1 décembre 2022

L’imagination débordante de René Martin, l’inventeur du Festival de la Folle Journée de Nantes.

Se renouveler sans cesse sans perdre l’esprit originel de l’évènement, à savoir la démocratisation de la musique classique : c’est le tour de force que réalise René Martin chaque année à Nantes. Pour sa 29ème édition, il innove encore en se transformant en «roi de la nuit».

L’imagination débordante de René Martin, l’inventeur du Festival de la Folle Journée de Nantes.

01 Déc 2022

Se renouveler sans cesse sans perdre l’esprit originel de l’évènement, à savoir la démocratisation de la musique classique : c’est le tour de force que réalise René Martin chaque année à Nantes. Pour sa 29ème édition, il innove encore en se transformant en «roi de la nuit».

Organiser des concerts à 7h30 pour découvrir les «leçons des ténèbres», proposer des berceuses à des bébés à 10 h du matin, du jazz «autour de minuit» en référence à Thelonius Monk, un voyage en train avec un concert de Satie qui dure 24 heures … Les idées les plus folles ne manquent pas à ce programmateur de génie qu’est René Martin. Pour son édition 2023, le directeur artistique de La Folle Journée de Nantes nous invite à une «Ode à la nuit».

«Lorsque René est venu me voir en me proposant des concerts la nuit » avoue Aymeric Seasseau, le maire adjoint de Nantes à la culture, lors de la conférence de présentation à la Cité des Congrès le 24 novembre, «j’ai eu une petite hésitation, surtout après la période sombre que nous venons de traverser». Mais finalement il lui a fait confiance et le pari semble alléchant. «Il faut toujours écouter René» reconnait-il avant de citer ce dicton persan : «Le jour a des yeux, la nuit a des oreilles».

L’inspiration de la nuit

  «Paisible ou tourmentée, sereine ou inquiétante, claire ou obscure, la nuit se décline en une infinie variété d’atmosphères que les compositeurs se sont de tous temps attachés à saisir et à recréer» affirme René Martin, celui que Marc Voinchet, le directeur de France Musique, rebaptise «le roi de la nuit».

L’intéressé sourit à son nouveau surnom qui fait davantage penser à Michou ou aux Folies Bergères qu’à la Folle Journée. Très discret et modeste, René Martin ne dévoilera pas le secret de son imagination fertile. Passe-t-il des nuits blanches à mettre en musique cette organisation qui réunit 1 900 artistes en 5 jours et propose à 140 000 auditeurs 270 concerts ? Quelles sont les sources de son inspiration ?

Toujours est-il qu’il n’est jamais à court d’idée pour proposer des berceuses, des sérénades, des nocturnes, des nuits de Noël, des clairs de lune, des ragas de nuit et aussi pour nous faire découvrir des compositeurs méconnus comme le finlandais Jean Sibelius ou des œuvres originales comme le réveil des oiseaux d’Olivier Messiaen créée le 11 octobre 1953.

Des nouveautés en pagaille

Et parmi les nouveautés 2023, il y aura cette scène mobile avec 80 fauteuils qui ira dans les petits villages pour offrir de la musique classique à des publics éloignés. Sans oublier cette journée du 2 février réservée aux professionnels. Elle sera construite avec l’expertise de François Gabory, le Monsieur Culture de la Cité des Congrès et fondateur du Chaînon Manquant, pour aider les jeunes talents à se lancer dans une carrière internationale. Objectif : les mettre en relation avec des organisateurs de festival, des programmateurs de radio ou des directeurs de grandes scènes et leur assurer des tournées et une vingtaine de dates voire plus.

En fait, cette folle journée ne cesse de se renouveler depuis 1995 mais en œuvrant pour les mêmes fondamentaux : conquérir de nouveaux publics, notamment les jeunes, valoriser les conservatoires de musique, diffuser la musique classique au-delà de Nantes, dans toute la région Pays de la Loire, l’enrichir avec les apports d’autres musiques comme le jazz ou les musiques traditionnelles.

Et pour les 30 ans ? Sera-t-il possible de faire encore mieux ? «Bien sûr que oui» répond avec malice René Martin. «J’y travaille déjà car il faut réserver les orchestres à l’avance mais je ne peux rien vous annoncer pour l’instant». Une chose est sûre. Son cerveau va continuer de bouillir pour imaginer d’autres surprises. En fait, il ne s’arrête jamais.

René Martin lors de la présentation du programme de l’édition 2023 à la Cité des Congrès de Nantes

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Quand on a été journaliste pendant plus de 30 ans à France 3, que l'on s'est enrichi de belles rencontres et de découvertes, on a envie de continuer à partager sa curiosité et son ouverture d'esprit avec d'autres. En travaillant bénévolement à Fragil, on peut continuer à se cultiver en toute liberté. Ca donne du sens à un retraité devenu journaliste honoraire.

L'édito

Touche pas à mon info !

L’investigation vit-elle ses derniers mois sur l’audiovisuel public en France ? Contraints par une réduction budgétaire de 50 millions d’euros en 2018 par rapport au contrat d’objectifs et de moyens conclu avec l’ancien gouvernement, les magazines « Envoyé Spécial » et « Complément d’enquête » verront leurs effectifs drastiquement diminués et une réduction du temps de diffusion au point de ne plus pouvoir assurer correctement leur mission d’information. Depuis l’annonce, les soutiens s’accumulent, notamment sur Twitter avec le hashtag #Touchepasàmoninfo, pour tenter de peser sur les décisions de Delphine Ernotte, présidente de France Télévisions, déjà visée par une motion de défiance. L’association Fragil, défenseur d’une information indépendante et sociétale, se joint à ce mouvement de soutien.

Après la directive adoptée par le Parlement européen portant sur le secret des affaires en avril 2016, il s’agit d’un nouveau coup porté à l’investigation journalistique en France. Scandales de la dépakine, du levothyrox, du coton ouzbek (pour ne citer qu’eux), reportages en France ou à l’étranger sur des théâtres de guerre, à la découverte de cultures et de civilisations sont autant de sujets considérés d’utilité publique. Cela prend du temps et cela coûte évidemment de l’argent. Mais il s’agit bien d’éveiller les consciences, de susciter l’interrogation, l’émerveillement, l’étonnement ou l’indignation. Sortir des carcans d’une société de consommation en portant la contradiction, faire la lumière sur des pratiques, des actes que des citoyens pensaient impensables mais bien réels. Telle est « la première priorité du service public », comme le considère Yannick Letranchant, directeur de l’information.

En conclusion, nous ne pouvions passer à côté d’une citation d’Albert Londres ô combien au goût du jour, prix éponyme que des journalistes d' »Envoyé Spécial » ont déjà remporté : « Je demeure convaincu qu’un journaliste n’est pas un enfant de chœur et que son rôle ne consiste pas à précéder les processions, la main plongée dans une corbeille de pétales de roses. Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort, il est de porter la plume dans la plaie. »


Valentin Gaborieau – Décembre 2017