25 mars 2024

La Fresque du sexisme, un outil pédagogique et collaboratif

Deux semaines après la journée internationale des droits des femmes, nous partons à la découverte de la Fresque du sexisme, un outil dont le but est de donner des clés pour bâtir une société plus égalitaire. En analysant la mécanique de notre système sexiste actuel, les situations rencontrées au quotidien et les réponses à apporter, les participant⸱e⸱s à cette Fresque unissent leurs forces pour l'égalité des sexes.

La Fresque du sexisme, un outil pédagogique et collaboratif

25 Mar 2024

Deux semaines après la journée internationale des droits des femmes, nous partons à la découverte de la Fresque du sexisme, un outil dont le but est de donner des clés pour bâtir une société plus égalitaire. En analysant la mécanique de notre système sexiste actuel, les situations rencontrées au quotidien et les réponses à apporter, les participant⸱e⸱s à cette Fresque unissent leurs forces pour l'égalité des sexes.

Visualisation des différents impacts du sexisme sur les personnes qui en sont victimes

Il est pratiquement 16h ce jeudi 21 mars, lorsque je rencontre Anette Ory-Lamballe, animatrice pour la Fresque du sexisme.
Engagée sur plusieurs fronts, qu’il s’agisse des enjeux climatiques, des discriminations ou encore du sexisme, elle s’intéresse particulièrement aux systèmes de domination (racisme, inégalités femme-homme…), à leurs mécaniques similaires, ainsi qu’à la façon d’y remédier.

Le but de la Fresque qu’elle anime aujourd’hui, et qui a été conçue en 2021, est ainsi de contribuer à une société égalitaire et inclusive, grâce à l’intelligence collective. Sur le même principe que sa grande sœur, la très connue Fresque du climat,  les participant⸱e⸱s doivent trouver des liens entre les causes et les conséquences de diverses situations ou comportements, et partager, s’iels le veulent, leurs propres expériences, avant de tenter de trouver ensemble des pistes et réponses à une société construite autour du sexisme.

« Les discriminations, on en fait sur tous les sujets ! »

Le public du jour sera 100% féminin, une première pour Anette qui a animé une quinzaine de Fresques du sexisme, et reconnaît qu’il y a souvent « une majorité de femmes« . C’est parti pour 3h d’atelier, à déconstruire ensemble la façon dont la société fonctionne. Un premier cadre est posé pour les 14 participantes, celui d’un espace de liberté : chacune doit pouvoir s’exprimer dans la bienveillance, écouter l’autre, le tout dans un climat de confiance. « On met facilement les choses dans des cases; les discriminations, on en fait sur tous les sujets » reconnaît une participante lors de la distribution des premières cartes à relier afin de cartographier l’étendue du sexisme.

Dans le second groupe, une fresqueuse lance « d’un autre côté, on doit se conformer à des stéréotypes pour rentrer dans les normes » : vous l’aurez compris, le sexisme n’est pas un problème qui se réglera en un claquement de doigts !

Les règles du cadre instauré par la Fresque du sexisme

« C’était censé être facile comme atelier ! »

La tentation d’aller voir ce que fait le second groupe se fait parfois sentir, car même si toutes ont vécu un jour le sexisme, le lien entre les cartes posées sur la table n’est pas toujours évident. La distribution des cartes « Injonctions » s’avère ensuite révélatrice de la charge mentale supportée par les femmes : certaines participantes remplissent plusieurs papiers, jusqu’à constituer une pile d’injonctions subies par leur entourage, et plus largement par la société : « aimer les bébés », « avoir des enfants », « être féminine sans être vulgaire », « toujours s’occuper des autres »

Injonctions subies par les participantes à cette Fresque du sexisme

« On a une vie d’injonctions en fait… »

A la lecture de l’injonction « ne pas coucher le premier soir », une participante observe « alors que si tu es un mec tu es vu comme un champion ! » Anette explique « cette boucle ne s’arrête pas, elle fait partie des rouages psychosociaux qui entretiennent ces comportements », ainsi, les couleurs des jouets, les noms des métiers (sage-femme, femme de ménage…), tout est stéréotypé, et, quel que soit notre genre, nous y sommes confronté⸱e⸱s dès notre naissance ! Autre exemple, seuls 2% des noms de rues en France sont attribués à des femmes célèbres, alors qu’elles ne manquent pourtant pas dans l’Histoire de France, qu’il s’agisse d’artistes, d’inventrices, de chercheuses…

Le responsable ? Le patriarcat, une société où les rôles importants et le pouvoir sont détenus par les hommes. En découlent les VSS (violences sexistes et sexuelles), les écarts de salaires femmes/hommes, la charge parentale et contraceptive laissée à la femme, une charge mentale et émotionnelle accrue… La liste est très longue et ne saurait être résumée en quelques mots. Le harcèlement de rue est un autre exemple des dérives d’une société patriarcale : en France, 8 femmes sur 10 ont peur de rentrer seules le soir.

Quelques participantes, dos à dos lors d’un exercice de partage en binôme

« On pourrait dissoudre l’Académie Française ! »

Après les constats, vient l’heure des réponses proposées pour construire une société plus égalitaire, toujours dans la collaboration ! Les participantes ne manquent pas d’idées : « sensibiliser dès l’enfance, y compris les équipes pédagogiques », « proposer plus de jouets multicolores », « démocratiser les insultes non-genrées pour arrêter d’insulter les mères », « imposer l’écriture inclusive »

Les participantes à cette Fresque sont unanimes sur ses bénéfices à la fin de l’atelier : « cette sororité fait qu’on ne se sent pas toute seule dans notre coin, on peut faire bouger les choses ensemble ! », « j’ai envie de parler de tout ça autour de moi », ou encore « j’aurai plus d’arguments face à mon copain ! »

Les participantes à la Fresque du sexisme, accompagnées par leur facilitatrice du jour, Anette

« Ça fâche un peu de parler de sexisme »

Si les participantes du jour ne tarissent pas d’éloges sur la Fresque, Anette reconnait que celle-ci est moins plébiscitée par les entreprises : « les structures se sont bien mises à la Fresque du climat parce qu’il y a des obligations réglementaires de formation aux enjeux climatiques, c’est un sujet en vogue, ça permet aussi parfois un peu de greenwashing sur la com’ de la boîte » au contraire des ateliers sur le sexisme, pour lequel peu d’obligations à la sensibilisation sont mises en place pour les entreprises « on n’a pas de problèmes chez nous » est ainsi souvent la réponse apportée à l’absence de sensibilisation !

« J’aurais bien aimé que des hommes soient présents »

Du côté des participantes, comme Céline, on regrette l’absence d’hommes à cette session, « mais je suis contente de savoir que c’est plutôt exceptionnel, car ils sont concernés et subissent le sexisme également, même si l’incidence est bien moindre que pour les femmes ». Un groupe de 9 étudiantes est venu tout spécialement d’UniLaSalle Rennes (école des métiers de l’environnement) : « on aimerait déployer la fresque au sein de l’établissement pour sensibiliser les étudiantes, comme on le fait déjà à travers une commission fondée au sein de notre BDE (bureau des étudiantes), et dont le but est de lutter contre les VSS, et sensibiliser les élèves et le personnel sur ces questions de sexisme, diversités de genre… »

Le sexisme, les violences et discriminations qui y sont liées, sont des sujets tout aussi importants que le climat, des ateliers de sensibilisation sont organisés régulièrement près de chez vous, plus d’excuse pour ne pas y participer !

Samedi 23 mars : Huitième édition de la braderie de la bibliothèque municipale de Nantes

27 Mars : Conférence de Justine Masika Bihamba organisée par la Fondation des Femmes

Philanthrope made in Saint-Nazaire n’hésitant pas à réinventer sa vie, Florent est prêt à défier les conventions pour une vie plus enrichissante. Et ce sont ses passions et son engagement social qui vont l’accompagner dans cette aventure.

L'édito

Touche pas à mon info !

L’investigation vit-elle ses derniers mois sur l’audiovisuel public en France ? Contraints par une réduction budgétaire de 50 millions d’euros en 2018 par rapport au contrat d’objectifs et de moyens conclu avec l’ancien gouvernement, les magazines « Envoyé Spécial » et « Complément d’enquête » verront leurs effectifs drastiquement diminués et une réduction du temps de diffusion au point de ne plus pouvoir assurer correctement leur mission d’information. Depuis l’annonce, les soutiens s’accumulent, notamment sur Twitter avec le hashtag #Touchepasàmoninfo, pour tenter de peser sur les décisions de Delphine Ernotte, présidente de France Télévisions, déjà visée par une motion de défiance. L’association Fragil, défenseur d’une information indépendante et sociétale, se joint à ce mouvement de soutien.

Après la directive adoptée par le Parlement européen portant sur le secret des affaires en avril 2016, il s’agit d’un nouveau coup porté à l’investigation journalistique en France. Scandales de la dépakine, du levothyrox, du coton ouzbek (pour ne citer qu’eux), reportages en France ou à l’étranger sur des théâtres de guerre, à la découverte de cultures et de civilisations sont autant de sujets considérés d’utilité publique. Cela prend du temps et cela coûte évidemment de l’argent. Mais il s’agit bien d’éveiller les consciences, de susciter l’interrogation, l’émerveillement, l’étonnement ou l’indignation. Sortir des carcans d’une société de consommation en portant la contradiction, faire la lumière sur des pratiques, des actes que des citoyens pensaient impensables mais bien réels. Telle est « la première priorité du service public », comme le considère Yannick Letranchant, directeur de l’information.

En conclusion, nous ne pouvions passer à côté d’une citation d’Albert Londres ô combien au goût du jour, prix éponyme que des journalistes d' »Envoyé Spécial » ont déjà remporté : « Je demeure convaincu qu’un journaliste n’est pas un enfant de chœur et que son rôle ne consiste pas à précéder les processions, la main plongée dans une corbeille de pétales de roses. Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort, il est de porter la plume dans la plaie. »


Valentin Gaborieau – Décembre 2017