8 septembre 2017

La Route du Rock 2017 : retour gagnant

Soleil jouant avec quelques nuages, eau outremer, le vent dans les cheveux, le sable et la poussière. En plus d’être placée sous le signe du beau temps, on retiendra de cette Route du Rock 2017 une programmation exceptionnelle, avec une mention spéciale pour le vendredi et le dimanche.  Retour sur les grands moments, les attentes déçues et les bonnes surprises, avec un focus sur le groupe montant du shoegaze californien Froth.

La Route du Rock 2017 : retour gagnant

08 Sep 2017

Soleil jouant avec quelques nuages, eau outremer, le vent dans les cheveux, le sable et la poussière. En plus d’être placée sous le signe du beau temps, on retiendra de cette Route du Rock 2017 une programmation exceptionnelle, avec une mention spéciale pour le vendredi et le dimanche.  Retour sur les grands moments, les attentes déçues et les bonnes surprises, avec un focus sur le groupe montant du shoegaze californien Froth.

Serait-ce la mise doublée sur les cachets d’artistes ? En tout cas la qualité des prestations de cette Route du Rock 2017 rend épineux le choix du moment pour satisfaire aux besoins naturels : quand aller manger, boire, aux toilettes, dormir…lorsque quasiment TOUTE la prog donne envie ? Il faut faire des choix, parfois suivis de regrets, c’est le jeu du festival. Alors on se dit qu’on remettra ces rendez-vous manqués à la prochaine… En attendant, retour sur les grands moments, les attentes déçues et les bonnes surprises, avec un focus sur le groupe montant du shoegaze californien Froth à retrouver ici.

36 450. C’est le nombre de festivaliers s’étant réunis pour ces quatre jours de fête indie entre la salle de la Nouvelle Vague le jeudi soir, la plage de Bonsecours l’après-midi et le Fort de Saint-Père les trois derniers soirs. Un coup de boost côté billetterie par rapport aux années précédentes qui n’est pas sans redonner le sourire aux patrons Alban Coutoux et François Floret, aux manettes de l’événement malouin pour sa 27ème édition. Une fréquentation telle que, victime de la renommée de sa tête d’affiche du vendredi (PJ Harvey), le Fort se donne des airs d’embouteillage géant le premier jour : file de voitures à l’entrée du parking, (longue) attente à l’entrée, et queues qui s’allongent devant les stands de boissons et de nourriture.

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Jour 1

Malheur à ceux qui auront tardé à prendre la route de Saint-Père, car c’est le groupe montant de shoegaze californien Froth qui ouvre les hostilités. Pour se rattraper de ne pouvoir commenter que les deux derniers morceaux (à notre grand regret), Fragil a rencontré la moitié du groupe backstage afin de mieux cerner cette formation née d’une blague potache il y a quatre ans : ne sachant jouer d’aucun instrument, les jeunes Froth enregistrent un album-concept fait de…silence ! Sans être des showmen, le jeu de batterie carré vient soutenir les guitares vaporeuses des titres du dernier album – Outside (Briefly) – qui atteste de l’évolution de Froth d’un style garage à une pop shoegaze ponctuée de ballades (Petals) ou d’envolées cosmiques (Passing Thing).

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Curieux de voir évoluer sur scène les fantasques Foxygen, le public se presse devant la grande scène du Fort baignée de soleil. Les verres teintés de rose en forme de cœur sont donc (évidemment?) de rigueur pour le chanteur Sam France, pompeuse imitation d’un Bowie glam : costume blanc ouvert sur son torse nu couvert de paillettes, il exhibe un chant tantôt grave à la Neil Hannon tantôt le ton nasillard d’un Bob Dylan. Pour l’accompagner, son acolyte et co-compositeur Jonathan Rado aux synthés et à la guitare, mais aussi une section de cuivres ou encore une choriste tout en sourires.

On n’est pas loin des neuf personnes qui s’agitaient sur scène lors de leur précédente tournée, une impression de troupe de comédie musicale renforcée par les albums-concept proposés par les Californiens depuis 2013. Malgré quelques problèmes de micro qui gâchent le chant masculin-féminin sur la mutine San Francisco et les soli de guitare et de basse un peu trop appuyés, le swing et le lyrisme des morceaux qui n’auraient pas dénoté dans les seventies font mouche, parmi lesquels Follow the Leader, extraite de leur plus récent disque Hang. Entre les chansons, les sorties de Sam France, complètement délirantes, sont drôles (il fait référence aux hippies dans les arbres et nous déclare son amour, avant de le destiner plutôt…aux USA), quand elles ne frôlent pas le caprice de rock star. Il enverra en effet valser un cameraman au moment où il se change en bord de scène et quittera plus tard l’espace presse avec perte et fracas…

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[aesop_quote type= »pull » background= »#282828″ text= »#ffffff » align= »left » size= »1″ quote= »Une figure mythologique couronnée de plumes dont on craint de détacher les yeux » parallax= »off » direction= »left » revealfx= »off »]

C’est un autre théâtre qui prend la suite sur la grande scène du Fort, plus proche du Nô dans sa nudité que du cirque du Rocky Horror Picture Show. PJ Harvey saisit le micro et brandit son saxophone comme une politicienne à la tribune, après avoir pénétré l’espace scénique en toute solennité au milieu des neuf musiciens qui l’accompagnent dans cette étrange parade toute de noir vêtue. Quand elle ne s’avance pas pour chanter, l’humble PJ Harvey se retire doucement pour se fondre parmi ses camarades et sortir des notes de son saxo, instrument fétiche ayant remplacé la guitare. Renforçant cette idée de veillée funèbre, les grosses caisses décorées de blasons animaliers et du nom de la reine du rock anglais, ainsi que les chœurs masculins venant étayer le timbre sans faille de Polly Jean, qu’elle pousse dans les aigus ou dans les graves. Fragile et forte à la fois, l’artiste se pose dans sa toge faite de voiles fluides à la fois austères et sexy tel un chœur antique dénonçant l’actualité sociale et politique sur les titres de son plus récent album The Hope Six Demolition Project, une figure mythologique couronnée de plumes dont on craint de détacher les yeux. Quelques échappées dans sa riche discographie nous font passer par White Chalk (les titres White Chalk et Dear Darkness), Let England Shake (le morceau éponyme et la sublime In The Dark Places) et par le doublet frissonnant et grave Down By The Water/To Bring You My Love. Pour seule interaction, Polly Jean nous offre parfois un imperceptible plissement des lèvres après les morceaux. Ce n’est qu’aux trois quarts du concert que la foule venue en masse l’acclamer peut enfin s’en donner à cœur joie : PJ présente un à un ses musiciens (dont les fidèles Mick Harvey et John Parish) et lâche un « merci beaucoup » en français qui ravit une foule difficile ensuite à faire taire. Elle restera pourtant attentive jusqu’aux dernières mesures de River Anacostia dans un chant a capella qui nous laisse sans voix.

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Il est temps de rejoindre Froth pour l’interview et donc malheureusement de manquer la quasi-totalité du set de Car Seat Headrest pourtant attendu avec impatience. Les excités d’Idles laissent la place à Thee Oh Sees, pour une prestation déjantée. La section rythmique, en front de scène, aligne comme une armée une basse et deux batteries, soutenant le leader John Dwyer qui tient haut sa guitare transparente. Vêtu d’un marcel rayé et d’un bermuda laissant voir ses innombrables tatouages, le chanteur pousse des cris et crache dans et hors micro, provoquant slams et pogos dans l’assistance. Un concert fou et urgent parfait pour terminer cette première soirée au Fort.

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Jour 2

L’après-midi du samedi s’écoule tranquillement sur la plage, en arrière-plan les plages ambient de Le Comte puis Kaitlyn Aurelia Smith. Si la cold wave des Cold Pumas n’est pas dérangeante en début de soirée au Fort, elle n’emballe pas faute d’une présence assez fantomatique, notamment du batteur-chanteur qui lit ses paroles.

Le vent de fraîcheur vient ce soir-là de Parquet Courts que nous découvrons malgré un parcours de cinq albums. L’énergie est palpable tout au long du set des quatre New-Yorkais, jusqu’à ce qu’Andrew Savage s’agenouille contre son ampli de guitare. C’est ce dernier qui alterne au chant avec son acolyte Austin Brown, qui partage la silhouette dégingandée d’un Thurston Moore. La ressemblance avec Sonic Youth n’est pas seulement physique, dans les morceaux post-punk, les soli de guitare saturée, bien qu’on retrouve également la nonchalance du chant de Pavement (Human Performance), des synthés facétieux ou encore des guitares western (Berlin Got Blurry). Du bordel, mais aussi de la mélodie et de l’humour : Austin Brown, bavard, propose un bain de minuit plus tard sur la plage ou nous fait répéter comme un leitmotiv les deux seuls mots de français qu’il connaît : « Oui, encore ! » en s’étonnant du pouvoir qu’il détient sur nous.

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La prestation de Temples est lisse et sans accrocs et ne réussit pas à convaincre : on aurait préféré effectuer une pause repas à ce moment-là plutôt que pendant Arab Strap. Mais l’une des têtes d’affiche du samedi rentre en scène : The Jesus and Mary Chain est la reformation majeure du week-end, 32 ans après l’album-culte Psychocandy, et la sortie récente d’un disque, Damage and Joy. Le bilan : un concert plus pop que noisy pop. En effet, la voix de Jim Reid à la forte présence scénique est claire et mise en avant par rapport aux murs de guitare plus discrets de son frère William, relégué en fond de scène. Sans espérer un set inaudible, nous attendions le brouillard de guitares sur lequel vient se poser une voix candide ; le point plus que positif étant que les qualités de mélodistes des Jesus sont valorisées. Restent les moments fédérateurs, notamment pendant les morceaux April Skies ou Just Like Honey. La présence de ce dernier titre sur la BO du Lost in Translation de Sofia Coppola a fait connaître le groupe des frères Reid aux plus jeunes générations et suscite les cris de la foule en fin de concert.

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Serait-on devenus sourds après la déflagration de The Jesus and Mary Chain ? Absolument pas ! C’est pourtant l’effet rendu par le concert des attendus Black Lips. Un technicien son bloqué dans la file des toilettes et qu’on ne retrouvera malheureusement jamais (simple supposition) fait que nous entendons davantage la conversation des voisins que le rock garage des excités qui lancent des rouleaux de PQ sur scène comme des beaux diables. Impressions d’avoir de la ouate dans les oreilles et de voir des gens s’amuser loin, très loin, sans avoir le droit de participer. L’énigme du Fort ce week-end : comment la catastrophe sonique du set des Black Lips n’a pas pu être corrigée ? En attendant de leur donner une seconde chance à Stereolux cet automne…

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Et pour continuer sur les déceptions (samedi maudit…), Future Islands. Malgré le chanteur qu’on attend tous en entertainer écorché vif, les morceaux se suivent et se ressemblent, ritournelles post-disco-punk où l’éternelle ligne de basse imperturbable rencontre la nappe de synthés mélancolique. Sam T. Herring a beau se frapper la poitrine, traverser la scène de part en part comme un lion en cage, bousculer les caméras, tirer la langue et esquisser des pas de danse cosaque, la formule ne convainc que sur quelques morceaux. Et de se rappeler la boutade du journaliste qui a interviewé un peu plus tôt le chanteur en conférence de presse en évoquant ses paroles sous forme de journal intime : « Vous auriez pu faire de l’emo… » Cela aurait-il mieux fonctionné ?


Jour 3

Le dimanche s’ouvre sur les morceaux chantournés de The Proper Ornaments, projet parallèle de membres de Toy et Veronica Falls. La pop lorgne vers le rêve psyché et les voix éthérées rappelant par moments The Dandy Warhols.

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Les nuages gris s’invitent sur la Route du Rock mais tendront à se dégager pour ensoleiller la dernière partie du set de l’espiègle Angel Olsen. Épaulée par son groupe dans lequel femmes comme hommes portent costards gris et cravates texanes, elle arbore des lunettes en forme de cœur et une étrange combinaison couleur pêche associée à des chaussettes rouges et des boots marron (le combo le plus risqué du week-end avant le show des Moonlandingz peut-être). Guitare portée haut, Angel jouent des morceaux qui se font immédiats (Shut up Kiss Me sur son dernier album My Woman) ou s’étirent en de longs jams rock avec le reste du groupe, nous perdant parfois dans ses méandres. Mais Angel nous enchante pourtant de sa voix pleine, douce ou conquérante et de ses accords entre rock, folk et blues, notamment lors du long final tout en intensité de Woman. Ravie d’être de retour en France, l’Américaine nous lance à plusieurs reprises de suaves « I love you » dans des sourires enjôleurs avant de s’échapper dans les rayons de soleil.

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Une petite pause permet de se restaurer avant le concert de l’une des stars du week-end pour de nombreux (jeunes) festivaliers. Les fans peuvent se faire photographier avec son effigie en carton taille réelle au stand des Balades Sonores, comme si c’était leur meilleur pote. Et vous savez quoi ? Mac DeMarco est votre meilleur pote. Il prend la navette avec les autres festivaliers pour venir au Fort (heureusement lui était à l’heure) et invite d’autres artistes (Angel Olsen et son groupe notamment) et copains à venir trinquer avec lui et sa canette de bière (ou son litron de vin cheap) : c’est la « bistro table », un havre de paix en bord de scène où ça prend du bon temps pendant tout le set autour de la glacière. Si la reconnaissance dont jouit l’artiste pour sa musique chill et décomplexée me rend toujours perplexe depuis mon premier concert de Mac à ses débuts dans sa ville natale à Edmonton au Canada en 2012, force est de constater que le capital sympathie du bonhomme est indéniable. Petit discours préalable, il présente tous ses musiciens comme dans une soirée intimiste et invite tout le monde à sourire à son prochain pendant qu’il joue ses ballades à la guitare cristalline ponctuées de minimalistes notes de synthé, clope à la main le plus souvent.

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Pour lui rappeler l’épisode de la navette, des festivaliers lui font parvenir un épi de maïs sur scène qu’il croque et partage avec facétie. Pas de slam déraisonnable dans la foule cette fois-ci (il avait été porté par la foule lors de son dernier passage à la Route du Rock en 2014), mais une reprise mémorable du tube de Vanessa Carlton, A Thousand Miles, qui finira d’électriser les fans les plus fervents du jeune Canadien.

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Mais l’autre tête d’affiche, attirant sans doute un public légèrement plus âgé, est encore à suivre. Pour qui a assisté au premier concert français d’Interpol en août 2001 dans cette même enceinte s’en rappelle encore comme d’un mélange hypnotisant alors inédit entre la voix de Ian Curtis et la noirceur de The Cure. Venu de New-York à la dernière minute pour pallier la défection de Saul Williams, le groupe qui n’a même pas alors publié le moindre single, parvient à captiver un auditoire qui attendra plus d’un an la sortie de son premier album comme un événement. Il s’agira de Turn On The Bright Lights, disque majeur des années 2000 dans le renouveau rock notamment représenté par The Strokes. Ce dimanche 20 août, comme le rappelle le leader Paul Banks après quatre morceaux plus récents du groupe qui enflamment le Fort (notamment Slow Hands, Not Even Jail et Take You on a Cruise), il s’agit du quinzième anniversaire de la sortie de ce premier opus, 16 ans après leur premier concert à Saint-Malo. Un moment d’émotion qu’Interpol célèbre en jouant dans son intégralité son premier album Turn On The Bright Lights. Et pendant cette prestation, point de déception lié à une reformation factice : malgré le départ du bassiste initial Carlos Dengler, la magie opère grâce à un son et une mise en place parfaits, que transcende l’aura de morceaux remis encore et encore sur la platine, dont on connaît les paroles par cœur, tout comme le moindre éclat de basse ou la moindre incise de guitare.

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En dépit des années, Daniel Kessler à la guitare vient chercher les spectateurs près des retours scène, un large sourire sur les lèvres après chaque morceau, la voix de Paul Banks, profonde, est sincère, et le plaisir de jouer du batteur Sam Fogarino est palpable (« Ma-gni-fique ! » s’exclame-t-il en français au micro en fin de set). La mélancolie traînante d’Untitled en ouverture provoque des frissons qui ne nous quittent plus jusqu’à Leif Erikson : un set tout en tension, transpirant, puissant, pendant lequel les membres en chemise ou costume ajustés se découpent telles des ombres chinoises dans la pénombre. L’urgence de Say Hello To The Angels, les pogos sur PDA pendant lequel tous les premiers rangs reprennent en chœur le refrain, les accords lancinants de NYC . Les acclamations suivront le groupe jusqu’à un dernier cadeau extrait de l’album Antics, Evil.

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Interpol a permis d’effacer la fatigue qui commence à se faire sentir en ce troisième jour et le set de The Moonlandingz, dont le leader Lias Saoudi est échappé de Fat White Family, constitue pour cette fin de soirée un parfait équilibre entre énergie glam et cosmique et dingueries. La guitariste en survêt lâche des riffs saturés, le bassiste a des airs de motard pas commode un pied posé sur le retour, tandis que le chanteur troque en cours de concert son pull de Noël pour un look torse nu sans toutefois lâcher ses lunettes aérodynamiques et son attitude.

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C’est Ty Segall qui est chargé de clore le chapitre rock de cette édition sur la grande scène. Déjà repéré comme batteur de son projet Fuzz en 2015, il revient en force comme leader d’une formation prête à en découdre avec son rock garage. Qu’ils soient vêtus de veste de costard, chemise classe, haut en résille, coupe-vent, t-shirt publicitaire ou souliers en croco, toute la garde-robe des musiciens est ce soir en déclinaisons de rouge. Le blond guitariste assène dès les premières minutes des distorsions qui se terminent souvent en démonstrations endiablées de plusieurs minutes à la six-cordes, quand le garage ne se frotte pas aux influences zeppeliniennes et hard rock. Encore une démonstration que cet infatigable artiste sait mettre un public dans sa poche, même au terme d’un festival riche en découvertes et confirmations.

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A lire également l’interview de Froth.

Sans la musique (et l'art), la vie serait une erreur. Passionnée par le rock indé, les arts visuels et les mutations urbaines, Sandrine tente de retrouver l'émotion des concerts, de restituer l'univers des artistes et s’interroge sur la société en mutation.

L'édito

Touche pas à mon info !

L’investigation vit-elle ses derniers mois sur l’audiovisuel public en France ? Contraints par une réduction budgétaire de 50 millions d’euros en 2018 par rapport au contrat d’objectifs et de moyens conclu avec l’ancien gouvernement, les magazines « Envoyé Spécial » et « Complément d’enquête » verront leurs effectifs drastiquement diminués et une réduction du temps de diffusion au point de ne plus pouvoir assurer correctement leur mission d’information. Depuis l’annonce, les soutiens s’accumulent, notamment sur Twitter avec le hashtag #Touchepasàmoninfo, pour tenter de peser sur les décisions de Delphine Ernotte, présidente de France Télévisions, déjà visée par une motion de défiance. L’association Fragil, défenseur d’une information indépendante et sociétale, se joint à ce mouvement de soutien.

Après la directive adoptée par le Parlement européen portant sur le secret des affaires en avril 2016, il s’agit d’un nouveau coup porté à l’investigation journalistique en France. Scandales de la dépakine, du levothyrox, du coton ouzbek (pour ne citer qu’eux), reportages en France ou à l’étranger sur des théâtres de guerre, à la découverte de cultures et de civilisations sont autant de sujets considérés d’utilité publique. Cela prend du temps et cela coûte évidemment de l’argent. Mais il s’agit bien d’éveiller les consciences, de susciter l’interrogation, l’émerveillement, l’étonnement ou l’indignation. Sortir des carcans d’une société de consommation en portant la contradiction, faire la lumière sur des pratiques, des actes que des citoyens pensaient impensables mais bien réels. Telle est « la première priorité du service public », comme le considère Yannick Letranchant, directeur de l’information.

En conclusion, nous ne pouvions passer à côté d’une citation d’Albert Londres ô combien au goût du jour, prix éponyme que des journalistes d' »Envoyé Spécial » ont déjà remporté : « Je demeure convaincu qu’un journaliste n’est pas un enfant de chœur et que son rôle ne consiste pas à précéder les processions, la main plongée dans une corbeille de pétales de roses. Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort, il est de porter la plume dans la plaie. »


Valentin Gaborieau – Décembre 2017