6 mars 2020

FilmmakErs, le documentaire de Julie Gayet et Mathieu Busson, libère la parole des femmes réalisatrices

Le mercredi 4 mars, le cinéma Gaumont de Nantes a reçu l’actrice et productrice Julie Gayet ainsi que Mathieu Busson venus présenter leur documentaire intitulé « FilmmakErs ». On y découvre des réalisatrices connues et moins connues du monde entier qui témoignent de leurs expériences de femmes dans le monde du cinéma. Le chemin semble encore long pour que les femmes se fassent une place au soleil dans une industrie encore bien dirigée et codée par la gent masculine.

FilmmakErs, le documentaire de Julie Gayet et Mathieu Busson, libère la parole des femmes réalisatrices

06 Mar 2020

Le mercredi 4 mars, le cinéma Gaumont de Nantes a reçu l’actrice et productrice Julie Gayet ainsi que Mathieu Busson venus présenter leur documentaire intitulé « FilmmakErs ». On y découvre des réalisatrices connues et moins connues du monde entier qui témoignent de leurs expériences de femmes dans le monde du cinéma. Le chemin semble encore long pour que les femmes se fassent une place au soleil dans une industrie encore bien dirigée et codée par la gent masculine.

« FilmmakErs » nous fait voyager aux 4 coins du monde à la rencontre de femmes passionnées par le cinéma dont elles ont fait leur métier. De l’Asie à l’Afrique en passant par l’Europe sans oublier les États-Unis, Julie Gayet et Mathieu Busson sont allés interviewer des réalisatrices de films pour recueillir leurs témoignages sur leur statut de femmes dans le cinéma.

Affiche de l’avant-première du documentaire « Filmmakers »au cinéma Gaumont Nantes Copyright: Karina Bordier

La croix et la bannière pour se faire accepter

Dans le documentaire, ce qui frappe, ce sont les paroles de ces femmes aux cultures et pays différents qui résonnent dans le même sens. Elles relatent toutes les mêmes difficultés à se faire accepter en tant que réalisatrices de films.

Cela commence d’abord par un entourage familial qui rejette l’idée qu’une femme puisse exercer dans ce milieu. Il est par exemple très mal vu en Afrique ou en Inde qu’une femme passe derrière la caméra. On considère que ce n’est pas sa place.

La désapprobation de la famille passée, la réalisatrice en devenir va alors devoir se battre avec la misogynie du milieu du cinéma. Sa créativité et son professionnalisme sont mis à l’épreuve. On questionnera toujours sa crédibilité.

Cela peut commencer dès les bancs des écoles de cinéma comme le relate la réalisatrice autrichienne Jessica Hausner. Elle se souvient de remarques misogynes de certains de ses professeurs lors de cours sur la technique de la caméra.

Un peu plus tard, c’est le regard de la société qu’il faut affronter. Comment être mère de famille, s’occuper d’un foyer et être réalisatrice de films en même temps ? A ce sujet, la réalisatrice espagnole Isabel Coixet relate une anecdote amusante : lors d’un tournage sur une plateforme pétrolière, son téléphone portable sonne. Au bout du fil son mari qui, paniqué, lui explique que le lave-linge est tombé en panne !

Plus sérieusement, il faut aussi se confronter à la difficulté de recevoir des financements pour monter son film. Financements qui sont souvent plus difficilement accordés qu’à un homme.

La misogynie ne s’arrête pas là. Même quand une femme réussit à lancer la production de son film, il peut lui rester à convaincre les membres mêmes de son équipe de tournage. Le témoignage de la réalisatrice indoue Farah Khan est édifiant. Elle nous explique que, lors du tournage d’un de ses films, elle a dû prendre à part un membre de l’équipe qui l’ignorait et ne parlait qu’à son frère. « C’est moi la réalisatrice », a-t-elle dû lui rappeler.

Julie Gayet et Mathieu Busson lors de l’avant-première du documentaire « Filmmakers » Copyright: Karina Bordier

« Elles ont osé »

Julie Gayet a rappelé qu’en France les femmes ne s’en sortent pas si mal : « on a 27% de femmes réalisatrices ». Cela semble peu mais c’est un taux important comparé aux autres pays.

Pour elle, le dénominateur commun de toutes ces réalisatrices c’est l’audace qu’elles ont eu à un moment donné pour s’autoriser à devenir ce qu’elles sont et de vivre de leurs passions.

Braver les regards, les cultures, la pression familiale, la misogynie et se relever en tant que réalisatrice à part entière pour raconter des histoires et montrer le monde à travers son propre regard.

Le combat des réalisatrices à exister résonne bien sûr avec celui des actrices du monde entier qui se battent pour que leur parole soit entendue et respectée. Les actrices s’unissent pour que les femmes aient une place à part entière auprès des hommes et des actrices comme Nicole Kidman ou Jessica Chastaing se sont plusieurs fois exprimées à ce sujet pour la défense et la reconnaissance de la femme dans l’industrie du cinéma.

Sur une note plus gaie et optimiste, « FilmmakErs » se termine par le témoignage de la regrettée Agnès Varda et pour elle pas de doute : « c’est en filmant qu’on devient filmeronne… » !

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L'édito

Touche pas à mon info !

L’investigation vit-elle ses derniers mois sur l’audiovisuel public en France ? Contraints par une réduction budgétaire de 50 millions d’euros en 2018 par rapport au contrat d’objectifs et de moyens conclu avec l’ancien gouvernement, les magazines « Envoyé Spécial » et « Complément d’enquête » verront leurs effectifs drastiquement diminués et une réduction du temps de diffusion au point de ne plus pouvoir assurer correctement leur mission d’information. Depuis l’annonce, les soutiens s’accumulent, notamment sur Twitter avec le hashtag #Touchepasàmoninfo, pour tenter de peser sur les décisions de Delphine Ernotte, présidente de France Télévisions, déjà visée par une motion de défiance. L’association Fragil, défenseur d’une information indépendante et sociétale, se joint à ce mouvement de soutien.

Après la directive adoptée par le Parlement européen portant sur le secret des affaires en avril 2016, il s’agit d’un nouveau coup porté à l’investigation journalistique en France. Scandales de la dépakine, du levothyrox, du coton ouzbek (pour ne citer qu’eux), reportages en France ou à l’étranger sur des théâtres de guerre, à la découverte de cultures et de civilisations sont autant de sujets considérés d’utilité publique. Cela prend du temps et cela coûte évidemment de l’argent. Mais il s’agit bien d’éveiller les consciences, de susciter l’interrogation, l’émerveillement, l’étonnement ou l’indignation. Sortir des carcans d’une société de consommation en portant la contradiction, faire la lumière sur des pratiques, des actes que des citoyens pensaient impensables mais bien réels. Telle est « la première priorité du service public », comme le considère Yannick Letranchant, directeur de l’information.

En conclusion, nous ne pouvions passer à côté d’une citation d’Albert Londres ô combien au goût du jour, prix éponyme que des journalistes d' »Envoyé Spécial » ont déjà remporté : « Je demeure convaincu qu’un journaliste n’est pas un enfant de chœur et que son rôle ne consiste pas à précéder les processions, la main plongée dans une corbeille de pétales de roses. Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort, il est de porter la plume dans la plaie. »


Valentin Gaborieau – Décembre 2017