9 mars 2020

L’information à l’ère du numérique à la médiathèque de Couëron

Dans la soirée du mercredi 4 mars 2020, Fragil intervenait à la médiathèque de Couëron pendant deux heures sur le thème de l'information, des fake news et des théories du complot.

L’information à l’ère du numérique à la médiathèque de Couëron

09 Mar 2020

Dans la soirée du mercredi 4 mars 2020, Fragil intervenait à la médiathèque de Couëron pendant deux heures sur le thème de l'information, des fake news et des théories du complot.

Sept personnes étaient présentes ainsi que deux bibliothécaires, un public majoritairement composé de personnes retraitées.

L’atelier consistait d’abord à voir ce que sont les missions des journalistes et comment ils et elles écrivent un article. Puis, une grosse partie de l’atelier était centrée sur l’analyse de certaines fake news et à voir les moyens de lutte contre ces dernières. Enfin, un temps beaucoup plus rapide sur les théories du complot.

Merwann, intervenant chez Fragil

Le journalisme

Les participantes et le participant ont été d’abord invités à parler des moyens par lesquels elles et ils s’informent. La radio et Ouest-France faisaient partie des médias les plus cités. En revanche, les deux jeunes présents s’informent plutôt sur internet citant Google.

L’atelier s’est poursuivi par la mise en place d’un débat mouvant, trois choix sont possibles pour les participant.es : être en accord avec la phrase projetée, se mettre au milieu quand on ne peut pas départager, et être en désaccord avec la phrase.

  • « Il faut une carte de presse pour être journaliste » : Une personne explique qu’il faut au préalable être journaliste ou avoir publié des articles pour avoir une carte de presse. On ne l’a pas avant de débuter le métier mais après.
  • « Les journalistes ne donnent pas leur opinion » : Là aussi, le débat est passionné. Plusieurs personnes parlent des journaux qui sont orientés politiquement comme l’Humanité par exemple. Qu’ils sont censés être neutres mais que bien souvent ils appartiennent à un média qui a une ligne éditoriale donc ça se répercute forcément sur la manière dont on traite d’une information. Merwann, salarié de Fragil, aborde enfin la différence entre journalisme d’opinion et journalisme de fait.
  • « En France, on censure des journalistes » : Pour beaucoup, ça se passe pas vraiment ainsi en France comparé à d’autres pays mais en revanche une personne évoque par exemple qu’un article peut être censuré s’il ne rentre pas dans la ligne éditoriale du journal. Merwann évoque le cas d’un documentaire sur Bolloré et ses affaires en Afrique qui a été censuré sur Canal+, ainsi que d’autres articles ayant été censurés. Le cas de l’autocensure est aussi abordé, lié au fait que les médias appartiennent à des actionnaires ayant des intérêts dans certaines entreprises, en bref : on évitera d’enquêter sur Dassault si on travaille au Figaro par exemple.

Quelles sont les missions et questions des journalistes ? 

Dans l’ensemble le fait de rechercher, vérifier et diffuser les informations est rapidement donné par les personnes présentes ainsi que les questions auxquelles un journaliste doit répondre dans un article : qui ? quoi ? où ? quand ? comment ? pourquoi ?

On aborde aussi l’angle et la disposition des informations dans un article avec le schéma de la pyramide inversée qui indique qu’il faut aller du plus important au moins important.

Enfin, sur le journalisme de manière générale, le jeu d’écriture journalistique avec les clés a été réalisé. Personne ne demande le pourquoi de l’action ni même ne pose de questions, ce qui entraîne des articles plutôt différents dans leurs contenus, avec interprétation personnelle sur les raisons du lancer de clés.

Comment lutter contre les fake news ?

Arrive le moment du décryptage des fake news et les manières de lutter contre ces dernières. Les trois raisons de création d’une fake news sont évoquées :

    • L’intérêt financier
    • L’intérêt idéologique
    • L’intérêt humoristique

Plusieurs exemples de fake news ayant beaucoup circulées sur les réseaux sociaux sont montrées. Beaucoup de personnes présentes semblent reconnaître la plupart de ces fake news et notamment celles sur l’enseignement de l’arabe dès le CP, celle sur des Roms qui auraient enlevés des enfants ou encore celle sur l’apprentissage de la masturbation à l’école.
Ce sont souvent des fake news alimentées notamment par l’extrême-droite, qui participent à alimenter le débat public et engendrent des conséquences néfastes, la fake news sur les Roms et les enlèvements s’étant par exemple traduit par des violences à l’égard de cette communauté.

Les participantes et le participant ont ensuite été invité.es à créer une fake news et à expliquer dans quel but il et elles ont choisi ces fake news. Sans surprise, le coronavirus, sujet très présent dans l’actualité est beaucoup revenu dans les fake news.

Le fact-checking

Après avoir vu les fake news en général et ces exemples précis, les personnes présentes ont été invitées à réfléchir aux moyens pour détecter des fake news et lutter contre ces dernières. Pour cela, chaque personne a reçu un article ou un tweet et a dû écrire sur trois post-it différents trois méthodes pour vérifier la véracité de l’article ou du propos. Les post-it sont ensuite affichés sur un tableau. Beaucoup de méthodes reviennent d’une personne à l’autre comme celle d’aller vérifier la fiabilité de la source ou encore d’appeler le média ou la personne émettrice de l’information directement.

Exemples d’articles à analyser

Après un rapide tour d’horizon des solutions proposées, les différents outils et méthodes pour lutter contre les fake news sont présenté.es.

      • Questionner l’information : Avant de partager une information, la première chose à faire est de la questionner. Questionner la cohérence de l’info : est-ce que le message est clair est structuré, est-ce que l’article comporte des fautes ? S’interroger aussi sur l’objectif de l’info : est-ce de renseigner ou bien d’émouvoir ou de choquer par exemple ? Enfin, il faut s’assurer aussi de vérifier la date de publication de l’article qui peut être un bon indicateur de la véracité de l’information.
      • Questionner la source de l’information : D’où provient l’information ? Il faut ici questionner le site en allant faire un tour sur les rubriques « à propos », « contact », « qui sommes-nous ? » et « mentions légales ». Sur les réseaux sociaux, vérifier si le compte qui émet l’info est certifié, vérifier l’identité de la personne. Enfin, plusieurs outils issus de différents médias existent comme par exemple Décodex, qui est l’outil du journal Le Monde et qui permet de vérifier si un site est fiable ou non ou encore Checknews, outil du journal Libération qui permet de poser une question et une équipe de journalistes se chargera de vérifier la véracité ou non de cette info en publiant un article.
      • Questionner l’image : L’image a-t-elle été détournée et utilisée dans une autre circonstance ? L’outil de recherche inversée de Google Images permet, à l’inverse de rechercher une image, de pouvoir mettre le lien d’une image ou de la télécharger et de vérifier où elle est présente sur le net. Ainsi par exemple, les manifestations des gilets jaunes ont donné lieu à beaucoup de détournement sur les réseaux sociaux comme l’image ci-dessous d’un rassemblement pour fêter la victoire de l’équipe de rugby de Clermont-Ferrand alors que cette photo a été présentée sur Facebook comme une manifestation des gilets jaunes dans cette même ville, et a été partagée des milliers de fois.
      • Croiser les sources : Enfin, autre réflexe important : si une information paraît peu crédible ou que sa véracité est à vérifier, il faut chercher la présence de cette info ailleurs et qu’il y ait au moins une de ces sources qui soit un média fiable.

Damien, en service civique chez Fragil

L’atelier s’est terminé par le visionnage de deux vidéos, une sur le fact-checking et l’autre sur les théories du complot avec la vidéo sur le « complot chat », une vidéo que Fragil diffuse à chaque fois que le sujet des théories du complot est abordé puisqu’elle explique relativement bien les ressorts et la fabrication d’un complot.

Une des participantes témoigne : « J’ai appris des choses, déjà pour repérer des fake news et des solutions aussi, parce que je cherchais les techniques et les solutions. Et là je vais m’y mettre, je vais tester. »

Inondation à l’Opéra : une âme qui déborde

Brut : “S’intéresser aux gens normaux qui font des choses extraordinaires”

En service civique et originaire de Perpignan. Tout ce qui tourne autour de la politique m'intéresse, grand amateur de science fiction et de dystopies. J'écris principalement sur les ateliers d'éducation aux médias et au numérique.

L'édito

Touche pas à mon info !

L’investigation vit-elle ses derniers mois sur l’audiovisuel public en France ? Contraints par une réduction budgétaire de 50 millions d’euros en 2018 par rapport au contrat d’objectifs et de moyens conclu avec l’ancien gouvernement, les magazines « Envoyé Spécial » et « Complément d’enquête » verront leurs effectifs drastiquement diminués et une réduction du temps de diffusion au point de ne plus pouvoir assurer correctement leur mission d’information. Depuis l’annonce, les soutiens s’accumulent, notamment sur Twitter avec le hashtag #Touchepasàmoninfo, pour tenter de peser sur les décisions de Delphine Ernotte, présidente de France Télévisions, déjà visée par une motion de défiance. L’association Fragil, défenseur d’une information indépendante et sociétale, se joint à ce mouvement de soutien.

Après la directive adoptée par le Parlement européen portant sur le secret des affaires en avril 2016, il s’agit d’un nouveau coup porté à l’investigation journalistique en France. Scandales de la dépakine, du levothyrox, du coton ouzbek (pour ne citer qu’eux), reportages en France ou à l’étranger sur des théâtres de guerre, à la découverte de cultures et de civilisations sont autant de sujets considérés d’utilité publique. Cela prend du temps et cela coûte évidemment de l’argent. Mais il s’agit bien d’éveiller les consciences, de susciter l’interrogation, l’émerveillement, l’étonnement ou l’indignation. Sortir des carcans d’une société de consommation en portant la contradiction, faire la lumière sur des pratiques, des actes que des citoyens pensaient impensables mais bien réels. Telle est « la première priorité du service public », comme le considère Yannick Letranchant, directeur de l’information.

En conclusion, nous ne pouvions passer à côté d’une citation d’Albert Londres ô combien au goût du jour, prix éponyme que des journalistes d' »Envoyé Spécial » ont déjà remporté : « Je demeure convaincu qu’un journaliste n’est pas un enfant de chœur et que son rôle ne consiste pas à précéder les processions, la main plongée dans une corbeille de pétales de roses. Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort, il est de porter la plume dans la plaie. »


Valentin Gaborieau – Décembre 2017