4 décembre 2025

Nao’Hed : « Supporter le foot féminin au niveau local »

Depuis un an, l’association Nao’Hed rassemble quelques dizaines de supporter·ices de l’équipe féminine du FC Nantes. Par leurs chants, leur présence en tribunes et leurs actions locales, le collectif défend un football bienveillant et ouvert à toutes et tous.

Nao’Hed : « Supporter le foot féminin au niveau local »

04 Déc 2025

Depuis un an, l’association Nao’Hed rassemble quelques dizaines de supporter·ices de l’équipe féminine du FC Nantes. Par leurs chants, leur présence en tribunes et leurs actions locales, le collectif défend un football bienveillant et ouvert à toutes et tous.

“On s’est réunis en se disant que c’était bizarre, qu’il n’y avait pas de groupe de supporter·rice·s du FCN féminin ou en tout cas bien établi·e·s et là tout le temps.” – Lucas de Debruyne, président de l’association Nao’Hed et étudiant en informatique. Cette association de supporter·rice du FCN féminin s’est créée lors du match Nantes – PSG à la Beaujoire en octobre 2024, par un cercle d’ami·e·s passionné·e·s. Inspiré·e·s par l’ambiance et l’élan autour de l’équipe première, le groupe a voulu structurer un soutien durable et inclusif.

Rompre avec le milieu masculin

Seul groupe de supporter·rice de l’équipe féminine reconnu par le FCN, Nao’Hed n’entretient aucun lien avec l’équipe masculine de Ligue 1. Au delà de l’engagement et des donations bénévoles, les premiers soutiens restent le staff du club et les joueuses : “On se sent bien encadré·e·s et en sécurité, on a beaucoup de liens avec certain·e·s responsables du club et le SLO (référent·e supporter).” Bruce Peronneaud, illustrateur et membre de l’association depuis cette année, évoque un éloignement assumé : “J’ai eu un gros ras-le-bol du foot masculin, je le regarde quasiment plus. En tant qu’ancien éducateur et dirigeant, ayant travaillé avec la FFF, le milieu masculin m’a vite démontré une ambiance et un cadre du supporter lourd, malsain ou toxique.” Lucas continue : “Je ne m’y retrouve plus personnellement, comme avec le groupe Brigade Loire ou Activ Nantes, en termes d’idées et de la manière je veux porter avec nuance ma passion pour ce sport.”

 

Bruce Peronneaud et Lucas de Debruyne posant avec le merch de l’association devant le stade Marcel-Saupin (accueillant aujourd’hui l’équipe féminine du FC Nantes ainsi que la réserve masculine et les catégories jeunes U17 et U19). 03/11/25 ©JosuéTexier

L’association se montre assidue, toujours présente pour encourager les joueuses, à domicile comme à l’extérieur. Cette fidélité donne lieu à une atmosphère évoquée comme plus bienveillante et familiale pendant les jours de match, souvent en milieu de semaine : “Par exemple, on accueille les supporter·rice·s adverses à la fin des matchs, les joueuses sont faciles à aborder et encouragées dans la suite de leurs saisons.” Bruce continue et précise son attachement ancien : “Depuis petit, le foot féminin a toujours été à mes côtés. Une culture du football d’abord à l’italienne qui se transmet dans la famille. Dans ce pays, le foot féminin est assez important et fort représenté chez les femmes. Chose qui pour moi est moins visible en France dont à Nantes.”

Faire exister la tribune féminine

Nao’Hed essaie, à son échelle, de communiquer le plus possible sur les réseaux sociaux ou en tractant dans la rue. Lucas et Bruce ressentent une évolution et même un déclic : “Il y a 1 an, pendant un match face au Paris FC, le stade Marcel Saupin étant plein, soit 1800 supporter·rice·s. Pourtant pas un bruit, rien devant ce match important… Aujourd’hui nous avons des chants personnels et une ambiance forte.” Pour Nao’Hed, il est également essentiel de garder les habitudes des supporter·rice·s actuel·le·s, qui ont parfois besoin de moments de calme. Transmettre cette ferveur, c’est aussi respecter et s’adapter à son public.

 

Des supporter·rice·s de Nao’Hed durant le match contre le Paris FC à La Beaujoire, gagné 3-1. 03/10/25 ©Naonedmerched

Malgré une composition majoritairement masculine chez Nao’Hed, Lucas se veut optimiste : “Je pense que tout le monde doit être invité·e, les femmes ont le droit de supporter l’équipe masculine et les hommes ont le droit de supporter l’équipe féminine.” Bruce complète : “Je ne m’étais même pas posé la question, je vais voir du foot et c’est le plus important. L’idée en s’inscrivant dans l’association est de développer le foot féminin au niveau local, avec l’équipe B ou les jeunes. C’est donner l’accès à tout ce que j’ai pu avoir en tant que garçon ou en allant voir les hommes.” Bruce, qui prend des photos en match, remarque aussi : “Plus il y aura d’adhérent·e·s, plus notre parole sera entendue, que c’est un endroit safe et qu’on est là avant tout pour s’amuser.”

Un rêve commun pour la suite

Nao’Hed continue ses campagnes d’adhésion, avec un conseil d’administration où le fonctionnement reste pour l’instant basé sur la logistique et l’encadrement, par exemple sur les déplacements à l’extérieur. Le dialogue dans la quarantaine de bénévoles demeure un élément essentiel pour elleux, en étant le plus transparent·e·s et bienveillant·e·s au sein de leur approche.

Prochain rendez-vous à domicile, le 14 décembre à La Beaujoire. L’équipe première du FCN féminin, qui évolue dans le haut du tableau en Arkema Première Ligue (D1) fera face à l’Olympique de Marseille. Avec un souhait pour Bruce et Lucas : “Celui d’avoir à la fin un stade qui se réunit pour chanter, fédérer pendant 90 minutes notre attache pour l’équipe, en espérant les voir faire la une des journaux.”

Josué grandit entre La Roche-sur-Yon et Rennes. Amateur d’arts, il se reconnaît surtout dans la musique et la littérature. Diplômé d’une licence en information et communication, il s’engage pendant ses études dans le journalisme, écrivant pour divers médias bretons. Aujourd’hui impliqué au sein de Fragil, il explore avec un regard neuf les récits sociaux et culturels de Nantes. Car, s'il n’y a pas de hasard, notre journaliste se tient prêt à ne manquer aucun rendez‑vous.

L'édito

Touche pas à mon info !

L’investigation vit-elle ses derniers mois sur l’audiovisuel public en France ? Contraints par une réduction budgétaire de 50 millions d’euros en 2018 par rapport au contrat d’objectifs et de moyens conclu avec l’ancien gouvernement, les magazines « Envoyé Spécial » et « Complément d’enquête » verront leurs effectifs drastiquement diminués et une réduction du temps de diffusion au point de ne plus pouvoir assurer correctement leur mission d’information. Depuis l’annonce, les soutiens s’accumulent, notamment sur Twitter avec le hashtag #Touchepasàmoninfo, pour tenter de peser sur les décisions de Delphine Ernotte, présidente de France Télévisions, déjà visée par une motion de défiance. L’association Fragil, défenseur d’une information indépendante et sociétale, se joint à ce mouvement de soutien.

Après la directive adoptée par le Parlement européen portant sur le secret des affaires en avril 2016, il s’agit d’un nouveau coup porté à l’investigation journalistique en France. Scandales de la dépakine, du levothyrox, du coton ouzbek (pour ne citer qu’eux), reportages en France ou à l’étranger sur des théâtres de guerre, à la découverte de cultures et de civilisations sont autant de sujets considérés d’utilité publique. Cela prend du temps et cela coûte évidemment de l’argent. Mais il s’agit bien d’éveiller les consciences, de susciter l’interrogation, l’émerveillement, l’étonnement ou l’indignation. Sortir des carcans d’une société de consommation en portant la contradiction, faire la lumière sur des pratiques, des actes que des citoyens pensaient impensables mais bien réels. Telle est « la première priorité du service public », comme le considère Yannick Letranchant, directeur de l’information.

En conclusion, nous ne pouvions passer à côté d’une citation d’Albert Londres ô combien au goût du jour, prix éponyme que des journalistes d' »Envoyé Spécial » ont déjà remporté : « Je demeure convaincu qu’un journaliste n’est pas un enfant de chœur et que son rôle ne consiste pas à précéder les processions, la main plongée dans une corbeille de pétales de roses. Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort, il est de porter la plume dans la plaie. »


Valentin Gaborieau – Décembre 2017