’interrogations qui mènent à définir une définition commune de ce qu’est un réseau social. Définition établie notamment grâce au jeu « autour du mot » où chacun des stagiaires doit écrire un mot en rapport avec le thème réseaux sociaux.

Après avoir fais un tour d’horizon des principaux réseaux sociaux, la discussion s’entame autour de leur fonctionnement. Pourquoi les réseaux sociaux tels que Facebook ou Instagram sont-ils gratuit ? Nous proposons, après quelques réponses, de regarder cette vidéo explicative du modèle économique des réseaux sociaux.

L’empreinte numérique, l’e-réputation et l’identité numérique

Afin de bien différencier les trois notions ci-dessus, nous proposons à nos stagiaires de participer à un jeu. D’après un contenu posté sur Instagram, les participantes et participants doivent faire la liste des informations que l’on apprend sur la personne qui a posté cette photo. Au fil de l’exercice la liste s’allonge et il est plus facile de se rendre compte du nombre de données que beaucoup d’entre nous divulgue sur internet et les réseaux sociaux. Grâce à cet exercice nous différencions l’empreinte numérique ( les données que je met en ligne de manière consciente ou non), l’identité numérique (les données que je maîtrise) et l’e-réputation (comment les autres me voient sur internet).

L’information sur les réseaux sociaux

Cette thématique est abordée en quelques minutes à travers un temps de réflexion commun. À l’aide d’un tableau nous demandons à chaque participante et participant de venir écrire le nom d’un média dans la colonne de gauche, puis d’écrire cocher dans les autres colonnes sur quel.s support.s ce média est diffusé. Le but de cet atelier est de mettre en évidence la diversification des supports et l’omniprésence des médias sur les réseaux sociaux.

Le Live Tweet

Pour finir cette matinée du deuxième jour, nous proposons un jeu pour faire découvrir ce qu’est un Live Tweet. L’ensemble du groupe, excepté deux personnes, est assis vers un mur tandis que les deux personnes restantes restent debout derrière eux. Le groupe ne voit donc pas les deux protagonistes. Ces deux derniers vont alors faire un jeu de mime : une des deux personnes tire un papier sur lequel est inscrit une action ou un fait d’actualité qu’il doit mimer pour faire deviner à la personne d’en face. Lorsque la deuxième personne pense avoir deviné l’action, elle doit alors la résumer en trois phrases pour à son tour la faire deviner au reste du groupe qui ne voit rien de la scène.

Cet atelier permet de faire comprendre ce qu’est un live tweet, c’est à dire résumer en trois phrases une action qui se déroule devant ses yeux pour faire comprendre l’action aux personnes présentes sur Twitter sans que celles-ci ne soit présentes au moment de l’action. On retrouve ce type de tweet notamment lors des manifestations ou autres évènements en mouvement. Pour conclure ce thème, nous délivrons les « clefs » d’un tweet réussi tout en reprenant le fonctionnement de base de ce réseau social. Peu de nos stagiaires y sont inscrit. Enfin nous proposons de passer à la pratique en réalisant un Live Tweet selon un sujet défini. Nous leur imposons la présence de lien, de tweet, de photo et sans oublier les identifications de compte (@) et les hashtags (#).

Exemple d’un livre tweet sur al journée du 7 février :

Fake News

Nous débutons cette thématique avec un débat mouvant où chacun est chacune est amené à se positionner d’un côté ou de l’autre de la salle selon son avis. Après l’évocation d’une phrase de type « Les Fake News sont majoritairement diffusées sur les réseaux sociaux » nous leur demandons de se mettre du côté « d’accord » ou du côté « pas d’accord ». Chaque groupe discute ensuite entre eux pour trouver des arguments, puis vient le temps du débat où chacun des groupes énonce ses arguments.

Nous amenons ensuite un temps de réflexion sur les raisons d’une création d’une fake news. Qui produit des fake news ? Pourquoi ? Quel.s effet.s peut produire une fake news ? Enfin nous réfléchissons sur les outils à mettre en place pour vérifier ou débusquer une fake news.

Enfin nous terminons cette journée par un jeu en groupe de deux. Nous leur proposons à leur tour de créer une fake news. Les consignes sont claires :

  • Inventez 2 Fake News
  • Illustrez les par des photos
  • Présentez les
  • Dans quel but avez-vous créé ces Fake News ?

Le but de cet atelier est de comprendre quel mécanisme est amené lors de la création d’une fake news. Comme chaque jour nous proposons aux participantes et participants de remplir une feuille de bilan de la journée en nous précisant les 3 points positifs et 3 points négatifs qu’ils retiennent de la journée.

Jour 3 – Initiation à la cartographie

De retour dans les locaux de Fragil pour cette troisième journée, les stagiaires ont commencé par un échange autour de la mise en place d’activités en lien avec la première partie de la formation dans leurs structures respectives. Même si peu d’entre elles et eux avaient eu l’occasion de mettre en pratique les notions abordées quelques semaines auparavant, certaines et certains ont avoués avoir vu leur pratique de la critique médiatique s’affiner dans leur quotidien.

« Le journalisme et internet, qu’est ce qui change ? » telle fut la question posée pour définir ensemble ce que le réseau et la technologie modifiait dans la création d’information journalistique. Cette question a permis de créer du débat autour des notions de réactivité quasi instantanée, des nouvelles façons d’enquêter, de la rédaction automatisée et des nouveaux formats de diffusions de l’information. Ce dernier point a amené en douceur la suite de la journée autour de la création d’un reportage sous forme de cartographie numérique interactive.

Après une découverte rapide de l’outil StoryMapJS lors de laquelle les participantes et participants ont été invités à cartographier les emplacements de leurs structures professionnelles, elles et ils ont pu produire en quelques heures seulement des reportages multimédias sur des sujets variés.

La culture aux Dervallières

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Les lieux d’habitation des personnes travaillant autour de la Fabrique Dervallières

https://uploads.knightlab.com/storymapjs/6a2b48757bfdfeb1cdc06e6d51273b35/ou-ktudor/index.html

Les lieux de vie aux Dervallières

https://uploads.knightlab.com/storymapjs/6a2b48757bfdfeb1cdc06e6d51273b35/lieux-de-vies/index.html 

Jour 4 – Initiation à la radio et à la manipulation de l’image

Pour cette dernière journée en compagnie de nos stagiaires, nous leur proposons un atelier par demi journée. Pour la matinée se sera une initiation à la radio et l’après midi sera consacrée aux techniques de manipulation de l’image.

Atelier radio

À la fin de cette matinée l’objectif est d’avoir créé une émission radio d’environ 10 minutes. Pour se faire nous commençons par évoquer avec les participantes et participants leur usage de la radio au quotidien. Puis la discussion s’embraye sur le fonctionnement d’une émission de radio. Nous définissons ensemble les rôles des personnes présentes dans une émission. Le plus souvent on retrouve une personne en charge de l’animation, des journalistes, chroniqueurs, humoristes, réalisateur.rice… Un ensemble de métier qui est facilement identifiable.

Afin de préparer la création de l’émission, nous amenons les stagiaires à produire une brève radio. Seuls, les stagiaire ont quelques minutes pour trouver un article sur internet et en faire une brève, c’est à dire un texte des 5/6 phrases qui pourrait être lu à l’antenne. S’ils le souhaitent, ils sont invités ensuite à faire lire leur brève par leur voisin ou voisine. Ce court atelier permet d’appréhender le caractère synthétique d’une brève puis de travailler le ton lors de sa lecture.

L’atelier création d’une émission de radio peut commencer ! Seul ou par groupe de deux, les stagiaires doivent choisir leur « rôle » dans cette émission, un d’entre eux se désigne comme animateur tandis que les autres s’oriente vers les chroniques ou billets d’humeur. Dans un premier temps il faut trouver un sujet, déterminer sous quelle forme il va être abordé puis communiquer avec l’animateur qui doit réaliser un conducteur c’est à dire la trame de l’émission. C ‘est également à lui de trouver le nom de l’émission ainsi que d’écrire puis d’enregistrer son texte, c’est à dire le lien d’une chronique à l’autre. Toutes et tous sont invités à rapidement écrire leurs textes, pour ensuite aller l’enregistrer soit sur son téléphone portable soit sur son ordinateur à l’aide du logiciel de montage Audacity.

Lorsque toutes et tous ont enregistré leurs audios, c’est au tour de l’animateur de collecter tous les sons pour les monter sur un logiciel de montage. Dans l’ordre qu’il avait précédemment définit, l’animateur dépose les sons sur Audacity en les intercalant avec ses propres enregistrements qui font le lien entre les chroniques. Une fois montée, l’émission Deux Sucres est mise en ligne sur la plateforme de podcast Soundcloud puis diffusée devant tous les stagiaires.

La manipulation de l’image

Pour cette fin de journée nous proposons aux stagiaires de consacrer l’après midi au décryptage de l’image sur internet. Dans un premier temps les participantes et participants sont amenés à discuter autour de leur connaissance sur le sujet. Ont-ils déjà été confronté à des images manipulées ? Comment faire pour vérifier une image ?

Les stagiaires sont ensuite confrontés à des images prises sous différents angles et dont le sens peut être modifié. Nous leur proposons également de visionner quelques vidéos montrant ces manipulations, dont cette publicité pour la marque Dove, bien connue depuis quelques années.

Dans un deuxième temps nous proposons aux participantes et participants de relever un défi en manipulant eux même des images. En quelques minutes, chaque groupe de deux doit réaliser deux photos puis les recadrer pour manipuler les spectateurs + prendre deux photos d’un même sujet avec deux points de vue différents  + prendre deux photos et écrire deux légendes différentes pour influencer les spectateurs.

Exemple des photos prises lors de l’atelier :

Pour finir sur le thème de la manipulation d’image, nous proposons un temps de discussion autour du montage vidéo. Nous évoquons ensemble les différents films ou scènes de films qui nous ont marqué d’un point de vue montage. Cette discussion nous amène à établir un ensemble de vocabulaire plus technique autour du montage vidéo.

Exemple :

  • Le montage alterné : il consiste à exprimer la simultanéité d’au moins deux séquences en faisant alterner régulièrement des scènes des unes et des autres.
  • Le montage convergent : montage alterné dont le rythme s’accélère jusqu’à la rencontre des personnages (ou objets mobiles) de chaque scène dans un même espace.

Au terme de ces quatre journées nous dressons un bilan avec les participantes et les participants afin de rendre compte de leurs avis et de pouvoir nous améliorer pour les prochains temps de formations.

Le voyage à Nantes : passeport pour l’évasion et l’étrange assuré

« Je déclare la solitude ouverte, une surprise pourrait venir avec… » 

Curieuse de tout et surtout de l'info, Romane (se) pose beaucoup de questions. Salariée de Fragil, elle écrit sur l'éducation aux médias et la musique actuelle !

L'édito

Touche pas à mon info !

L’investigation vit-elle ses derniers mois sur l’audiovisuel public en France ? Contraints par une réduction budgétaire de 50 millions d’euros en 2018 par rapport au contrat d’objectifs et de moyens conclu avec l’ancien gouvernement, les magazines « Envoyé Spécial » et « Complément d’enquête » verront leurs effectifs drastiquement diminués et une réduction du temps de diffusion au point de ne plus pouvoir assurer correctement leur mission d’information. Depuis l’annonce, les soutiens s’accumulent, notamment sur Twitter avec le hashtag #Touchepasàmoninfo, pour tenter de peser sur les décisions de Delphine Ernotte, présidente de France Télévisions, déjà visée par une motion de défiance. L’association Fragil, défenseur d’une information indépendante et sociétale, se joint à ce mouvement de soutien.

Après la directive adoptée par le Parlement européen portant sur le secret des affaires en avril 2016, il s’agit d’un nouveau coup porté à l’investigation journalistique en France. Scandales de la dépakine, du levothyrox, du coton ouzbek (pour ne citer qu’eux), reportages en France ou à l’étranger sur des théâtres de guerre, à la découverte de cultures et de civilisations sont autant de sujets considérés d’utilité publique. Cela prend du temps et cela coûte évidemment de l’argent. Mais il s’agit bien d’éveiller les consciences, de susciter l’interrogation, l’émerveillement, l’étonnement ou l’indignation. Sortir des carcans d’une société de consommation en portant la contradiction, faire la lumière sur des pratiques, des actes que des citoyens pensaient impensables mais bien réels. Telle est « la première priorité du service public », comme le considère Yannick Letranchant, directeur de l’information.

En conclusion, nous ne pouvions passer à côté d’une citation d’Albert Londres ô combien au goût du jour, prix éponyme que des journalistes d' »Envoyé Spécial » ont déjà remporté : « Je demeure convaincu qu’un journaliste n’est pas un enfant de chœur et que son rôle ne consiste pas à précéder les processions, la main plongée dans une corbeille de pétales de roses. Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort, il est de porter la plume dans la plaie. »


Valentin Gaborieau – Décembre 2017