• Antoine Leborgne, programmateur de l'Agronaute
19 janvier 2024

L’Agronaute, au cœur des transitions écologiques et sociales

Rencontre avec Antoine Leborgne, programmateur de l'Agronaute, une ferme urbaine où se mêlent transitions écologique, sociale et défis à relever... En accueillant aussi bien des banquier·es en séminaire que des salarié.e.s en reconversion, ce lieu permet de renouer avec du "concret".

L’Agronaute, au cœur des transitions écologiques et sociales

19 Jan 2024

Rencontre avec Antoine Leborgne, programmateur de l'Agronaute, une ferme urbaine où se mêlent transitions écologique, sociale et défis à relever... En accueillant aussi bien des banquier·es en séminaire que des salarié.e.s en reconversion, ce lieu permet de renouer avec du "concret".

C’est une gigantesque serre de 3500m2, que l’on ne peut pas rater si l’on passe à proximité. Pourtant, elle est située dans un quartier en pleine mutation, où les transports en commun sont pour l’heure invisibles. Vous l’avez deviné, il s’agit de l’Agronaute, géré par l’association La Sauge.

Antoine Leborgne, programmateur de l'Agronaute

Antoine Leborgne, programmateur de l’Agronaute

Née en 2019, cette ferme urbaine a pour but d’initier les gens à « l’agroécologie », quelle que soit leur expérience passée avec le jardinage. « On est sur l’écologie au sens large, mais on a pris une porte d’entrée alimentation durable », nous dit Antoine, dont le métier est « d’événementialiser la ferme pour en faire un lieu de vie » : salons du vin, fête de la fermentation, 48h de l’agriculture urbaine, concerts… Son but est aussi de faire venir des publics dont l’envie première n’est pas forcément de mettre les mains dans la terre.

« T’as des gens qui arrivent en costard, qui nous regardent un peu bizarre parce qu’ils ont plutôt l’habitude de faire leur séminaire annuel dans des Relais & Châteaux »

Ainsi se succèdent dans ce lieu de rencontres des banquier·es et groupes de mutuelles en séminaire, mais aussi des gens en quête de concret, comme Hervé, qui nous explique qu’il travaillait encore il y a quelques mois à l’Ademe (Agence de la transition écologique) « j’en avais marre du travail de bureau, maintenant je m’occupe des semis, récoltes et préparation de commandes à l’Agronaute ». 2 à 3 personnes sont accueillies chaque année dans le cadre de leur reconversion, une autre forme de transition. L’Agronaute est également en lien avec des structures de l’urgence sociale afin d’intégrer tout type de publics, et de créer des rencontres : « les gens passent parfois plus de temps à parler qu’à jardiner ! »

Un plant produit dans l’une des serres de l’Agronaute

 

« Pour certains, les premiers mots de français qu’ils vont apprendre, c’est basilic, terreau, rempoter »

À l’Agronaute, « tout est lié de près ou de loin à la transition écologique et sociale » : artistes locaux, places « en attente » (l’équivalent des cafés suspendus), boissons et restauration locales, artisanales, bios et de saison…

Les événements ne sont pas en reste : avec Fripe-Fripe, grande braderie qui prône la seconde main et le réemploi de vêtements; Umami, la fête de la fermentation qui « invite les gens à cuisiner eux-mêmes, à s’intéresser à la conservation »; ou encore le festival des 48h de l’agriculture urbaine, valorisant toutes les initiatives en faveur de cette dernière, et la transition de manière générale, à l’échelle locale mais également métropolitaine.

Le jardin de la grande serre principale

Ce type d’événement est labellisé par le REEVE (réseau éco-événement), qui valorise la démarche éco-responsable des organisateur·rice·s, et la structure est également épaulée par la Chambre d’Agriculture et de nombreux autres organismes, ce qui permet un partage d’expérience et d’échange sur différentes problématiques.

En effet, tout n’est pas vert rose à l’Agronaute, confronté à de nombreux défis, avec en premier lieu celui de produire beaucoup -une partie de la rentabilité de la structure repose sur la vente de plants- dans peu d’espace (400m2 de pépinière). Le second défi est de composer avec le bâtiment, la serre étant un espace très vieillissant, avec un toit laissant passer d’innombrables fuites d’eau. Les conventions d’occupation (temporaire, jusqu’à l’horizon 2030) étant signées pour 3 ans avec la Samoa, propriétaire du lieu; ne permettent pas d’investissement financier pour pallier ces problèmes, c’est donc « le système D, on fait du bricolage ».

Il faut également prouver à la Métropole l’utilité sociale et économique du projet, et donc inviter les publics dans un lieu coincé entre des parcelles en plein travaux, entre les rails, le chantier du nouvel hôpital et des transports en commun qui se font attendre, d’où les 100 places de parking vélo à l’entrée de l’Agronaute.

« C’est un no man’s land autour, on est complètement replié·e·s sur nous-mêmes »

Mais Antoine n’est pas du genre à baisser les bras : « Après 2030 il faut qu’il y ait encore du jardinage ici, ils sont en train de verticaliser la ville, ils construisent immeuble sur immeuble, dans les projets c’est du béton partout. Ici les gens peuvent se fournir de tomates locales en été, puisqu’il n’y a plus d’autre espace pour le faire… »

Dans le viseur de l’Agronaute en 2024, l’ouverture de nouvelles fermes urbaines, et donc la recherche de nouvelles surfaces de production agricole en pleine terre, à proximité desquelles serait installée une guinguette, puisque l’événementiel est un élément indissociable de la culture urbaine pour l’association La Sauge.

Si vous ressentez le besoin de reconnecter avec le végétal, n’hésitez pas à pousser les portes de l’Agronaute, vous y serez bien reçu·e !

L’Agronaute
Ancien MiN
Rue du Sénégal
44200 Nantes
https://www.lagronaute.fr/

L’entrée de la ferme urbaine

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Philanthrope made in Saint-Nazaire n’hésitant pas à réinventer sa vie, Florent est prêt à défier les conventions pour une vie plus enrichissante. Et ce sont ses passions et son engagement social qui vont l’accompagner dans cette aventure.

L'édito

Touche pas à mon info !

L’investigation vit-elle ses derniers mois sur l’audiovisuel public en France ? Contraints par une réduction budgétaire de 50 millions d’euros en 2018 par rapport au contrat d’objectifs et de moyens conclu avec l’ancien gouvernement, les magazines « Envoyé Spécial » et « Complément d’enquête » verront leurs effectifs drastiquement diminués et une réduction du temps de diffusion au point de ne plus pouvoir assurer correctement leur mission d’information. Depuis l’annonce, les soutiens s’accumulent, notamment sur Twitter avec le hashtag #Touchepasàmoninfo, pour tenter de peser sur les décisions de Delphine Ernotte, présidente de France Télévisions, déjà visée par une motion de défiance. L’association Fragil, défenseur d’une information indépendante et sociétale, se joint à ce mouvement de soutien.

Après la directive adoptée par le Parlement européen portant sur le secret des affaires en avril 2016, il s’agit d’un nouveau coup porté à l’investigation journalistique en France. Scandales de la dépakine, du levothyrox, du coton ouzbek (pour ne citer qu’eux), reportages en France ou à l’étranger sur des théâtres de guerre, à la découverte de cultures et de civilisations sont autant de sujets considérés d’utilité publique. Cela prend du temps et cela coûte évidemment de l’argent. Mais il s’agit bien d’éveiller les consciences, de susciter l’interrogation, l’émerveillement, l’étonnement ou l’indignation. Sortir des carcans d’une société de consommation en portant la contradiction, faire la lumière sur des pratiques, des actes que des citoyens pensaient impensables mais bien réels. Telle est « la première priorité du service public », comme le considère Yannick Letranchant, directeur de l’information.

En conclusion, nous ne pouvions passer à côté d’une citation d’Albert Londres ô combien au goût du jour, prix éponyme que des journalistes d' »Envoyé Spécial » ont déjà remporté : « Je demeure convaincu qu’un journaliste n’est pas un enfant de chœur et que son rôle ne consiste pas à précéder les processions, la main plongée dans une corbeille de pétales de roses. Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort, il est de porter la plume dans la plaie. »


Valentin Gaborieau – Décembre 2017