Des affiches noir et or sobrement estampillées « L’âge d’or du rap français » fleurissent depuis quelques jours à Nantes… Sous-titre plein d’humilité : « la tournée événement ». Il s’agit là d’un concert au Zénith prévu samedi 9 mars. L’objectif est clair : on ressort les anciennes idoles pour leur proposer un ou deux titres aux côtés d’anciens frères d’armes des années 1990. Et bien sûr, in fine, rafler la mise. Pourquoi pas… Il faut admettre que les noms égrainés en bas de l’affiche ont de quoi émerveiller (ou pas) les nostalgiques de cette période : Assassin, Menelik, Ministère Amer, Passi, Stomy Bugsy, Les Sages Po, pour ne citer qu’eux…
C’est une vision du rap français qu’on pourrait qualifier de conservatrice ne serait-ce que par l’usage du terme « Âge d’or ». Quoi ? Personne n’aurait su prendre la relève depuis 20 ans en France ? Et alors que fait-on de tous ces artistes qui ne cessent de fleurir dans l’Hexagone ? Nous avons aujourd’hui un vivier exceptionnel pour la culture hip-hop en France. Le festival HIP OPsession, qui se déroule à Nantes depuis le 16 février et se poursuit jusqu’au 4 mars, en est une formidable vitrine. Danses, graff, rap, beatmaking, beatbox, etc. Toutes les disciplines y sont représentées dans un joyeux mélange international.
C’est LA réalité du hip-hop aujourd’hui : la plume acérée de Pumpkin, la cool attitude de Cheeko et Blanka, l’auto-tune de Jazz Cartier, l’expression corporelle de Jean-Charles Mbotti Malolo, les freestyles d’ASM, la révolution permanente de Kery James, les sons de Moar, Vin’S Da Cuero ou Le Parasite, les couleurs de Korsé et Eskat. La culture hip-hop bouillonne des Dervallières à Brooklyn avec une diversité incroyable. C’est un atout de notre culture française que l’industrie musicale et les médias mainstream ne cherchent pas à valoriser, préférant clairement miser sur un rap pauvre infligé aux ados ou sur les « vieilleries » qui ressassent un ou deux tubes depuis plus de 20 ans.
HIP OPsession est un festival progressiste. Et cette ligne de conduite nous séduit évidemment à Fragil, média partenaire de l’événement. Quant au samedi 9 mars… on traînera plutôt du côté de la Barakason de Rezé. Histoire de faire un pied de nez aux conservateurs qui ne jurent que par le passé. Et vous ?
Pierre-Adrien Roux
24/02/17