21 décembre 2025

Simples P(r)êcheurs : quand le théâtre engagé du collectif Gigaphone fait rimer écologie et absurde

À travers une fable satirique inspirée de faits réels, le Collectif Gigaphone explore les luttes écologiques contemporaines. Présentée les 17-18 et 19 décembre au Nouveau Studio Théâtre, la pièce de théâtre radiophonique Simples P(r)êcheurs mêle humour, fiction et engagement pour inviter le public à réfléchir tout en passant un bon moment.

Simples P(r)êcheurs : quand le théâtre engagé du collectif Gigaphone fait rimer écologie et absurde

21 Déc 2025

À travers une fable satirique inspirée de faits réels, le Collectif Gigaphone explore les luttes écologiques contemporaines. Présentée les 17-18 et 19 décembre au Nouveau Studio Théâtre, la pièce de théâtre radiophonique Simples P(r)êcheurs mêle humour, fiction et engagement pour inviter le public à réfléchir tout en passant un bon moment.

À travers une fable satirique inspirée de faits réels, le Collectif Gigaphone explore les luttes écologiques contemporaines. Présentée les 17, 18 et 19 décembre au Nouveau Studio Théâtre, la pièce de théâtre radiophonique Simples P(r)êcheurs mêle humour, fiction et engagement pour inviter le public à réfléchir tout en passant un bon moment.

Un spectacle qui mêle théâtre, écologie et absurde

Co-metteuse en scène et régisseuse lumière de Simples P(rê)cheurs, Louise Sigogneau est également membre du Collectif Gigaphone, qu’elle forme avec Zoé Delporte et Marie Haméon. Ensemble, elles portent un théâtre engagé qui s’empare des enjeux écologiques contemporains à travers la fiction et l’humour. Simples P(r)êcheurs met en scène deux pêcheuses et une narratrice vivant à Sainte-Sandrine, un village fictif. Tout bascule lorsqu’elles sortent de l’eau une boîte de conserve lors d’une partie de pêche. Cet événement anodin devient le point de départ d’une prise de conscience : les habitantes décident de « faire bouger les choses » dans leur ville, confrontée aux décisions aveugles des élites locales. D’abord rationnelles, leurs tentatives évoluent progressivement vers des formes de mobilisation plus militantes afin de contrer ces agissements.

Louise et Zoé, coréalisatrices de Simples P(r)êcheurs. Par Pauline Rouibi – 18/12/2025.

Un “conte radiophonique”

Il prend la forme d’une fable sarcastique, librement inspirée des événements de Sainte-Soline et de la lutte contre les méga-bassines, notamment celles de 2022. À travers cette fiction, Simples P(r)êcheurs aborde les questions de l’écologie, de l’organisation collective et des différentes manières de militer. Le choix de l’absurde et de la fiction n’est pas anodin : « Les sujets de la pièce ne sont pas faciles à aborder et à rendre accessible ». Pour Louise Sigogneau (coréalisatrice de la pièce), « le théâtre est avant tout un lieu de jeu, l’idée c’est que tout le monde passe un bon moment et se sente à sa place au théâtre ».

Au sein du Collectif Gigaphone, la question écologique est centrale. « Pour nous le théâtre c’est un moyen d’aborder des sujets politiques et de transmettre une parole ». Le discours porté par la pièce leur paraissait d’autant plus nécessaire qu’il s’inspire de faits réels. « C’est important de montrer comment ce sujet nous touchait et le théâtre c’était un bon moyen de mêler lutte écologique et émotion ». Cette sensibilité a justement marqué Marius et Lara, deux specteur·rices engagé·es vivant à Notre-Dame-des-Landes. Le premier a apprécié que la pièce ne soit pas uniquement tournée vers un argumentaire engagé : « Ce qu’on voit souvent, c’est de la violence. Ça fait du bien de voir ce qu’il y a à part : l’amour, la tendresse ». Même son de cloche pour son amie Lara, qui a été touchée par « le côté un peu sensible et singulier des histoires dans les luttes, tous les liens humains qui se tissent ».

Résolument engagé, mais sans moralisation

L’objectif premier reste le plaisir du public. Louise Sigogneau espère que les spectateur·rices trouveront la pièce « drôle et ironique ». Si elle peut susciter l’envie de s’informer davantage sur ces enjeux, « ce serait une bonne chose », mais l’essentiel demeure de passer « un bon moment ». Une ambition lucide, quand on sait que « déjà amener les gens vers le théâtre c’est difficile, alors aller voir une pièce engagée ça rajoute encore une difficulté ». Pour une spectatrice issue du milieu artistique, Zoé, l’engagement dans la pièce offre une perspective différente sur la thématique de l’écologie, qu’elle a déjà vu traité au théâtre : « il y a une prise de position assez franche qui est assez agréable».

(au milieu – Lucile Bariou) raconte l’histoire de Noé (droite – Marie Haméon) et Jeanne (gauche – Bertille Legoux). Crédits : Valérie Babin – 18/12/2025

 

Dans cette volonté de relier la fiction à la réalité, le collectif a invité la Ligue des droits de l’Homme (LDH) à intervenir à l’issue de certaines représentations. Cette initiative, portée par Zoé Delporte, vise à établir un parallèle concret entre la pièce et les événements de Sainte-Soline, où la LDH était présente et a mené une enquête sur les violences policières. Leur participation lors d’un temps d’échange avec le public permet d’ancrer le spectacle dans une réalité politique et sociale tangible. Dans le public, Charles a justement été marqué par « le point de vue qui rappelle à la fois la réalité de Sainte-Soline, et puis, le suivi de personnes quidam et qui sont très engagées politiquement ».

Enfin, Simples P(r)êcheurs s’inscrit dans un contexte de création théâtrale fragilisé. Louise Sigogneau rappelle que « le théâtre est un peu difficile ces derniers temps, avec toutes les coupes budgétaires qu’il y a eu ». Monter une pièce implique aujourd’hui « un certain nombre de sacrifices personnels et professionnels ». Dans ce contexte, l’accueil positif du public prend une dimension particulière. « Le théâtre c’est un échange avec le public, on transmet beaucoup et on reçoit aussi des spectateurs ».

 

Pauline, angevine de naissance, s'est récemment installée à Nantes pour ses études. Depuis plusieurs semaines, elle rejoint l’équipe de Fragil dans l’attente de vivre une expérience unique, en explorant et riant.

L'édito

Touche pas à mon info !

L’investigation vit-elle ses derniers mois sur l’audiovisuel public en France ? Contraints par une réduction budgétaire de 50 millions d’euros en 2018 par rapport au contrat d’objectifs et de moyens conclu avec l’ancien gouvernement, les magazines « Envoyé Spécial » et « Complément d’enquête » verront leurs effectifs drastiquement diminués et une réduction du temps de diffusion au point de ne plus pouvoir assurer correctement leur mission d’information. Depuis l’annonce, les soutiens s’accumulent, notamment sur Twitter avec le hashtag #Touchepasàmoninfo, pour tenter de peser sur les décisions de Delphine Ernotte, présidente de France Télévisions, déjà visée par une motion de défiance. L’association Fragil, défenseur d’une information indépendante et sociétale, se joint à ce mouvement de soutien.

Après la directive adoptée par le Parlement européen portant sur le secret des affaires en avril 2016, il s’agit d’un nouveau coup porté à l’investigation journalistique en France. Scandales de la dépakine, du levothyrox, du coton ouzbek (pour ne citer qu’eux), reportages en France ou à l’étranger sur des théâtres de guerre, à la découverte de cultures et de civilisations sont autant de sujets considérés d’utilité publique. Cela prend du temps et cela coûte évidemment de l’argent. Mais il s’agit bien d’éveiller les consciences, de susciter l’interrogation, l’émerveillement, l’étonnement ou l’indignation. Sortir des carcans d’une société de consommation en portant la contradiction, faire la lumière sur des pratiques, des actes que des citoyens pensaient impensables mais bien réels. Telle est « la première priorité du service public », comme le considère Yannick Letranchant, directeur de l’information.

En conclusion, nous ne pouvions passer à côté d’une citation d’Albert Londres ô combien au goût du jour, prix éponyme que des journalistes d' »Envoyé Spécial » ont déjà remporté : « Je demeure convaincu qu’un journaliste n’est pas un enfant de chœur et que son rôle ne consiste pas à précéder les processions, la main plongée dans une corbeille de pétales de roses. Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort, il est de porter la plume dans la plaie. »


Valentin Gaborieau – Décembre 2017