12 juin 2025

Exposition Vestiges d’ailleurs de Virginie Gribouilli : “Créer, c’est donner vie, mais de manière figée” 

Vestiges d’ailleurs c’est la nouvelle exposition de La Monstrueuse Galerie. Du 3 juin au 26 juillet, la galerie expose les œuvres de Virginie Gribouilli. Une œuvre d'anticipation qui questionne les héritages que laisseront notre civilisation.

Exposition Vestiges d’ailleurs de Virginie Gribouilli : “Créer, c’est donner vie, mais de manière figée” 

12 Juin 2025

Vestiges d’ailleurs c’est la nouvelle exposition de La Monstrueuse Galerie. Du 3 juin au 26 juillet, la galerie expose les œuvres de Virginie Gribouilli. Une œuvre d'anticipation qui questionne les héritages que laisseront notre civilisation.

Vendredi 06 juin, se tenait le vernissage de l’exposition Vestiges d’ailleurs. À l’intérieur, une trentaine de pièces, avec leurs touches uniques, éveille chez ceux qui les découvrent un mélange d’émerveillement, de curiosité et de questionnements. Une licorne, une meute de lycaons, des dragons, des anges, tout ce bestiaire de sculptures sort de l’imagination de l’artiste morbihannaise Virginie Gribouilli. Elle qui se décrit comme “une petite artiste qui fait des trucs de ses mains”, est arrivée à la sculpture un peu par hasard.  

À l’origine, Virginie était illustratrice jeunesse. Elle a commencé à créer des personnages en volume, “juste pour le plaisir”, avec du carton et du papier. C’est en découvrant la porcelaine froide — le matériau qu’elle utilise aujourd’hui — qu’elle s’est mise à expérimenter davantage. Petit à petit, ses créations ont pris de l’ampleur, jusqu’à ce qu’elle réalise que cela pouvait devenir un “vrai métier”. 

Nature, nostalgie et beauté”, voilà comment Virginie qualifie son art. Elle explique que la nature est au cœur de son travail avec ses créatures et son récit de l’impact de l’homme sur celles-ci. Pour la nostalgie, elle annonce : “quelque part je parle de notre futur au passé”.
Enfin, elle insiste sur la beauté, comme un moyen de transmettre des émotions et d’aborder des sujets sensibles sans brusquer le spectateurs•trices  

« Meute de lycaons » de Virginie Gribouilli, exposé à la Monstrueuse Galerie. Crédit Arthur Camus

Une traversée des époques  

Malgré son attrait pour les créatures mythologiques issues du Moyen Âge, la sculptrice s’inspire aussi des animaux contemporains, des êtres disparus ou encore imaginés dans un futur lointain. Ses sculptures ne se limitent pas à une époque, pour elle, le véritable fil conducteur de son travail, c’est la vie sur Terre, dans toute sa diversité et sa complexité, sans barrière de temps.  

Si demain notre civilisation était vouée à disparaître qu’est-ce qui resterait de nous ?” C’est avec cette question qu’elle imagine plusieurs de ses créatures. Notamment dans la catégorie Le Règne Animiste, où l’on peut retrouver Oscarn le dieu des routes et du goudron, symbolisé par un squelette de blaireau — l’un des animaux les plus tués sur les routes — ou encore Mörgul le dieu du charbon, symbolisé par un bélier portant sur son dos trois cheminés à charbon. Ces œuvres créent donc une mythologie fictive dans laquelle, dans un futur lointain, des créatures auraient repris le contrôle de la Terre, portant des vestiges humains (les routes sur le blaireau ou les trois cheminés à charbon) comme étant de traces d’une civilisation disparue. 

Oscarn, dieu des routes et du goudron de Virginie Gribouilli, exposé à la Monstrueuse Galerie. Crédit Arthur Camus

C’est un petit peu la facilité de juste de dénoncer l’existant 

Avec ses œuvres, Virginie ne cherche pas seulement à dénoncer, elle propose une autre manière de réfléchir à notre impact sur le vivant. Elle reconnaît que l’art a souvent une dimension dénonciatrice, et que l’on sait déjà tous que l’activité humaine abîme la planète et affecte les animaux. “On le sait tous, que tout ce qu’on fait, en tant qu’humain, a un impact sur la nature, typiquement le dieu du goudron c’est un blaireau, les premiers impactés par les voitures et par les routes”. Mais pour elle, se contenter de dire ce qui ne va pas ne suffit pas, ce serait trop facile, presque attendu.  

Dans ses sculptures, ce ne sont pas les animaux qui subissent, mais ceux qui prennent le contrôle. Le blaireau, par exemple, devient une figure divine, qui domine l’élément qui l’a menacé : le goudron. L’artiste imagine un monde futur dans lequel les animaux auraient repris la main sur ce que les humains ont construit, comme s’ils avaient réécrit l’histoire. 

Ce n’est pas la peine de toujours enfoncer le même clou […] malheureusement notre évolution va dans cette direction et qu’on ne changera pas demain”. Elle ne veut pas accuser directement l’humain, car elle estime que nous savons déjà que notre mode de vie n’est pas durable. Au lieu de répéter ce discours, elle propose une mythologie nouvelle dans laquelle on peut s’interroger sur l’héritage de notre civilisation. Elle préfère ouvrir un espace de réflexion, plus poétique et moins frontal. 

Infos utiles

Exposition visible jusqu’au 26 juillet à La Monstrueuse Galerie, 13 rue de Strasbourg, du mardi au samedi, de 11h à 19h. Entrée libre.

Plus d’info : https://www.lamonstrueusegalerie.com/expositions 

 

Stagiaire pour 1 mois chez Fragil. Venant du Centre nantais de journalisme, je suis très motivé à être acteur dans le milieu du journalisme, et ça commence ici.

L'édito

Touche pas à mon info !

L’investigation vit-elle ses derniers mois sur l’audiovisuel public en France ? Contraints par une réduction budgétaire de 50 millions d’euros en 2018 par rapport au contrat d’objectifs et de moyens conclu avec l’ancien gouvernement, les magazines « Envoyé Spécial » et « Complément d’enquête » verront leurs effectifs drastiquement diminués et une réduction du temps de diffusion au point de ne plus pouvoir assurer correctement leur mission d’information. Depuis l’annonce, les soutiens s’accumulent, notamment sur Twitter avec le hashtag #Touchepasàmoninfo, pour tenter de peser sur les décisions de Delphine Ernotte, présidente de France Télévisions, déjà visée par une motion de défiance. L’association Fragil, défenseur d’une information indépendante et sociétale, se joint à ce mouvement de soutien.

Après la directive adoptée par le Parlement européen portant sur le secret des affaires en avril 2016, il s’agit d’un nouveau coup porté à l’investigation journalistique en France. Scandales de la dépakine, du levothyrox, du coton ouzbek (pour ne citer qu’eux), reportages en France ou à l’étranger sur des théâtres de guerre, à la découverte de cultures et de civilisations sont autant de sujets considérés d’utilité publique. Cela prend du temps et cela coûte évidemment de l’argent. Mais il s’agit bien d’éveiller les consciences, de susciter l’interrogation, l’émerveillement, l’étonnement ou l’indignation. Sortir des carcans d’une société de consommation en portant la contradiction, faire la lumière sur des pratiques, des actes que des citoyens pensaient impensables mais bien réels. Telle est « la première priorité du service public », comme le considère Yannick Letranchant, directeur de l’information.

En conclusion, nous ne pouvions passer à côté d’une citation d’Albert Londres ô combien au goût du jour, prix éponyme que des journalistes d' »Envoyé Spécial » ont déjà remporté : « Je demeure convaincu qu’un journaliste n’est pas un enfant de chœur et que son rôle ne consiste pas à précéder les processions, la main plongée dans une corbeille de pétales de roses. Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort, il est de porter la plume dans la plaie. »


Valentin Gaborieau – Décembre 2017