29 octobre 2024

Risques de licenciements et d’annulation de projets : les radios associatives nantaises menacées par le PLF 2025

Comportant une baisse du FSER (Fonds de Soutien à l’Expression Radiophonique), l'annonce du budget 2025 du gouvernement Barnier a entrainé craintes, questionnement et mobilisations des acteurices du monde de la radio associative. Et si aujourd'hui l'adoption d'un amendement vise à préserver le montant initial alloué au FSER, le risque n'est toujours pas écarté.

Risques de licenciements et d’annulation de projets : les radios associatives nantaises menacées par le PLF 2025

29 Oct 2024

Comportant une baisse du FSER (Fonds de Soutien à l’Expression Radiophonique), l'annonce du budget 2025 du gouvernement Barnier a entrainé craintes, questionnement et mobilisations des acteurices du monde de la radio associative. Et si aujourd'hui l'adoption d'un amendement vise à préserver le montant initial alloué au FSER, le risque n'est toujours pas écarté.

« Avec l’examen du projet de loi de finances à l’assemblée nationale », Valentin Beauvallet, Président de la FRAP (Fédération des Radios Associatives des Pays de Loire), explique être dans un « timing très très serré » pour alerter les parlementaires sur l’importance du FSER (Fonds de Soutien à l’Expression Radiophonique). Et pour cause, cet ensemble de dotations est fortement mis à mal dans l’annonce du budget 2025 du gouvernement Barnier. En effet, celui-ci est sous la menace d’une coupe drastique de plus de 10 millions d’euros, qui ferait passer l’enveloppe annuelle d’aide aux radios associatives de 35 à 24 millions d’euros. En relayant le communiqué du 11 octobre « PLF 2025 : Qui veut la mort des radios associatives ?« , la FRAP a continué d’assurer sa mission de représentation politique et institutionnel de ces radios mais craint pour leurs « adhérents touchés dans leur fonctionnement », si cette baisse de dotations s’avèrent effective.

Des emplois et de la culture en moins

Pour les radios associatives nantaises, premières concernées, une baisse du FSER à venir serait bel et bien néfaste. Alexandra Jore, coordinatrice de rédaction et journaliste à Jet FM, radio associative pour qui le FSER constitue environ 20% du budget annuel, nous a fait part de ses craintes : « si on retranche un tiers de la somme du FSER, c’est un poste en moins […] sans compter sur la baisse des dotations du département, de la Région et de Nantes et Saint-Herblain qui devraient être impactées par ce nouveau plan de financement […] on craint très concrètement qu’un ou deux emplois sautent ». Une accumulation, qui comme le pointe la journaliste, entrainerait « des actions et de la culture en moins » sur le territoire. Toujours pour la coordinatrice de rédaction de cette radio associative présente depuis 1986 dans la métropole nantaise, un projet de « programmation événementielle autour de la création sonore avec des séances d’écoute mensuelles dans des lieux partenaires de la ville », pourrait être en ce sens avorté.

Craintes partagées chez leurs homologues d’Euradio et de SUN. Pour ces radios qui partagent le même palier dans le centre ville de Nantes, une baisse de 30% du FSER viendrait aussi impacter leur activité quotidienne de production et de diffusion d’information en lien avec leur mission de communication sociale de proximité. Une menace perçue autant à Sun où le FSER représente un « colossal » 39% du budget annuel selon sa directrice adjointe Eva Jarnot, qu’à Euradio où même si le FSER correspond à un quart du budget annuel, la directrice adjointe Hélène Lévêque redoute « une perte de salariés ».

Un projet qui révolte

 « On flèche sur nous 90% des efforts attendus alors qu’on est que 4% de l’enveloppe budgétaire globale dédiée », dénonce Alexandra Jore. En effet sur les 12 millions d’euros d’économies demandées à la Mission Médias, Livre et Industries Culturelles, 10,4 millions d’euros seront entièrement supportés par les radios locales associatives.

Valentin Beauvallet, directeur de la FRAP

Pour le directeur de la FRAP, le gouvernement « s’attaque clairement aux projets des radios associatives ». À l’image de ses dires, l’incompréhension règne : « On essaie de comprendre pourquoi une telle baisse […] Derrière cette rigueur budgétaire, il y a un choix politique qui n’est pas expliqué pour l’instant. »

Aussi membre du conseil national du Syndicat National des Radio Libre (SNRL), la directrice adjointe de SUN explique, avec ses confrères et consœurs syndiqué.es être en ce moment « sur tous les ponts » pour lutter contre la baisse de ces fonds, « indissociables » des radios associatives. Dans cette optique, son syndicat et la CRNA (Confédération Nationale des Radios Associatives) réuni·es sous la bannière « Les Locales » ont été reçu·es par la ministre de la culture vendredi 18 octobre. Un entretien n’ayant donné lieu à aucun engagement concret mais dans lequel Rachida Dati s’est montrée sensible au sort de ces radios.

Du sursis pour ces radios pas encore condamnées

Heureusement pour ces radios, un amendement pour le rétablissement du budget alloué au FSER a été adopté en commission des affaires culturelles mercredi 23 octobre. Malgré tout, Sylvain Delfau, vice président du SNRL, nous fait comprendre que le combat n’est pas fini : « On continuera à faire pression sur les parlementaires pour que l’amendement soit bien gardé dans le projet de loi de finances. »

De plus, comme évoqué à l’antenne de Prun’ avec la chronique du lundi 21 octobre « Vivre l’espoir fait » dans la (presque) quotidienne émission Curiocités, la menace de l’utilisation du 49.3 plane au dessus de ces radios. A ce propos, Sylvain Delfau, aussi directeur de Radio Laser, dans l’Ille-et-Vilaine, nous fait part de son appréhension :« l’année dernière déjà, c’était complexe avec un PLF (Projet de Loi de Finances) qui a été voté par pas mal de 49.3 […] et cette année ça risque d’être pareil ». Avec cette probabilité, Sylvain Delfau et toustes les acteurices du monde des radios associatives ne peuvent qu’« espérer », que l’amendement soit « adopté dans le texte final », si 49.3.

Numa, originaire de Rezé, entretient un lien indéfectible avec Nantes, sa ville natale. Amateur de sport, il vibre au rythme du FC Nantes à la Beaujoire. Sa passion pour la culture se nourrit grâce aux manifestations culturelles nantaises tel que, le Festival des Utopiales. Nantes est pour lui une source inépuisable d'inspiration et de découvertes.

L'édito

Touche pas à mon info !

L’investigation vit-elle ses derniers mois sur l’audiovisuel public en France ? Contraints par une réduction budgétaire de 50 millions d’euros en 2018 par rapport au contrat d’objectifs et de moyens conclu avec l’ancien gouvernement, les magazines « Envoyé Spécial » et « Complément d’enquête » verront leurs effectifs drastiquement diminués et une réduction du temps de diffusion au point de ne plus pouvoir assurer correctement leur mission d’information. Depuis l’annonce, les soutiens s’accumulent, notamment sur Twitter avec le hashtag #Touchepasàmoninfo, pour tenter de peser sur les décisions de Delphine Ernotte, présidente de France Télévisions, déjà visée par une motion de défiance. L’association Fragil, défenseur d’une information indépendante et sociétale, se joint à ce mouvement de soutien.

Après la directive adoptée par le Parlement européen portant sur le secret des affaires en avril 2016, il s’agit d’un nouveau coup porté à l’investigation journalistique en France. Scandales de la dépakine, du levothyrox, du coton ouzbek (pour ne citer qu’eux), reportages en France ou à l’étranger sur des théâtres de guerre, à la découverte de cultures et de civilisations sont autant de sujets considérés d’utilité publique. Cela prend du temps et cela coûte évidemment de l’argent. Mais il s’agit bien d’éveiller les consciences, de susciter l’interrogation, l’émerveillement, l’étonnement ou l’indignation. Sortir des carcans d’une société de consommation en portant la contradiction, faire la lumière sur des pratiques, des actes que des citoyens pensaient impensables mais bien réels. Telle est « la première priorité du service public », comme le considère Yannick Letranchant, directeur de l’information.

En conclusion, nous ne pouvions passer à côté d’une citation d’Albert Londres ô combien au goût du jour, prix éponyme que des journalistes d' »Envoyé Spécial » ont déjà remporté : « Je demeure convaincu qu’un journaliste n’est pas un enfant de chœur et que son rôle ne consiste pas à précéder les processions, la main plongée dans une corbeille de pétales de roses. Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort, il est de porter la plume dans la plaie. »


Valentin Gaborieau – Décembre 2017