6 octobre 2017

« Hommage à Metropolis » : le street art s’invite en centre-ville

Mardi 3 octobre, Fragil a assisté à l’inauguration de la nouvelle fresque sur les murs du cinéma Le Katorza.

« Hommage à Metropolis » : le street art s’invite en centre-ville

06 Oct 2017

Mardi 3 octobre, Fragil a assisté à l’inauguration de la nouvelle fresque sur les murs du cinéma Le Katorza.

Au détour de la place Graslin et de son théâtre, un attroupement se forme ce mardi soir. Un petit chapiteau noir a été installé près de l’entrée du Katorza, mais tous les yeux sont rivés sur cet immense mur de la rue Corneille, devenu incontournable pour les nantais au fil des ans. Une toute nouvelle fresque a remplacé les graffitis et autres compositions anarchiques qui s’y trouvaient depuis une vingtaine d’années.

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Les Nantais découvrant la nouvelle fresque de la rue Corneille

Anne-Marie Krauz

« Comme le monde est bien fait… »

L’idée de ce projet est née dans le cadre du festival Teenage Kicks, consacré à l’art urbain. Souvenez-vous, c’était déjà eux qui avaient mené à bien le projet de peindre le Maillé-Brézé, quai de la Fosse à Nantes en 2015 ! Pour la troisième édition de la biennale, Teenage Kicks était à la recherche de murs nantais adéquats pour la pratique de la peinture, c’est-à-dire avec un minimum de relief. L’Outsider, l’un des deux artistes ayant réalisé cette œuvre, nous explique : « Teenage Kicks a fait la démarche d’aller voir le Katorza et comme le monde est bien fait, le Katorza avait comme projet de ravaler sa façade. L’association Plus de couleurs a proposé une dizaine de peintres, et c’est le Katorza qui nous a choisis, Dino Voodoo et moi-même. »

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Détail de la nouvelle fresque du Katorza

Anne-Marie Krauz

Les couleurs primaires dominent cette œuvre graphique, inspirée du film Metropolis de Fritz Lang.

Dino Voodoo et l’Outsider pratiquent le graffiti depuis plusieurs dizaines d’années. « C’était assez malin qu’ils aient eu l’idée d’une collaboration entre nous deux. On se connaissait parce que c’est un petit milieu et que tout le monde se connait, mais on n’avait jamais collaboré sur un projet de cette ampleur. Dino est plus habitué au travail de représentations humaines et de personnages et moi plutôt de compositions géométriques et de lettres. » Leur complicité ne fait pas de doute et le résultat est saisissant. Les couleurs primaires dominent cette œuvre graphique, inspirée du film Metropolis de Fritz Lang.

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L’Outsider (à gauche) et Dino Voodoo (à droite) devant la nouvelle fresque du Katorza

Anne-Marie Krauz

Dino Voodoo et L’Outsider avaient carte blanche pour la réalisation de cette fresque.

« On est naturellement arrivés au thème de Metropolis parce qu’on est tous les deux très influencés par le style art déco et le graphisme de cette époque-là. Les affiches de ce film nous avaient beaucoup marqués et continuent de marquer le graphisme contemporain aujourd’hui. » Film allemand et muet de science-fiction, Metropolis évoque une société dystopique en l’an 2026. Dino Voodoo et L’Outsider avaient carte blanche pour la réalisation de cette fresque ; ils ont fait le choix de ce film de 1927 en noir et blanc, tel un clin d’œil, pour rappeler que le Katorza a vu le jour en 1920. L’inauguration se termine donc, après un cocktail en extérieur, par la projection du film de Fritz Lang.

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Détail de la nouvelle fresque du Katorza

Anne-Marie Krauz

« Pour faire un film, il faut être amoureux »

La précédente fresque était devenue l’un des symboles de la ville de Nantes. Les artistes ont donc fait le choix de conserver la citation emblématique : « Pour faire un film, il faut être amoureux » de Jose Luis Borau. Mais l’Outsider nous rappelle que « c’est un art qui se veut de nature éphémère et je n’ai pas du tout de problème avec ça. » Cette œuvre ne sera peut-être pas pérenne mais ne vous en faites pas, elle restera tout de même suffisamment longtemps pour que vous puissiez l’admirer, la prochaine fois que vous flânerez dans le quartier.

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La citation de l'ancienne fresque a été conservée dans la nouvelle

Anne-Marie Krauz

Les Belles Histoires de la cité nantaise…

Le Ferrailleur, chaudron des musiques actuelles

Anne-Marie est journaliste pigiste spécialisée dans les sujets société/culture. Elle a le goût de raconter des histoires, chercher la parole et le dévoilement de l’autre, notamment autour des thématiques féministes et LGBTQ+. Elle est également passionnée de séries et de pop culture.

L'édito

Touche pas à mon info !

L’investigation vit-elle ses derniers mois sur l’audiovisuel public en France ? Contraints par une réduction budgétaire de 50 millions d’euros en 2018 par rapport au contrat d’objectifs et de moyens conclu avec l’ancien gouvernement, les magazines « Envoyé Spécial » et « Complément d’enquête » verront leurs effectifs drastiquement diminués et une réduction du temps de diffusion au point de ne plus pouvoir assurer correctement leur mission d’information. Depuis l’annonce, les soutiens s’accumulent, notamment sur Twitter avec le hashtag #Touchepasàmoninfo, pour tenter de peser sur les décisions de Delphine Ernotte, présidente de France Télévisions, déjà visée par une motion de défiance. L’association Fragil, défenseur d’une information indépendante et sociétale, se joint à ce mouvement de soutien.

Après la directive adoptée par le Parlement européen portant sur le secret des affaires en avril 2016, il s’agit d’un nouveau coup porté à l’investigation journalistique en France. Scandales de la dépakine, du levothyrox, du coton ouzbek (pour ne citer qu’eux), reportages en France ou à l’étranger sur des théâtres de guerre, à la découverte de cultures et de civilisations sont autant de sujets considérés d’utilité publique. Cela prend du temps et cela coûte évidemment de l’argent. Mais il s’agit bien d’éveiller les consciences, de susciter l’interrogation, l’émerveillement, l’étonnement ou l’indignation. Sortir des carcans d’une société de consommation en portant la contradiction, faire la lumière sur des pratiques, des actes que des citoyens pensaient impensables mais bien réels. Telle est « la première priorité du service public », comme le considère Yannick Letranchant, directeur de l’information.

En conclusion, nous ne pouvions passer à côté d’une citation d’Albert Londres ô combien au goût du jour, prix éponyme que des journalistes d' »Envoyé Spécial » ont déjà remporté : « Je demeure convaincu qu’un journaliste n’est pas un enfant de chœur et que son rôle ne consiste pas à précéder les processions, la main plongée dans une corbeille de pétales de roses. Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort, il est de porter la plume dans la plaie. »


Valentin Gaborieau – Décembre 2017