Nous sommes à Nantes, sur le campus de l’université : paillotes, canap’ et petit bar sur lequel trône un panier plein de biscuits faits maison par le « cuistot » : « C’est bio et vegan ! ». La Dorade Lab’ s’est installée dans le village de la Stratosphère pendant le festival Turbulences, organisé dans le cadre des journées des arts et de la culture dans l’enseignement supérieur. Juste à coté, Vélo Campus a mis en place un atelier de réparation improvisé pour briquer nos bicyclettes plus ou moins rouillées. Le soleil brille, le ciel est bleu, une petite brise nous soulève les cheveux. Comme un air de printemps, comme un air de changement.
Micro-climat doradien
La Dorade Lab’ c’est une asso née en février 2016, créée par des artistes indépendants et des étudiants en fin de parcours, tous de divers horizons mais avec une seule et même ambition : redonner sens à l’espace public. Soutenus par la Ville de Nantes mais aussi par le Crous et l’Université, ils proposent d’organiser des événements en pleine journée, « en s’éloignant des lieux conventionnels », dans un esprit de solidarité et tout ça gratuitement. Jeanne, l’une des fondatrices de l’association, témoigne : « On est une jeune asso, nous sommes des jeunes porteurs de projets, aucun d’entre nous n’est Nantais mais nous avons tout de suite eu le soutien de la ville. Il y a deux mois, nous avons gagné un prix dans le cadre du concours « Culture-actionS » organisé par le Crous. Nous avons remporté la deuxième place dans la catégorie « actionS » au niveau national, ce qui nous a apporté une certaine visibilité et plus de poids ». Cette volonté de fonder une asso telle que celle-ci, c’était dans le but de « mettre en place des choses qu’on avait envie de faire tous les jours ». Ils sont partis d’un constat simple : les citoyens ne s’approprient pas l’espace public qui leur appartient pourtant comme tout un chacun.
La Dorade Lab', c'est un énorme laboratoire d’initiatives citoyennes
Il y a au total neuf bénévoles permanents et la confiance est d’ordre : « Nous avons un statut collégial. Nous cherchons à mutualiser nos compétences tout en gardant une certaine autonomie, on adopte une vision horizontale dans chaque prise de décision : personne n’impose rien à personne ». Ils poursuivent : « La Dorade Lab’, c’est un énorme laboratoire d’initiatives citoyennes ». Lors des gros événements, il y a une effervescence bouillonnante fédérant l’implication de bénévoles ponctuels qui viennent prêter main forte : « Des potes, de la famille mais aussi de plus en plus de gens que l’on ne connaît pas et qui nous contactent par mail (…) Sans eux, on ne pourrait rien faire ! » confient-ils.
Dorader l’espace public
Ils conçoivent l’espace dans son intégralité, en apportant une scénographie qu’ils ont pensée et construite à l’unisson. Leur crédo ? Un free-shop : des fringues, des bouquins et parfois même des fruits et légumes. Le développement d’un partenariat avec La Ressourcerie, dans une démarche d’échange de bons procédés, sans aucun échange monétaire, s’est imposé comme une évidence : quelques heures de bénévolat contre des vêtements et du mobilier. Pour « la bouffe », ils en récupèrent une partie avec les MIN (Marché d’Intérêt National) et vont faire les fins de marché : « Celui de la Petite-Hollande le samedi matin par exemple » afin d’y récupérer fruits et légumes gratuits : « Quand tu as le statut d’asso, c’est tout de suite plus facile ! Depuis on a créé pas mal de liens avec les producteurs. » Ils concluent alors : La Dorade Lab’, c’est une « plateforme de redistribution autonome ».
On doit envahir l'espace public, dans une logique non-consumériste
L’association s’est aussi engagée sur le terrain culturel : ils proposent une programmation musicale « pointue mais pour tout public » dont ils trouvent l’inspiration auprès « d’artistes nantais et de la région, émergents ou non » et fonctionnent beaucoup selon leurs coups de cœur personnels. A l’avenir, ils aimeraient développer des opérations « coup de poing » afin de partir à la rencontre d’un public plus large : « On doit envahir l’espace public, dans une logique non-consumériste ». Ils font en sorte de travailler avec les « relais sociaux », même s’ils n’aiment « pas utiliser ces termes », leur seule intention et de « décloisonner les publics, tout le monde doit savoir qu’on existe, que ce qu’on fait c’est ouvert à tous ». Dans un futur plus ou moins proche, ils ont pour objectifs de « créer un lieu propre à La Dorade, avoir des locaux », un lieu de référence où l’on pourrait les trouver et où chacun s’y retrouverait ; mais aussi d’organiser un festival, « le plus grand festival solidaire de la région… voire même au niveau national ! » plaisantent-ils.
La Dorade Lab’ c’est donc un peu tout ça, une association qui propose des solutions alternatives, solidaires et populaires. C’est le reflet d’un phénomène sociétal : le besoin, la nécessité de créer des associations pour fédérer des mouvements collectifs. Ils l’assument : « C’est politique (…) il faut arrêter d’attendre que des mesures soient prises : on a décidé d’agir ». Puisque tout est possible…