6 juillet 2020

Élections municipales 2020 à Nantes : dans les coulisses de la salle de presse

Dimanche 28 juin, le second tour des scrutins s’impose sur les écrans de la France entière. Dans les coulisses, les journalistes élaborent les papiers et interviews qui parcourront le pays, dès les résultats connus. Fragil vous fait le récit hors champ de cette veillée électorale à la mairie de Nantes.

Élections municipales 2020 à Nantes : dans les coulisses de la salle de presse

06 Juil 2020

Dimanche 28 juin, le second tour des scrutins s’impose sur les écrans de la France entière. Dans les coulisses, les journalistes élaborent les papiers et interviews qui parcourront le pays, dès les résultats connus. Fragil vous fait le récit hors champ de cette veillée électorale à la mairie de Nantes.

Quelques jours avant les élections, le service relations presse de la Mairie nous transmet les informations d’accès. Il faut se présenter, munies de notre badge ainsi que de nos cartes professionnelles. Nous ne disposons pas de cette dernière, mais en tant que contributrices de Fragil, la dérogation est accordée.

Même pas peur.

Rendez-vous est donné à 18h45 avec Karina, également rédactrice à Fragil, à l’arrêt de bus « Hôtel de Ville ». J’accuse d’ailleurs un léger retard, malgré mon organisation optimale. Mais ça, c’est une autre histoire.

Nous entrons dans la cour Rosmadec, rue de la Commune, qui entoure le splendide Hôtel éponyme. Édifié en 1653, le bâtiment a été restauré en 1923. Pour ma part, comme de nombreux nantais avant moi, j’ai eu la chance d’y célébrer mon mariage. Ici, le temps est suspendu, entre dorures, voutes baroques et influences art-déco.

Après le passage de la sécurité, la présentation de nos pièces d’identité puis l’ascension des majestueux escaliers, nous entrons dans la salle Aristide Briand. Certaines d’arriver dans une pièce comble et animée, nous sommes surprises de voir la grande galerie quasiment vide, alors peuplée de deux journalistes très concentrés.

Il n’est que 19h, certes, mais cela nous étonne.

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Il est encore tôt...

Laure deroualle

Drôles d’élections

L’un des journalistes présents nous explique que cette soirée électorale n’est en nulle autre pareille. Les mesures sanitaires impactent ce temps fort, comme partout en France. De plus, nous détaille-t-il, les équipes arriveront plus tard.

Bien.

Nous comprenons qu’habituellement la vie palpite dans cette salle et dans les QG des candidats. Cette année, compte tenu des mesures sanitaires relatives à la Covid, les rassemblements sont particulièrement cadrés. Pas de tente média à l’extérieur donc, ni de pot pour les assesseurs (c’est bien notre veine).

Dans la salle, les visages sont masqués. L’autorisation nous sera assez vite donnée de quitter nos masques, excepté lors des déplacements dans la salle. Assises à notre table, nous regardons l’heure. Il est 19 h 30, l’ambiance demeure studieuse et seul le cliquetis des claviers résonne. Nous n’osons pas interroger les autres journalistes nouvellement installés, qui semblent trop affairés pour une petite discussion à la cool.

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20 h : Le Figaro, France Bleu, Le Télégramme, Ouest-France, Prun et LCI attendent les résultats.

Laure Deroualle

Les candidates ont quitté leur QG de campagne le 22 Mars, date du second tour initial. Les équipes n’ayant pas prolongé le bail jusqu’à aujourd’hui, nous explique l’un des journalistes, il n’y aura pas d’interviews ni de prise de parole depuis les bureaux de campagnes. Il nous indique que  Laurence Garnier, candidate LR, prendra la parole depuis un café nantais.

LCI en musique de fond

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Les premiers résultats tombent

Laure Deroualle

Karina et moi prenons le parti d’observer la salle et l’organisation de ces temps journalistiques forts. Pour débuter, trois téléviseurs accrochés au mur diffusent des informations en continu. Choix est fait de retransmettre LCI, France 3 Pays de la Loire ainsi qu’un rapport régulier du taux de participation. D’abord coupé, le son sera enclenché 10 minutes avant 20 h. Nous nous interrogeons un moment sur la désignation de la chaîne, notamment celle de LCI (BFM ou CNEWS ne feraient-ils pas suffisamment bien le job ? Un indice chez vous).

Pour le moment, sept journalistes sont présents. Les micros, appareils photo et caméras sont posés sur la table.

Une partie du service Presse de la Mairie de Nantes arrive dans notre salle avant 20 h et salue chacun des correspondants.

Nous assistons à une soirée électorale particulière. Parfois, nous dit-on, les têtes de liste organisent leur venue, accompagnées d’une dizaine de membres de leur équipe, afin de rencontrer les journalistes. Johanna Rolland interviendra probablement dans la soirée, mais rien n’est certain pour le moment.

Du beau monde

Il est 20 h, la chaîne LCI annonce la victoire d’Édouard Philippe, Premier Ministre, à la Mairie du Havre.

Une flopée de journalistes entre dans la salle.

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Un micro en plein échauffement

Laure Deroualle

Les rédactions de LCI, Le Télégramme, le Figaro, France Bleu, Presse Océan, Prun’ et autres Ouest France débutent leur travail de transmission. Nous observons les journalistes de LCI attendre patiemment que les évènements s’accélèrent, micro à l’effigie de TF1 posé sur la table. Elles se préparent à prendre l’antenne.

Chez Prun, France Bleu, il semble que les journalistes communiquent en direct sur les réseaux sociaux. Certains photographes immortalisent l’écran des premiers résultats, on écrit, beaucoup.

Peu avant 21 h, un mouvement se fait sentir. Les journalistes s’approchent du moniteur. Johanna Rolland est élue avec près de 60 % des voix. C’est écrasant. Autant que le taux d’abstention, que l’on commente un peu, mollement. Ces journalistes politiques en ont vu d’autres, voyez-vous.

Quelques échanges brefs précèdent un retour illico à son ordinateur pour communiquer l’information en direct.

Un peu après 22h, Télé Nantes diffuse l’intervention de Johanna Rolland ainsi que de Julie Laernos, (numéro trois de la liste « Nantes en confiance »), depuis une autre salle de l’Hôtel de ville.

C’est dans cette ambiance marquée du sceau de la distanciation sociale, que côté presse, la soirée électorale s’est achevée plus tard dans la soirée.

Photo de tête : ©Blu Nantes / Facebook

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Lectrice assidue et rêveuse absolue, Laure a trouvé en Fragil un nouveau territoire de liberté et d'ouverture au(x) monde(s). Mordue de littérature et d'histoires de vie, elle tient un blog littéraire et suit de près l’actualité culturelle ligérienne.

L'édito

Touche pas à mon info !

L’investigation vit-elle ses derniers mois sur l’audiovisuel public en France ? Contraints par une réduction budgétaire de 50 millions d’euros en 2018 par rapport au contrat d’objectifs et de moyens conclu avec l’ancien gouvernement, les magazines « Envoyé Spécial » et « Complément d’enquête » verront leurs effectifs drastiquement diminués et une réduction du temps de diffusion au point de ne plus pouvoir assurer correctement leur mission d’information. Depuis l’annonce, les soutiens s’accumulent, notamment sur Twitter avec le hashtag #Touchepasàmoninfo, pour tenter de peser sur les décisions de Delphine Ernotte, présidente de France Télévisions, déjà visée par une motion de défiance. L’association Fragil, défenseur d’une information indépendante et sociétale, se joint à ce mouvement de soutien.

Après la directive adoptée par le Parlement européen portant sur le secret des affaires en avril 2016, il s’agit d’un nouveau coup porté à l’investigation journalistique en France. Scandales de la dépakine, du levothyrox, du coton ouzbek (pour ne citer qu’eux), reportages en France ou à l’étranger sur des théâtres de guerre, à la découverte de cultures et de civilisations sont autant de sujets considérés d’utilité publique. Cela prend du temps et cela coûte évidemment de l’argent. Mais il s’agit bien d’éveiller les consciences, de susciter l’interrogation, l’émerveillement, l’étonnement ou l’indignation. Sortir des carcans d’une société de consommation en portant la contradiction, faire la lumière sur des pratiques, des actes que des citoyens pensaient impensables mais bien réels. Telle est « la première priorité du service public », comme le considère Yannick Letranchant, directeur de l’information.

En conclusion, nous ne pouvions passer à côté d’une citation d’Albert Londres ô combien au goût du jour, prix éponyme que des journalistes d' »Envoyé Spécial » ont déjà remporté : « Je demeure convaincu qu’un journaliste n’est pas un enfant de chœur et que son rôle ne consiste pas à précéder les processions, la main plongée dans une corbeille de pétales de roses. Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort, il est de porter la plume dans la plaie. »


Valentin Gaborieau – Décembre 2017