12 mai 2020

Les ateliers confinés : « ça fait du bien de voir du monde »

Après le grand week-end de pâques, les ateliers en visioconférence reviennent avec bonne humeur et partage toujours au rendez vous. Cette semaine, les bases du podcast et de l'interview ont été posées et les quiz ont permi de débattre autour des fake news et des discours de haine en ligne.

Les ateliers confinés : « ça fait du bien de voir du monde »

12 Mai 2020

Après le grand week-end de pâques, les ateliers en visioconférence reviennent avec bonne humeur et partage toujours au rendez vous. Cette semaine, les bases du podcast et de l'interview ont été posées et les quiz ont permi de débattre autour des fake news et des discours de haine en ligne.

Après le grand week-end de pâques qui a permis à certain.es de se reposer et à d’autres de simplement rajouter une croix sur le calendrier de confinement, les ateliers confinés reviennent en cette cinquième semaine de confinement !

Mardi 14 avril : Atelier d’initiation au podcast audio

Huit personnes sont présentes durant cet atelier animé par Romane, salariée chez Fragil. Avec des personnes issues d’associations et notamment trois personnes du CRIJ. Les participant.es sont essentiellement novices dans la création de podcast. L’idée de partager un moment à plusieurs est aussi une source de motivation : « ça fait du bien de voir du monde ».

L’atelier se déroule en deux parties, une le 14 avril et la suite la semaine suivante. Le premier atelier se consacre plus à la découverte du podcast et de l’écriture, le montage se déroulant la semaine d’après. Pour débuter l’atelier, Romane propose à chacun.e de donner sa propre définition d’un podcast. Cet exercice de réflexion commune permet d’avoir une idée de ce qu’est un podcast : « Outil qui permet de recueillir et diffuser du son » pour une participante. « Diffuser une vidéo ou un audio sur internet » pour une autre. Il y a aussi l' »Idée de petite capsule, l’idée que c’est nomade et que ça se déplace. Le côté bidouille, y en a des professionnels et on peut chez nous faire du bricolage et réaliser un podcast ». Enfin autre explication issue d’un participant « Y a le côté replay, c’est aussi une manière de faire du replay d’émissions produites par la radio par exemple, mais que, le podcast peut être réalisé en dehors d’un média ».

Après cette définition collective, Romane propose à chacun et chacune d’inscrire les podcasts qu’ils et elles connaissent sur un document partagé. De ce document ressortent de nombreux podcasts dont voici la liste :

Une découverte du podcast qui s’est donc faite dans la partage de connaissances, en témoigne ce retour d’une participante : « J’ai bien aimé le fait que ce soit inclusif, qu’on puisse donner nos connaissances. Et finalement je connaissais pas vraiment ce qu’était un podcast. J’ai encore du mal à bien cerner ce que c’est un podcast, ça me donne envie de plus en écouter. Et j’ai bien aimé le fait qu’on puisse écouter les autres et s’écouter soi-même »

La suite de l’atelier plonge directement dans la pratique. Deux groupes se forment : l’un doit créer une dépêche à partir d’un article, l’autre groupe doit résumer en cinq phrases le film Titanic. L’idée est de faire un podcast de trente secondes. Podcast qui est réalisé sur le logiciel Audacity qui permet d’enregistrer et modifier sa voix. Un moment qui s’est réalisé dans la rigolade puisqu’il a fallu quelques minutes pour s’organiser : couper son micro sur zoom pour pouvoir s’enregistrer sur Audacity par exemple.

L’atelier a été reçu positivement  et nombreuses et nombreux ont prévu de venir pour la suite la semaine d’après. « J’ai trouvé ça très cool, de discuter avec d’autres gens sur ce sujet, de découvrir d’autres podcasts, et comme je veux me lancer dans le podcast ça m’a été utile »

Mercredi 15 avril et vendredi 17 avril : Quiz sur les fake news et quiz sur les discours de haine en ligne

Des quiz qui amènent du débat et qui sont disponibles en fin d’article.

Dès le début du quiz sur les fake news, on discute des origines de ces dernières. Des études ont montré qu’elles proviennent majoritairement de l’extrême-droite. Idéologiquement, l’extrême droite va défendre un territoire, une individualité vis à vis des autres et ne verra donc pas de problème à créer de l’information qui va cliver.

Le quiz sur les discours de haine en ligne, plus particulièrement, amène de nombreux débats enrichissants. Les participant.es découvrent des sites et termes utilisés par les réseaux de haine, et notamment d’extrême-droite. Pour les sites, on parle de Egalité et Réconciliation, fondé par Alain Soral ainsi que du forum 18-25, regroupant des jeunes de cette tranche d’âge et étant souvent sous le feu des projecteurs pour des faits de haine en ligne. Des termes et signes comme « SJW« , le signe noun (ن) ou encore le meme Pepe the frog sont discutés.

A la question « Quel événement a suscité la plus forte hausse des discours haineux généralisés entre le 1er janvier et le 31 mai 2019 ? », lorsque la journée internationale des droits des femmes est évoquée, un débat sur l’existence même de cette journée est posé. Cette journée met mal à l’aise certaines participantes, il ne devrait pas y avoir cette journée pour une participante qui voit cela comme « une journée cadeau de noël pour les femmes » et « le reste de l’année ça compte pas ».

La majorité des personnes présentes découvrent aussi l’existence de Pharos, le site de signalement des propos haineux en ligne. Un seul des participants en avait vaguement entendu parlé mais sans s’en souvenir plus que ça. Un site pourtant important, qui apparemment ne bénéficie pas d’une médiatisation suffisante. « Ça montre à quel point on peut avoir entendu parler des choses et pas forcément avoir approfondi. Par exemple Marion Seclin j’avais entendu parler mais j’avais pas forcément suivi » dit ainsi une personne présente. Marion Seclin, youtubeuse, a reçu plus de 40.000 commentaires d’insultes et de menaces après s’être filmée dans la rue pour dénoncer le harcèlement de rue.

Pour se rendre compte de la haine en ligne et la quantifier, une cartographie est disponible en ligne : Cartographie de la haine en ligne

Jeudi 16 avril : Initiation à l’interview

Sept participant.es sont venu.es pour cette « séance de rattrapage » animée par François-Xavier, salarié chez Fragil. L’atelier sur l’interview de la semaine dernière ayant eu un bug qui a empêché la moitié des personnes d’y assister.

La traditionnelle présentation de chacun et chacune en début de ces ateliers confinés se déroule d’une autre manière. Pour être en adéquation avec le thème de l’atelier du jour, chaque personne est présentée par un.e des participant.es, et non pas une auto-présentation comme d’habitude.

Les deux questions pour présenter la personne désignée sont envoyées en message privé sur Zoom. Une manière de faire pratique selon le retour d’une participante puisqu’on peut se souvenir fidèlement de ce qu’a dit la personne. En revanche, la limitation à deux questions impose de faire des choix et de ne pas pouvoir rebondir sur les réponses.

Vient ensuite la pratique. Chaque personne a cinq minutes pour poser cinq questions à Patrick Bruel. Après une mise en commun, il y a une grande généralité dans beaucoup de questions. Le contexte (confinement) revient dans quasiment  toutes les questions (comment vivez-vous le confinement ? Les projets pendant le confinement ? etc..).

Ces questions générales permettent d’aborder ensuite la question de la ligne éditoriale et de l’angle. François-Xavier donne à chacun.e un angle différent : le cinéma, le poker, son enfance, la chanson qu’on trouve la plus intéressante, la musique, ses histoire de harcèlement, la scène musicale actuelle. Cinq nouvelles questions sont à poser à Patrick Bruel en fonction, maintenant, de l’angle.

L’intérêt d’une question, c’est aussi d’avoir déjà des informations dedans. Il faut aussi éviter de poser des questions fermées, qui appellent l’interviewé.e à répondre par oui ou par non. En posant des questions ouvertes, la personne va être obligée de développer.

Plusieurs questions sont ensuite évoquées par les participant.es. Comment mettre à l’aise une personne ? Comment amoindrir la peur de mettre un micro devant la personne interviewée ? Pour cela, il faut verbaliser. Si on enregistre la personne, il faut préciser que ça permet de bien retranscrire ce qui a été dit et d’éviter de déformer le propos. L’utilisation du téléphone est moins effrayant qu’un micro. Prévenir bien entendu la personne qu’on l’enregistre. Un retour d’un participant permet d’aborder la correction des interviews. Ce participant s’est fait interroger par une personne qui lui a ensuite renvoyé l’interview pour corriger d’éventuelles erreurs. Une interview ne doit pas se dérouler ainsi. Le journaliste ne fait pas de la communication pour une personne, il ne doit pas faire corriger et ne doit pas non plus envoyer ses questions en amont.

L’interview c’est une source d’information mais ce n’est en aucun cas une discussion. L’interviewé.e n’a pas à dire « et vous ? » « qu’auriez-vous fait à ma place ? ». Enfin, il faut veiller à écouter les réponses, ne pas poser une question à laquelle la personne a déjà répondu. Pour rebondir, il faut donc écouter, avoir fait des recherches avant et donc avoir préparé son sujet.

Les retours ont été, dans l’ensemble, très positifs pour cet atelier :  « J’ai trouvé ça intéressant. Si jamais je devais me mettre à parler de culture, c’est intéressant d’avoir les bases, d’avoir toutes les clés nécessaires à l’édition de bons contenus » selon une participante. « Y a le temps de l’intégration et de l’expérimentation. Pour l’instant pour moi c’est théorique. Après faut oser se lancer » pour un autre participant.

Les quiz utilisés cette semaine :

La culture nantaise migre sur la toile : Théâtres Nantais, scènes de vie

Podcast "Education2.0" : L'histoire du numérique à l'école

En service civique et originaire de Perpignan. Tout ce qui tourne autour de la politique m'intéresse, grand amateur de science fiction et de dystopies. J'écris principalement sur les ateliers d'éducation aux médias et au numérique.

L'édito

Touche pas à mon info !

L’investigation vit-elle ses derniers mois sur l’audiovisuel public en France ? Contraints par une réduction budgétaire de 50 millions d’euros en 2018 par rapport au contrat d’objectifs et de moyens conclu avec l’ancien gouvernement, les magazines « Envoyé Spécial » et « Complément d’enquête » verront leurs effectifs drastiquement diminués et une réduction du temps de diffusion au point de ne plus pouvoir assurer correctement leur mission d’information. Depuis l’annonce, les soutiens s’accumulent, notamment sur Twitter avec le hashtag #Touchepasàmoninfo, pour tenter de peser sur les décisions de Delphine Ernotte, présidente de France Télévisions, déjà visée par une motion de défiance. L’association Fragil, défenseur d’une information indépendante et sociétale, se joint à ce mouvement de soutien.

Après la directive adoptée par le Parlement européen portant sur le secret des affaires en avril 2016, il s’agit d’un nouveau coup porté à l’investigation journalistique en France. Scandales de la dépakine, du levothyrox, du coton ouzbek (pour ne citer qu’eux), reportages en France ou à l’étranger sur des théâtres de guerre, à la découverte de cultures et de civilisations sont autant de sujets considérés d’utilité publique. Cela prend du temps et cela coûte évidemment de l’argent. Mais il s’agit bien d’éveiller les consciences, de susciter l’interrogation, l’émerveillement, l’étonnement ou l’indignation. Sortir des carcans d’une société de consommation en portant la contradiction, faire la lumière sur des pratiques, des actes que des citoyens pensaient impensables mais bien réels. Telle est « la première priorité du service public », comme le considère Yannick Letranchant, directeur de l’information.

En conclusion, nous ne pouvions passer à côté d’une citation d’Albert Londres ô combien au goût du jour, prix éponyme que des journalistes d' »Envoyé Spécial » ont déjà remporté : « Je demeure convaincu qu’un journaliste n’est pas un enfant de chœur et que son rôle ne consiste pas à précéder les processions, la main plongée dans une corbeille de pétales de roses. Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort, il est de porter la plume dans la plaie. »


Valentin Gaborieau – Décembre 2017