5 novembre 2018

Réso Chapo : L’altruisme, ça ne mange pas de pain

Rencontre avec Meriem du Réso Chapo qui vient en aide aux sans abris, aux travailleurs pauvres, aux accidentés de la vie... Entretien.

Réso Chapo : L’altruisme, ça ne mange pas de pain

05 Nov 2018

Rencontre avec Meriem du Réso Chapo qui vient en aide aux sans abris, aux travailleurs pauvres, aux accidentés de la vie... Entretien.

L’histoire commence un dimanche de janvier 2017 à Talensac : Nantes est en alerte météo grand froid. Meriem, animée d’une énergie philanthropique, et que la misère écoeure, fédère quelques bonnes âmes pour servir une soupe populaire. Elle relaye ensuite sur les réseaux sa volonté d’agir contre la précarité locale. Son élan de solidarité fait boule de neige et bientôt un collectif d’artistes, de professionnels du social et autres particuliers bénévoles engagés organisent chez de généreux partenaires restaurateurs des rencontres solidaires régulières, ouvertes à tous. Venir en aide, le temps d’une demi-journée, à une centaine de sans abris, travailleurs pauvres, accidentés de la vie est le maître mot… Chapeau bas à Réso Chapo !

Le dimanche 28 octobre dernier, à la maison de quartier de l’Île de Nantes, Réso Chapo distribuait des repas gratuits, préparés cette fois par les bénévoles eux-mêmes et le chef Bruno Grué, et le public convié a pu assister à une série de concerts, représentations, rencontres, ateliers, qui, par cet après-midi où le froid venait de tomber, aura réchauffé les cœurs. Et les portraits chargés d’humanité du photographe Patrice Molle en témoignent.

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Meriem Coillier Assouni, à l’origine de l’initiative, explique la démarche :

Fragil : Pourquoi Réso Chapo ?
Meriem : Le collectif est né d’un constat : même s’il existe déjà de nombreux acteurs qui tentent de remédier à la grande pauvreté, ça ne suffit pas. On avait envie de créer des ponts à l’attention de ceux qui dorment parfois dessous. Et puis, on ne voulait pas faire la charité mais juste permettre aux personnes concernées, les gens de la rue, de passer un bon moment, en toute simplicité. Créer du lien social et redonner de la dignité à travers le partage d’un repas, le partage artistique et culturel et l’échange convivial sont nos objectifs. Le chapeau symbolise à la fois la générosité (le réceptacle du produit de la manche) et la dimension artistique qui nous tient à cœur.

Fragil : Réso Chapo, c’est qui ?
Meriem : Le collectif comprend une quinzaine de bénévoles dont un rappeur nantais Nash2O, un luthiste Samir Aouad, un prestidigitateur Stéphane Magistick, la peintre Vérève, une coiffeuse qui intervient gratuitement Mélanie Strippe, mais obtient également l’appui logistique d’Emmaüs 44, du CCAS, du restaurant social Pierre Landais, de plusieurs restaurants nantais comme le restaurant marocain le Palais Bahia ou le restaurant-bateau O’Deck, et la contribution de pharmaciens, boulangers, bouchers et une multitude de particuliers bénévoles. Toutes les bonnes volontés sont d’ailleurs les bienvenues car nous sommes en recherche constante de nouveaux partenaires.

Fragil : Quel est le prochain rendez-vous?
Meriem : Nous compterons deux ans d’action début 2019 avec une nouvelle distribution de repas et kits d’hygiène, entre autres. Nous espérons continuer à fédérer un maximum de partenaires généreux pour continuer de partager et d’échanger avec ceux qui en ont le plus besoin. Heureusement, des collectifs et des associations entretiennent la flamme et provoquent des sourires le temps d’une journée.
C’est bien les relations humaines, au cœur de l’engagement de Réso Chapo, le moteur le plus important pour transgresser les barrières sociales et créer du lien.

www.facebook.com/resochapo

Journaliste/correctrice/traductrice/blogueuse/heureuse maman, je redécouvre Nantes à travers le regard de mon fils né en Afrique, après avoir passé 3 ans à Londres à officier sur des fashion websites, puis 9 ans à Casablanca à œuvrer dans la presse généraliste aux rubriques mode, tendances, culture, lifestyle... Je me suis reconvertie dans la presse de proximité depuis...

L'édito

Touche pas à mon info !

L’investigation vit-elle ses derniers mois sur l’audiovisuel public en France ? Contraints par une réduction budgétaire de 50 millions d’euros en 2018 par rapport au contrat d’objectifs et de moyens conclu avec l’ancien gouvernement, les magazines « Envoyé Spécial » et « Complément d’enquête » verront leurs effectifs drastiquement diminués et une réduction du temps de diffusion au point de ne plus pouvoir assurer correctement leur mission d’information. Depuis l’annonce, les soutiens s’accumulent, notamment sur Twitter avec le hashtag #Touchepasàmoninfo, pour tenter de peser sur les décisions de Delphine Ernotte, présidente de France Télévisions, déjà visée par une motion de défiance. L’association Fragil, défenseur d’une information indépendante et sociétale, se joint à ce mouvement de soutien.

Après la directive adoptée par le Parlement européen portant sur le secret des affaires en avril 2016, il s’agit d’un nouveau coup porté à l’investigation journalistique en France. Scandales de la dépakine, du levothyrox, du coton ouzbek (pour ne citer qu’eux), reportages en France ou à l’étranger sur des théâtres de guerre, à la découverte de cultures et de civilisations sont autant de sujets considérés d’utilité publique. Cela prend du temps et cela coûte évidemment de l’argent. Mais il s’agit bien d’éveiller les consciences, de susciter l’interrogation, l’émerveillement, l’étonnement ou l’indignation. Sortir des carcans d’une société de consommation en portant la contradiction, faire la lumière sur des pratiques, des actes que des citoyens pensaient impensables mais bien réels. Telle est « la première priorité du service public », comme le considère Yannick Letranchant, directeur de l’information.

En conclusion, nous ne pouvions passer à côté d’une citation d’Albert Londres ô combien au goût du jour, prix éponyme que des journalistes d' »Envoyé Spécial » ont déjà remporté : « Je demeure convaincu qu’un journaliste n’est pas un enfant de chœur et que son rôle ne consiste pas à précéder les processions, la main plongée dans une corbeille de pétales de roses. Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort, il est de porter la plume dans la plaie. »


Valentin Gaborieau – Décembre 2017