6 avril 2022

Visa : la riposte syndicale à la montée de l’extrême-droite

Le 15 mars à Nantes, Visa organisait une formation de 2 jours pour ses militants. Objectif : leur donner des outils pour déconstruire les propositions des deux candidats de l’extrême-droite à l’élection présidentielle : Marine Le Pen et Eric Zemmour. Gros plan sur VISA, une association intersyndicale créée en 1996 qui a déjà effectué 170 stages dans une soixantaine de départements en France.

Visa : la riposte syndicale à la montée de l’extrême-droite

06 Avr 2022

Le 15 mars à Nantes, Visa organisait une formation de 2 jours pour ses militants. Objectif : leur donner des outils pour déconstruire les propositions des deux candidats de l’extrême-droite à l’élection présidentielle : Marine Le Pen et Eric Zemmour. Gros plan sur VISA, une association intersyndicale créée en 1996 qui a déjà effectué 170 stages dans une soixantaine de départements en France.

Dénoncer les «pseudo-solutions» du Front National devenu Rassemblement National, démasquer les militants d’extrême droite qui s’infiltrent dans les syndicats et ceux qui occupent des fonctions de Directeur des Ressources Humaines, analyser les mesures antisociales mises en place dans les mairies tenues par le RN comme Béziers, Fréjus, Villers-Cotterêts ou Hayange, telles sont les méthodes utilisées par VISA, un sigle qui signifie Vigilance Initiatives Syndicales Antifascistes et qui regroupe 120 syndicats dont Solidaire, le FSU, des fédérations de la CGT et de la CFDT, le SNJ et le Syndicat de la Magistrature.

Connaître son ennemi pour le combattre

«Pour combattre son ennemi, il faut bien le connaître» affirme Sébastien, l’un des 10 formateurs de VISA. Nous ne donnerons pas son nom car lui et sa famille ont été menacés de mort à cause de son activité militante d’éveil des consciences.
Pour montrer le danger que représente l’extrême-droite au pouvoir, la première journée de formation s’appuie sur des faits historiques et commence par un documentaire produit par l’ISH, l’institut d’Histoire Sociale de la CGT, qui s’intitule Aujourd’hui comme hier, combattre l’extrême droite !

L’idéologie anti-ouvrière du fascisme

Ce documentaire rappelle que les syndicats ouvriers ont été la cible de l’extrême droite depuis leur création en 1895 et que les fascistes ont été les alliés du patronat pour affaiblir les revendications ouvrières en créant le syndicalisme jaune en 1899, des syndicats corporatistes comme le SPF en 1936 ou des syndicats indépendants comme le CFT dans l’industrie automobile dans les années 1960-1970.
Pour VISA, étudier l’histoire croisée du syndicalisme et du fascisme permet donc de mieux combattre l’idéologie anti-ouvrière et anti-démocratique des partis et des groupuscules d’extrême-droite en France.

Les invariants de l’extrême-droite : nationalisme, racisme, autoritarisme

«Quand on regarde la propagande du FN depuis 50 ans» explique celui que nous nous contenterons d’appeler Sébastien, «il y a des invariants : le nationalisme, le racisme et l’autoritarisme. Tout le contraire de ce que nous défendons. Nous sommes contre les discriminations et nous défendons les droits de travailleurs».

L’autre méthode utilisée par VISA pour percer le vrai visage de l’extrême droite d’aujourd’hui consiste à décrypter les visuels de campagne et à analyser les programmes du FN, du RN et de Zemmour. Pour cette association, la Marine Le Pen qui se présente sur son affiche de campagne avec un fond bleu aigue-marine incarnant la douceur est «une supercherie de communication», un « maquillage d’une campagne brune». Il s’agit, selon elle, d’une stratégie destinée à faire oublier les origines fascistes du FN symbolisée par la flamme tricolore qui existait sur les affiches de son père et qui étaient inspirée par la flamme des fascistes italiens. Pour VISA, le FN devenu RN n’est pas un parti comme les autres et il ne faut pas le banaliser comme le font de nombreux médias.

Le programme de Marine Le Pen passé à la loupe par VISA

L’immigration, bouc émissaire

«Le FN adapte en permanence son discours à la situation. Il s’appuie sur sa base électorale constituée de petits patrons, d’artisans et d’agriculteurs qui ne veulent surtout pas de syndicats chez eux» estime Sébastien et il poursuit : «Pour eux, l’immigration est la source de tous les problèmes sociaux. Elle est responsable du chômage, de la fraude, de l’insécurité. Tout cela est faux. Ce n’est pas la fraude sociale qui plombe le budget de l’Etat mais l’évasion fiscale des grandes fortunes et des multinationales ».

Pour VISA, toutes réponses du FN à la crise sociale sont des «pseudo-solutions» qui ne visent qu’à diviser le monde des travailleurs et à le détourner des combats pour une meilleure répartition des richesses.

« S’armer contre l’extrême-droite », l’outil de formation de VISA

État fort ou protection sociale

«Quand le FN réclame un État fort et protecteur, il veut plus de police, plus de prison, plus d’armée, moins de fonctionnaire» indique Sébastien. «Nous, nous voulons plus de service public, plus d’hôpital, plus de justice sociale».

Dans sa formation antifasciste, VISA dénonce également les théories du complot qui cherchent à trouver des boucs émissaires et à «instrumentaliser les problèmes sociaux à leur profit». «Le fascisme se nourrit de mensonges, de falsifications, de manipulations. Sa haine est un danger mortel pour les libertés et la démocratie». C’est l’une des conclusions du livret qui sert de base à cette formation intitulé «S’armer contre l’extrême-droite»

Un site actif sur internet

VISA ne se contente pas de former ses adhérents à la lutte antifasciste. L’association militante organise des débats, des journées de réflexion, des manifestations et gère un site actualisé avec des fiches bibliographiques, des communiqués, une newsletter. Bref, elle exerce une vigilance active.

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Quand on a été journaliste pendant plus de 30 ans à France 3, que l'on s'est enrichi de belles rencontres et de découvertes, on a envie de continuer à partager sa curiosité et son ouverture d'esprit avec d'autres. En travaillant bénévolement à Fragil, on peut continuer à se cultiver en toute liberté. Ca donne du sens à un retraité devenu journaliste honoraire.

L'édito

Touche pas à mon info !

L’investigation vit-elle ses derniers mois sur l’audiovisuel public en France ? Contraints par une réduction budgétaire de 50 millions d’euros en 2018 par rapport au contrat d’objectifs et de moyens conclu avec l’ancien gouvernement, les magazines « Envoyé Spécial » et « Complément d’enquête » verront leurs effectifs drastiquement diminués et une réduction du temps de diffusion au point de ne plus pouvoir assurer correctement leur mission d’information. Depuis l’annonce, les soutiens s’accumulent, notamment sur Twitter avec le hashtag #Touchepasàmoninfo, pour tenter de peser sur les décisions de Delphine Ernotte, présidente de France Télévisions, déjà visée par une motion de défiance. L’association Fragil, défenseur d’une information indépendante et sociétale, se joint à ce mouvement de soutien.

Après la directive adoptée par le Parlement européen portant sur le secret des affaires en avril 2016, il s’agit d’un nouveau coup porté à l’investigation journalistique en France. Scandales de la dépakine, du levothyrox, du coton ouzbek (pour ne citer qu’eux), reportages en France ou à l’étranger sur des théâtres de guerre, à la découverte de cultures et de civilisations sont autant de sujets considérés d’utilité publique. Cela prend du temps et cela coûte évidemment de l’argent. Mais il s’agit bien d’éveiller les consciences, de susciter l’interrogation, l’émerveillement, l’étonnement ou l’indignation. Sortir des carcans d’une société de consommation en portant la contradiction, faire la lumière sur des pratiques, des actes que des citoyens pensaient impensables mais bien réels. Telle est « la première priorité du service public », comme le considère Yannick Letranchant, directeur de l’information.

En conclusion, nous ne pouvions passer à côté d’une citation d’Albert Londres ô combien au goût du jour, prix éponyme que des journalistes d' »Envoyé Spécial » ont déjà remporté : « Je demeure convaincu qu’un journaliste n’est pas un enfant de chœur et que son rôle ne consiste pas à précéder les processions, la main plongée dans une corbeille de pétales de roses. Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort, il est de porter la plume dans la plaie. »


Valentin Gaborieau – Décembre 2017