3 mars 2022

L’exposition « L’abîme » au château des Ducs de Bretagne : comprendre les origines du racisme

[La UNE du Jour] L’exposition temporaire "L'abîme" se tient en ce moment au Musée d’Histoire de Nantes au château des Ducs. Vous pourrez y écouter des témoignages des descendants des dernières personnes mises en esclavage de Martinique et une vidéo réalisée pour l’émission «Le Dessous des Cartes».

L’exposition « L’abîme » au château des Ducs de Bretagne : comprendre les origines du racisme

03 Mar 2022

[La UNE du Jour] L’exposition temporaire "L'abîme" se tient en ce moment au Musée d’Histoire de Nantes au château des Ducs. Vous pourrez y écouter des témoignages des descendants des dernières personnes mises en esclavage de Martinique et une vidéo réalisée pour l’émission «Le Dessous des Cartes».

«Je ne suis pas raciste mais… » Combien de fois avons-nous entendu cette phrase. Et pourtant, nous savons aujourd’hui grâce à la biologie, la génétique et l’archéologie que les races n’existent pas et qu’ils n’y a pas de hiérarchie entre les races.

Comme le rappelle Jean-Christophe Victor dans « Le dessous des cartes », tous les hommes et femmes qu’ils et elles soient blanc.he.s ou non : l’homo sapiens né en Afrique il y a 150 000 ans. Ils sont constitués du même génome. En fait, la couleur de leur peau dépend de la mélamine, un pigment fabriqué par le corps pour se protéger de l’exposition au soleil. Elle varie en fonction des conditions climatiques et des continents. Alors d’où vient cette persistance du racisme ?

Pour le comprendre, il faut se plonger dans l’histoire, celle de la traite atlantique qui a duré 400 ans et qui a déporté 25 à 30 millions d’humains. Les esclaves, des noirs, sont réduits à de la main d’œuvre gratuite. Pire, ils deviennent de la vulgaire marchandise, des objets qui vont générer des profits colossaux. Un phénomène de grande ampleur qui va marquer l’histoire de l’humanité en profondeur.

Les sciences raciales du XVIII ème siècle

Mais l’esclavage n’explique pas tout. C’est la science qui a ancré le racisme dans nos têtes. Là encore, Jean- Christophe Victor le démontre très bien dans la «Mémoire du racisme». Ce sont les savants naturalistes du XVIII ème siècle comme Buffon ou Liné qui ont cherché à définir les races et à les classer selon la couleur de la peau ou les traits de caractère.

Ainsi ont-ils distingués l’homo sapiens en 4 catégories : l’homo asiaticus décrit comme jaune pâle, mélancolique et rigide ; l’homo afer comme noir, flegmatique et décontracté ; l’homo europeus comme blanc, sanguin et musculaire ; l’homo americanus comme rouge, colérique et droit.

Puis au XIX ème siècle sont arrivées les nouvelles sciences comme l’anthropométrie et la craniométrie qui ont conforté les théories raciales en mesurant la taille des cerveaux et en établissant des relations entre l’anatomie et les facultés intellectuelles.

Les manuels scolaires ont tout faux

L’école aussi a joué un mauvais rôle dans l’enseignement de ces fausses connaissances scientifiques. Jean-Christophe Victor, le fondateur et directeur scientifique du Laboratoire d’études prospectives et d’analyses cartographiques, prend l’exemple du manuel scolaire « Le tour de France par deux enfants » édité à 8,5 millions d’exemplaires pour indiquer que pendant près d’un siècle les instituteurs ont répété à des générations d’élèves qu’il existait 4 races et que la race blanche était la plus parfaite.

L’exposition portraits de caste montre comment les noirs étaient rangés dans différentes catégories selon leur couleur de peau

Pas étonnant non plus qu’aux Etats-Unis, il ait fallu attendre 1964 pour mettre fin aux lois ségrégationnistes qui séparaient noirs et blancs à l’école et dans les bus et qui interdisaient les mariages interraciaux, soit presque un siècle après l’abolition de l’esclavage.

Alors oui, si vous voulez comprendre les raisons du racisme et vous défaire des idées reçues sur ces discriminations, n’hésitez pas à vous rendre au château des Ducs de Bretagne à Nantes.

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Quand on a été journaliste pendant plus de 30 ans à France 3, que l'on s'est enrichi de belles rencontres et de découvertes, on a envie de continuer à partager sa curiosité et son ouverture d'esprit avec d'autres. En travaillant bénévolement à Fragil, on peut continuer à se cultiver en toute liberté. Ca donne du sens à un retraité devenu journaliste honoraire.

L'édito

Touche pas à mon info !

L’investigation vit-elle ses derniers mois sur l’audiovisuel public en France ? Contraints par une réduction budgétaire de 50 millions d’euros en 2018 par rapport au contrat d’objectifs et de moyens conclu avec l’ancien gouvernement, les magazines « Envoyé Spécial » et « Complément d’enquête » verront leurs effectifs drastiquement diminués et une réduction du temps de diffusion au point de ne plus pouvoir assurer correctement leur mission d’information. Depuis l’annonce, les soutiens s’accumulent, notamment sur Twitter avec le hashtag #Touchepasàmoninfo, pour tenter de peser sur les décisions de Delphine Ernotte, présidente de France Télévisions, déjà visée par une motion de défiance. L’association Fragil, défenseur d’une information indépendante et sociétale, se joint à ce mouvement de soutien.

Après la directive adoptée par le Parlement européen portant sur le secret des affaires en avril 2016, il s’agit d’un nouveau coup porté à l’investigation journalistique en France. Scandales de la dépakine, du levothyrox, du coton ouzbek (pour ne citer qu’eux), reportages en France ou à l’étranger sur des théâtres de guerre, à la découverte de cultures et de civilisations sont autant de sujets considérés d’utilité publique. Cela prend du temps et cela coûte évidemment de l’argent. Mais il s’agit bien d’éveiller les consciences, de susciter l’interrogation, l’émerveillement, l’étonnement ou l’indignation. Sortir des carcans d’une société de consommation en portant la contradiction, faire la lumière sur des pratiques, des actes que des citoyens pensaient impensables mais bien réels. Telle est « la première priorité du service public », comme le considère Yannick Letranchant, directeur de l’information.

En conclusion, nous ne pouvions passer à côté d’une citation d’Albert Londres ô combien au goût du jour, prix éponyme que des journalistes d' »Envoyé Spécial » ont déjà remporté : « Je demeure convaincu qu’un journaliste n’est pas un enfant de chœur et que son rôle ne consiste pas à précéder les processions, la main plongée dans une corbeille de pétales de roses. Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort, il est de porter la plume dans la plaie. »


Valentin Gaborieau – Décembre 2017