« Au début, je me suis dit ‘Je n’y vais pas, c’est trop dangereux’. Mais au fil des jours, je n’en dormais plus » : Le 12 juin, avec 54 délégations internationales, Esther devait partir pour la bande de Gaza. Mais, ayant été immédiatement interceptée au Caire, elle a été détenue puis rapatriée d’office en France.
Pourtant, malgré cela et quelques jours après l’arrestation dans les eaux internationales des militant·es de la Freedom Flotilla, les autres militant·es de la « Marche pour Gaza » encore sur place vont tout de même tenter d’aller sur place dès le lendemain. L’objectif : « tenter de faire rentrer de l’aide humanitaire » et « demander un cessez-le-feu immédiat ».
Ce n’était pas la première fois que la militante de 21 ans s’engageait sur le terrain. Depuis ses 17 ans, elle a décidé « d’adapter l’entièreté de son temps pour changer le monde » au travers des luttes écologistes, sociales et internationalistes.
Se battant « pour l’autodétermination des peuples », elle n’hésite pas à visibiliser ses actions sur ses réseaux sociaux pour exhorter les jeunes à se mobiliser. Et si, depuis plus d’un an, sa lutte va au-delà des sphères nantaises, pour celle qui vit actuellement sur la ZAD de Notre-Dame-des-Landes, il y a des liens à faire sur tous les sujets : « Ça n’a aucun sens de faire des luttes internationalistes si on n’est pas ancrés nous aussi sur un territoire ».
« Pour l’autonomie des peuples », du local à l’international
Avec le mouvement pour le climat comme « porte d’entrée » dans le militantisme, elle explique avoir « commencé à Nantes, avec des luttes locales » qui ont évoluées au fur et à mesure. « Quand on se politise au sein du mouvement, on se rend compte qu’on ne peut pas dissocier les questions écologistes et sociales », affirme-t-elle.
Depuis plus d’un an, elle a donc pris « un tournant plus internationaliste ». « Partout dans le monde, on lutte contre des ennemis communs à tous les peuples […]. Ça ne s’arrête pas aux frontières », revendique celle qui est aussi allée au Kurdistan il y a quelques mois. Comparant le capitalisme à un poulpe, elle sourit : « Il y a des bras à couper sur plein de sujets ! » .
Engagée tout particulièrement auprès « des peuples qui se battent pour garder leurs terres et leur autodétermination », la cause palestinienne touchait donc forcément cette résidente de la ZAD de NDDL, s’estimant « hyper connectée à son territoire tout en l’étant aux luttes partout dans le monde ».
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La mobilisation citoyenne comme réponse à l’inaction gouvernementale
Ayant souvent été dans les rues pour défendre la cause palestinienne, Esther regrette l’inaction gouvernementale en réponse à ces mobilisations : « On n’a pas le temps de laisser les choses se faire face à un Etat colonial qui met en place un génocide ». C’est pourquoi elle est partie pour cette marche pacifiste du Caire vers Rafah (ville du sud de la bande de Gaza, ndlr.), avec un départ finalement reporté au 13 juin. Désormais rapatriée en France, elle soutiendra tout de même à distance cette « initiative internationale », avec pour but de « montrer que tout le monde a les yeux rivés sur ce qu’il se passe en Palestine, dans la bande de Gaza ».
L’objectif, pour les militant·es toujours sur place, sera de « réussir à faire rentrer de l’aide humanitaire » dans cette « prison à ciel ouvert » soumis à un blocus depuis plusieurs mois. Il sera aussi demandé un cessez-le-feu immédiat, ainsi que des requêtes « plus au long terme », comme « la reconnaissance du peuple palestinien ». Consciente que les délégations « n’arriveront pas forcément à obtenir tout ça au bout d’une marche », elle espère néanmoins « faire une pression populaire ».
« On ne peut pas juste faire des manifestations en France et attendre que le gouvernement agisse »
Pourtant, avant d’aller à Gaza, Esther et ses camarades ont essayé de faire porter leurs voix localement : « Pendant des mois on a fait des manifestations, et la seule chose qu’on s’est prise en retour, c’est de la répression », déplore-t-elle en citant la menace de dissolution du collectif Urgence Palestine.
Et même si des discussions européennes ont récemment eu lieu, Esther constate que « les sanctions économiques ne sont toujours pas mises en place » sur l’Etat d’Israël. « Comme on n’arrive pas à faire pression sur les gouvernements, on choisit la mobilisation citoyenne comme autre voie pour agir », affirme-t-elle.
Entre la famine et le blocus alimentaire mis en place par Israël, aller sur le terrain est alors devenu une évidence pour elle : « On ne peut pas juste faire des manifestations en France et attendre que le gouvernement agisse ».
Se visibiliser pour obtenir du soutien
Cependant, même avant de partir, Esther restait consciente des dangers que représentait son expédition : « Que ce soient les menaces sur la Freedom Flotilla ou les bateaux humanitaires partis d’Europe qui s’étaient fait tirer dessus, j’ai l’impression qu’ils sont prêts à tout ». Malgré tout, elle a décidé de visibiliser le début de la marche puis son rapatriement via ses réseaux sociaux, où elle cumule presque 3000 abonné·es.
Pour elle, prendre parole publiquement permet « mettre en place un suivi populaire de la mobilisation et que le message se diffuse ». La résonance de l’action est primordiale « pour que des institutions fassent pression pour pas que Israël [leur] tire dessus ».
A l’échelle de sa communauté, la but d’Esther est également de « montrer que c’est important de ne pas rester dans l’inaction ». Suivie notamment par des jeunes, elle veut pousser ces générations à ne pas se résigner dans toutes les luttes : « Il faut qu’on y aille ». Et si elle reconnaît que « ça peut être dangereux », elle rappelle que « si on ne se bat pas, on aura moins de chances de gagner ».
Elle insiste d’ailleurs sur le fait que, même sans elle, les groupes ont encore « besoin de soutien », y compris virtuel. A l’instar d’autres délégations, Esther avait d’ailleurs lancé une cagnotte personnelle, notamment « pour les frais d’avocats et les transports ». Mais « le plus important », précise-t-elle, est de suivre le compte @globalmarchtogaza, dans le cas où des appels à l’aide ou d’autres rapatriements sont faits.
Informations complémentaires
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- Suivre Esther sur Instagram : @esther.lecordier
- Soutenir la cagnotte d’Esther
- Suivre la Marche pour Gaza sur Instagram : @globalmarchtogaza
- Site Global March to Gaza