Djamila est arrivée en France depuis Djibouti il y a vingt ans. En octobre dernier, elle est l’une des premières à participer au projet culinaire de Singa aux Wattignies en tant que cheffe cuisinière. Elle est accompagnée par Coralie, qu’elle surnomme « coach » et qui est à la tête de l’initiative. « On ne fait pas que cuisiner, on va au contact des clients, on explique les parcours migratoires qui sont tous uniques et les barrières tombent », nous dit Coralie. Pour la cheffe, « participer à l’économie, montrer que l’on est motivé à travailler, que l’on paie l’Urssaf, que l’on propose ce qu’on sait faire » permet d’éloigner l’idée que l’immigration est une charge pour les Français.
Pour Djamila, c’est une aventure militante pour « le droit des femmes à entreprendre et réussir ». Pour Coralie, « rendre accessible les conseils à une partie de la population qui n’y a pas accès » est aussi une preuve d’engagement. Cet accompagnement permet de « montrer qu’il y a d’autres voies que le salariat », nous explique t-elle. Djamila est rassurée d’être aidée face à ce qu’impose le droit français ou pour établir les menus et leurs prix.
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Le but affiché de Djamila : avoir son propre établissement, ouvert « matin, midi, soir ». Pour l’instant, cuisiner au sein du projet de Singa quelques soirs dans la semaine ne lui permet pas de quitter son travail, mais lui donne de l’espoir. « J’ai un réseau maintenant, des nouveaux liens. Cela me donne de la motivation pour foncer ! ». Elle explique que « cuisiner pour la maire, ou des délégués » de la ville de Nantes lui a donné confiance. « On est nantais ! », se réjouit-elle.
Un militantisme aussi dans l’assiette
« Il doit y avoir une alternative végétarienne, c’est obligatoire », dévoile Coralie. D’autres franges de leurs militantisme se retrouvent aussi dans la nourriture qu’elles proposent. « On favorise le circuit court et tout est fait maison ». La qualité des produits est un sujet qu’elles estiment « important pour les Français ». Des partenariats avec des producteurs bio locaux sont en cours de discussion, mais les trop petites quantités demandées par les cuisinier·es, qui offrent des planches et du snacking quelques soirs dans la semaine, ne permettent pas d’assurer l’achat de ces produits à des prix avantageux.
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« Il faut que les prix soient accessibles, notre planche la plus chère est à onze euros », explique Coralie. Offrir des prix bas afin d’attirer une large clientèle. Isabelle, gérante de la boutique Singa nantaise nous explique que leur plus grand objectif est de « sensibiliser tout type de public » à l’accueil des nouveaux·elles arrivant·es. Les habitué·es du tiers-lieu sont souvent « déjà sensibles à ces questions ».
La cuisine de Singa propose via quatre chef·fes de partager des recettes ukrainiennes, djiboutiennes, vénézuéliennes et afghanes. L’initiative était supposée durer six mois, mais elle « sera sûrement prolongée », assure Isabelle.