30 septembre 2021

Une initiation à l’algorithmie des réseaux sociaux avec les Promeneurs et Promeneuses du Net

Le 23 septembre 2021, l'association Fragil est intervenue auprès d'une trentaine de Promeneurs du Net pour un temps d'échanges sur l'usage d'algorithmes par les réseaux sociaux. Ces deux heures d'ateliers à la Maison de l'Europe de Nantes ont permis une meilleure compréhension du fonctionnement des géants du net.

Une initiation à l’algorithmie des réseaux sociaux avec les Promeneurs et Promeneuses du Net

30 Sep 2021

Le 23 septembre 2021, l'association Fragil est intervenue auprès d'une trentaine de Promeneurs du Net pour un temps d'échanges sur l'usage d'algorithmes par les réseaux sociaux. Ces deux heures d'ateliers à la Maison de l'Europe de Nantes ont permis une meilleure compréhension du fonctionnement des géants du net.

« Vous devez vous classer, mais vous n’avez pas le droit de parler ». C’est ainsi que l’animateur et l’animatrice de Fragil ont introduit l’atelier sur l’algorithmie en cette fraîche matinée de septembre. Réunie dans la cour de la Maison de l’Europe sur l’île de Nantes, la trentaine de professionnels et professionnelles jeunesse adhérante au dispositif Promeneurs du Net  a quelques difficultés à communiquer quand on la prive de l’usage de la parole de bon matin. Cependant au bout de quelques minutes, des groupes se forment : garçons d’un côté, filles de l’autre. Enfin pas pour tout le monde, certains et certaines n’avaient pas saisi comment les groupes s’étaient constitués. La parole est autorisée et l’opération est relancée plusieurs fois de suite, en demandant toujours au groupe de trouver de nouvelles manières de se classer.

Brise-glace autour du thème de l’algorithmie. (Photo : Pierre-Adrien Roux)

Classements par taille, par année d’adhésion au programme de Promeneurs du Net, par couleur de chaussures, par possession de lunettes ou pas. Autant de classements qui permettent d’introduire la séance dédiée à l’algorithmie. En effet, en demandant aux participants et participantes d’enchainer certaines opérations de tri dans un ordre puis dans un autre, on s’aperçoit que les résultats sont différents. Le groupe découvre par l’expérience que l’algorithmie c’est : des entrées (chaque individu du groupe et leurs caractéristiques propre), des instruction simples exécutées dans un ordre précis (les manières de trier le groupe) et un résultat.

Le matériel utilisé pour réfléchir aux algorithmes. (Photo : Pierre-Adrien Roux)

Après avoir constitué des groupes de quatre, les stagiaires ont rejoint l’intérieur du bâtiment pour des ateliers en demi-groupe. Chaque équipe de quatre personne a été invitée à s’imaginer lancer son propre réseau social et à lui trouver un nom. Puis, en s’appuyant sur des cartes représentant des « posts » de réseaux sociaux et en rebondissant sur la première activité, les groupes ont du trouver un maximum de manière de classer ces posts. (Pour plus de détails sur le déroulé de l’atelier « Algorithme » créé par Fragil, c’est par ici.)

L’animatrice de Fragil expose une consigne pour définir un algorithme. (Photo : Pierre-Adrien Roux)

« On se rend compte que tout y est réfléchi et choisi, de façon très délibérée »

Cette étape passée, chaque « réseau social » a dû définir son propre algorithme de classement de fil d’actualité. « Truq » a décidé de n’afficher que les posts qui contenaient les quatre lettres T, R, U et Q et de les classer en fonction de leur nombre de « likes » par ordre décroissant. Les créateurs et créatrices de « Utopie » ont décidé de n’afficher les posts ne contenait aucune marque de négation (« ne » ou « n’ « ) et de les classer par ordre antichronologique. Chaque groupe a pu ainsi comprendre que derrière chaque algorithme il y avait bien des choix humains qui ont des incidences parfois politiques. « En nous mettant à la place de créateurs de réseaux sociaux et en utilisant des exemples simples, on décrypte la logique des algorithmes (si… alors…), et on se rend compte que tout y est réfléchi et choisi, de façon très délibérée » indique Camille Chikaoui, informatrice Jeunesse d’Info Jeunes Pays de la Loire. Enfin, les start-upeurs et start-upeuses du jour ont pu introduire une dimension personnalisée à leur algorithme, incorporant à leurs instructions des opérations liées à des données présentées sur un profil d’utilisateurs. « Si l’utilisateur ou l’utilisatrice à moins de 20 ans, le réseau e.Pistolair n’affichera que des contenus en accord avec son premier centre d’intérêt » , « Si l’utilisateur ou utilisatrice a renseigné un sujet qui ne l’intéresse pas, Day Club n’affichera aucun post lié à cette thématique », autant d’exemples qui ont permis aux participants et participantes de comprendre comment il est possible que deux utilisateurices du même réseau social puissent avoir des fils d’actualités totalement différents. La construction de l’atelier, partant du simple tri d’un groupe de personnes pour terminer sur la création d’un algorithme personnalisé atteint ses objectifs de vulgarisation, comme le souligne l’informatrice jeunesse :  « l’atelier est très progressif, ce qui nous permet de prendre conscience petit à petit de comment tout fonctionne. »

Par petits groupes, les participants et participantes inventent l’algorithme de leur réseau social. (Photo : Pierre-Adrien Roux)

La matinée s’est conclue sur un temps d’échange autour des enjeux éthiques et personnels liés à la prolifération des algorithmes dans notre quotidien. Discussion apparemment impactante puisque au delà de l’envergure professionnelle de cet atelier, Camille Chikaoui nous confiera avoir été touchée par cette réflexion au niveau personnel : « ça soulève de nombreuses questions… et me fait remettre en questions mes propres pratiques ».

Une journée pour découvrir des outils d'éducation aux médias à Lorient

Festival SCOPITONE : Une édition post-covid sous le signe de l'adaptabilité et de la frustration

Chargé de projets numériques et médiatiques chez Fragil depuis 2017, musicien, auteur, monteur... FX est un heureux touche-à-tout nantais. Il s'intéresse aux musiques saturées, à l'éducation aux médias, aux cultures alternatives et aux dystopies technologiques.

L'édito

Touche pas à mon info !

L’investigation vit-elle ses derniers mois sur l’audiovisuel public en France ? Contraints par une réduction budgétaire de 50 millions d’euros en 2018 par rapport au contrat d’objectifs et de moyens conclu avec l’ancien gouvernement, les magazines « Envoyé Spécial » et « Complément d’enquête » verront leurs effectifs drastiquement diminués et une réduction du temps de diffusion au point de ne plus pouvoir assurer correctement leur mission d’information. Depuis l’annonce, les soutiens s’accumulent, notamment sur Twitter avec le hashtag #Touchepasàmoninfo, pour tenter de peser sur les décisions de Delphine Ernotte, présidente de France Télévisions, déjà visée par une motion de défiance. L’association Fragil, défenseur d’une information indépendante et sociétale, se joint à ce mouvement de soutien.

Après la directive adoptée par le Parlement européen portant sur le secret des affaires en avril 2016, il s’agit d’un nouveau coup porté à l’investigation journalistique en France. Scandales de la dépakine, du levothyrox, du coton ouzbek (pour ne citer qu’eux), reportages en France ou à l’étranger sur des théâtres de guerre, à la découverte de cultures et de civilisations sont autant de sujets considérés d’utilité publique. Cela prend du temps et cela coûte évidemment de l’argent. Mais il s’agit bien d’éveiller les consciences, de susciter l’interrogation, l’émerveillement, l’étonnement ou l’indignation. Sortir des carcans d’une société de consommation en portant la contradiction, faire la lumière sur des pratiques, des actes que des citoyens pensaient impensables mais bien réels. Telle est « la première priorité du service public », comme le considère Yannick Letranchant, directeur de l’information.

En conclusion, nous ne pouvions passer à côté d’une citation d’Albert Londres ô combien au goût du jour, prix éponyme que des journalistes d' »Envoyé Spécial » ont déjà remporté : « Je demeure convaincu qu’un journaliste n’est pas un enfant de chœur et que son rôle ne consiste pas à précéder les processions, la main plongée dans une corbeille de pétales de roses. Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort, il est de porter la plume dans la plaie. »


Valentin Gaborieau – Décembre 2017