22 mars 2021

La ferme des 1000 bras : de l’utopie à la réalité

Une ferme pas comme les autres où des citoyens se mobilisent pour le développement d’une agriculture saine, durable et contribuent ainsi à prendre soin de nous et de notre planète.

La ferme des 1000 bras : de l’utopie à la réalité

22 Mar 2021

Une ferme pas comme les autres où des citoyens se mobilisent pour le développement d’une agriculture saine, durable et contribuent ainsi à prendre soin de nous et de notre planète.

A l’origine de la ferme des 1000 bras des adhérent.e.s de la Coopérative  Scopéli , coopérative participative située à Rezé, dont Fragil s’est déjà fait l’écho dès sa création en novembre 2017. Constatant un besoin important de produits maraîchers  pour alimenter le magasin, un groupe d’adhérent.e.s se lance donc le défi de créer une ferme maraîchère pour y répondre, le tout bien sûr dans la continuité des valeurs de Scopéli : participative, avec une consommation locale, écologique et accessible au plus grand nombre.

En 2019 l’expérimentation est lancée et prend  le nom de « la ferme des 1000 bras » en référence aux bénévoles qui vont la faire vivre. Cette dernière a maintenant un an d’existence. Pour Fragil, nous sommes allés rencontrer Philippe, un des ses acteurs très impliqué pour découvrir la ferme, sa philosophie, son fonctionnement et ses perspectives.

Une partie de l’exploitation de la ferme des 1000 bras.

 Fragil : Pouvez vous nous expliquer comment fonctionne la ferme des 1000 bras ? 

Philippe : Au démarrage nous avons passé convention avec Emmanuel, un maraîcher qui a monté la ferme de l’Escabote à Bouguenais et qui livrait déjà ses légumes à Scopéli. ll nous a proposé 4000 m² de terres à cultiver en contrepartie d’une aide  de notre part pour récolter sa production. De plus , il  nous conseille aussi techniquement, car nous étions tous plus ou moins des néophytes en agriculture. Ainsi parmi les 150 adhérents à la ferme 80 d’entre eux se sont relayés toute l’année pour faire vivre l’activité de Scopilote, nommé ainsi en référence au lieu d’accueil et à Scopéli.

Des vacations de 3 heures sont mises en place, 5 jours par semaine, y vient qui veut, en prévenant quelques jours auparavant. Un groupe de 10 référents s’est constitué. Sensibilisés aux techniques de culture, ils accompagnent les bénévoles dans leur apprentissage. Plus largement, sont aussi accueillis deux volontaires en services civiques, mais aussi des personnes en situation de handicap.

Fragil : Le monde de l’agriculture est vaste et  multiple. Sur quelles valeurs repose l’activité de la ferme ? Quelles sont ses orientations ? 

Philippe :  Notre projet répond à des valeurs et des pratiques essentielles : enrichir les sols de façon écologique pour les rendre vivants, passer d’une conviction écologique à une prise en compte de la biologie du sol en respectant la biodiversité et utiliser toutes les techniques vertueuses pour cultiver les légumes. Notre volonté est également de rapprocher le monde agricole et le monde péri urbain et de s’ouvrir à tous types de public pour sensibiliser les citoyens et les rendre acteurs de ces changements.

Parmi celles ci citons ce que nous avons déjà expérimenté : la culture sur sols vivants. En arrivant sur cette parcelle, nous avons constaté qu’elle n’était  pas prête à la culture, aussi  pour la rendre plus productive nous avons donc recouvert la terre sur une vingtaine de centimètres d’un mélange de petits morceaux de bois et de compost et avons laissé la nature agir. Au bout d’un certain temps apparaissent les vers de terre, les bactéries, les champignons, les micro éléments, qui vont faire en sorte que par la suite des plantes poussent parce que cette terre sera devenue vivante et ceci au rythme de la nature. On pourrait aussi citer d’autres techniques complémentaires comme la permaculture  ou l’agroforesterie que nous comptons expérimenter à l’avenir.

Une partie de l’exploitation de la ferme.

Fragil : Quel bilan faites vous de cette première année et quelles sont les perspectives pour les années à venir ?

Philippe : Pour nous, le bilan de cette première année est très positif. Les bénévoles ont réalisé  leurs vacations de façon régulière, malgré le contexte sanitaire dans une ambiance chaleureuse. La production a été plutôt bonne alors que nous commençons seulement notre apprentissage du maraîchage. Tout cela nous encourage et nous motive pour aller plus loin. Nous envisageons déjà différentes étapes pour développer la ferme, car la demande des consommateurs est forte.

Dans un premier  temps, il s’agit d’agrandir notre surface de production. Pour ce faire nous sommes en relation avec Nantes Métropole qui a acquis des terrains pour les rendre accessibles à une agriculture uniquement biologique. Si nous finalisons cet accord, mais les démarches sont bien engagées avec cette institution, nous devrions nous installer  en 2022 à St Aignan de Grandlieu pour un bail de 9 ans sur une surface de 4 hectares et demi. Cependant tout est à construire ; enrichir la terre avant de la cultiver, construire les serres, bâtiments, impulser de nouvelles productions comme la culture de fleurs bio et la culture d’une grande variété de plants. C’est pour cela que nous venons de lancer un financement participatif. Puis nous chercherons des financements complémentaires au sein de l’économie sociale et solidaire et des acteurs privés. Si tout se passe comme nous le souhaitons, les premières productions devraient êtres livrables au printemps 2022.

Mais nous ne nous arrêterons pas là !

Philippe : Pour aller au bout de cette logique de développement durable et participative, nous souhaitons  agir « de la graine à l’assiette », c’est a dire sur tous les maillons de la chaîne : la production, la transformation, la vente. Pour cela nous sommes déjà en lien avec de nouveaux acteurs associatifs comme  Quai des marchandises  ou « les Cuisineries » qui projettent de s’installer prochainement sur L’Île de Nantes et avec qui nous pourront collaborer. A ce stade, nous avons identifié tous les critères qui nous permettront de faire vivre ce processus vertueux :  écologique, participatif, économique, humain et social pour répondre à tous ces enjeux de société.

De nombreux défis  attendent donc la ferme des 1000 bras, mais c’est seulement grâce aux citoyen.ne.s engagé.e.s que tous ces beaux projets se réaliseront et que ce modèle économique pourra faire ses preuves dans la durée, un enjeu essentiel dans le contexte actuel de la société.

Alors si vous souhaitez soutenir la ferme des 1000 bras, vous pouvez accompagner ces nouveaux projets par le biais du financement participatif (cf site ci dessous ), mais vous pouvez aussi mettre les mains dans la terre, en rejoignant l’équipe des bénévoles (cf site ci dessous).

Le rendez-vous est pris en 2022 pour découvrir la suite de cette aventure !

Infos pratiques

Financement participatif : ici.

Site de la ferme des 1000 bras: ici.

Facebook : @1000bras

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L'édito

Touche pas à mon info !

L’investigation vit-elle ses derniers mois sur l’audiovisuel public en France ? Contraints par une réduction budgétaire de 50 millions d’euros en 2018 par rapport au contrat d’objectifs et de moyens conclu avec l’ancien gouvernement, les magazines « Envoyé Spécial » et « Complément d’enquête » verront leurs effectifs drastiquement diminués et une réduction du temps de diffusion au point de ne plus pouvoir assurer correctement leur mission d’information. Depuis l’annonce, les soutiens s’accumulent, notamment sur Twitter avec le hashtag #Touchepasàmoninfo, pour tenter de peser sur les décisions de Delphine Ernotte, présidente de France Télévisions, déjà visée par une motion de défiance. L’association Fragil, défenseur d’une information indépendante et sociétale, se joint à ce mouvement de soutien.

Après la directive adoptée par le Parlement européen portant sur le secret des affaires en avril 2016, il s’agit d’un nouveau coup porté à l’investigation journalistique en France. Scandales de la dépakine, du levothyrox, du coton ouzbek (pour ne citer qu’eux), reportages en France ou à l’étranger sur des théâtres de guerre, à la découverte de cultures et de civilisations sont autant de sujets considérés d’utilité publique. Cela prend du temps et cela coûte évidemment de l’argent. Mais il s’agit bien d’éveiller les consciences, de susciter l’interrogation, l’émerveillement, l’étonnement ou l’indignation. Sortir des carcans d’une société de consommation en portant la contradiction, faire la lumière sur des pratiques, des actes que des citoyens pensaient impensables mais bien réels. Telle est « la première priorité du service public », comme le considère Yannick Letranchant, directeur de l’information.

En conclusion, nous ne pouvions passer à côté d’une citation d’Albert Londres ô combien au goût du jour, prix éponyme que des journalistes d' »Envoyé Spécial » ont déjà remporté : « Je demeure convaincu qu’un journaliste n’est pas un enfant de chœur et que son rôle ne consiste pas à précéder les processions, la main plongée dans une corbeille de pétales de roses. Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort, il est de porter la plume dans la plaie. »


Valentin Gaborieau – Décembre 2017