• Photo Robin Santus
27 mai 2016

Robin Santus, l’argentique dans la peau

Vietnam. Berlin. Islande. New-York... Robin Santus immortalise ses voyages en argentique. Même si le numérique est omniprésent dans sa passion, l’argentique reste pour lui le moyen d’expression le plus authentique en matière de photographie. Rencontre.

Robin Santus, l’argentique dans la peau

27 Mai 2016

Vietnam. Berlin. Islande. New-York... Robin Santus immortalise ses voyages en argentique. Même si le numérique est omniprésent dans sa passion, l’argentique reste pour lui le moyen d’expression le plus authentique en matière de photographie. Rencontre.

70 %. C’est le pourcentage que le photographe Robin Santus consacre au numérique dans sa passion. Malgré l’omniprésence de la photographie à pixels depuis plus de dix ans et sa qualité de plus en plus affirmée, ce passionné de photographie n’a pas délaissé pour autant ses bons vieux appareils argentiques. Robin Santus utilise un Leica M2 au boîtier d’une cinquantaine d’années, mais qui « ronronne comme au premier jour ». Le photographe utilise également un Nikon F2 et un Nikon FE2 avec des optiques comme le 45mm f/2.8 (formule Tessar) et le 55mm f/1.2 au rendu « extraordinaire ». Dans sa collection se cache aussi un Mamiya 6, moyen format à visée télémétrique, « simple et discret, deux critères très importants pour moi », se confie le passionné d’argentique depuis son enfance.

Photo Robin Santus

Robin Santus

Car l’argentique, Robin Santus l’a dans la peau. Durant son enfance, son père faisait de la photographie avec un Semflex, le Rolleiflex français, confie le photographe. Passion virale, l’enfant a vite été attiré par cette technique et a fini par emprunter le matériel de son père. La suite est logique, Robin Santus n’a plus jamais quitté son bijou.

Robin Santus utilise un Leica M2 au boîtier d'une cinquantaine d'années qui « ronronne comme au premier jour ».

C’est grâce à ses jobs d’été que l’adolescent a pu s’offrir son propre trésor, un Nikon Nikkormat FT2. Par la suite, l’apprentissage du développement noir et blanc s’est fait tout naturellement au club photo de son collège, ce qui a permis au photographe d’intégrer le Club des 30×40 à Paris et de côtoyer ainsi des grands noms de la photographie. Robin Santus s’est perfectionné aux côtés de Martin Parr, Raymond Depardon et de Ralph Gibson.

Photo Robin Santus

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Un travail reconnu

La photo urbaine street photography et les paysages sont les thèmes qui reviennent le plus souvent dans le travail du photographe. Sa seule condition est qu’il doit toujours avoir une trace humaine dans chaque image. C’est pourquoi l’argentique séduit toujours autant Robin Santus. « Il y a un charme unique en noir et blanc comme en couleurs. En noir et blanc les tirages sont toujours de qualité supérieures par rapport aux meilleures imprimantes ». Pour le passionné de photographie, la diffusion de la lumière dans le papier baryté sera toujours irremplaçable. Le négatif représente une sécurité quant à la pérennité du support, ce qui rassure le photographe reconnu par ses pairs.

Robin Santus s'est perfectionné aux côtés de Martin Parr, Raymond Depardon et de Ralph Gibson...

Car des récompenses, ce n’est pas ce qu’il manque à ce passionné. Lauréat de plusieurs grands concours comme Un jour en France en 1988, le Grand Concours Agfa Multicontrast en 1997, la Dotation Photo Service des Rencontres de la Photographie d’Arles en 2003 et en 2004, le Grand Prix d’Auteur de la Fédération Française de Photographie en 2008 et le Prix du Jury Noir et Blanc Ilford en 2011.

Photo Robin Santus

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Une autre vision du monde

Bien que la révolution numérique a permis à un plus grand nombre de personnes de se mettre à la photographie, les pratiques elles, ont bien changé. Les images se font beaucoup plus nombreuses, elles se retouchent facilement et le mode de diffusion a évolué, faisant du tirage sur papier un objet beaucoup plus intime et confidentiel. Ce qui avant était l’unique moyen de partager ses images est devenu un critère d’authenticité.

L’écran de l’appareil a, selon le photographe, fait émerger de nouveaux comportements. « Pendant un shooting, on peut montrer une image réussie au modèle, ce qui peut le détendre et le rassurer. On a pris l’habitude de consulter directement son écran après chaque prise. Mes modèles sont dans la rue, donc ils n’ont jamais le loisir de voir le résultat. C’est l’effet de surprise avec l’argentique ».

Le moyen utilisé est finalement sans importance tant qu'il y a une réflexion construite derrière.

Effet de surprise, émerveillement ou déception lors du développement, l’argentique oblige à réfléchir dans un monde où tout se fait naturellement en appuyant sur un bouton. Le rapport au temps change également, car faire de l’argentique c’est prendre son temps pour obtenir le résultat souhaité. Avec le numérique, le photographe peut être distrait par le résultat. L’argentique permet de rester concentrer et de garder le contact avec la réalité. Alors que les photos remplissent les disques durs, la réalité se fige sur le papier avec l’argentique.

Photo Robin Santus

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Robin Santus estime que dans chaque déclenchement argentique, il y a la notion de prix qui fait que chaque prise de vue semble davantage réfléchie et travaillée. Si l’argentique peut repousser pour des questions de budget, le photographe précise que le film et le développement a bien un certain coût, la qualité du matériel est toujours présente après des années d’utilisation. « Il faut compter entre 50 et 100€ pour avoir du matériel argentique très convenable.

Alors que les photos remplissent les disques durs, la réalité se fige sur le papier avec l'argentique

Les appareils numériques sont chers et moins résistants aux années. Les logiciels ont aussi un coût. Le prix à la photo devient très vite important ». Pour ce passionné qui a appris à développer ses clichés avec une planche calée sur la cuvette des toilettes, où l’agrandisseur était posé, l’argentique possède un aspect esthétique qui donne lieu à plus de sensualité. Son support palpable est, selon le photographe, un critère rassurant.

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Au-delà de la mode du vintage, les jeunes ont donc un réel besoin de retour à l’authentique et à la magie du temps qui s’arrête dans l’objectif. Le photographe en est certain, il n’y aura pas un retour total à l’argentique, car le numérique fait partie de notre quotidien. Les amoureux de l’argentique, à l’instar de Robin Santus, continuent de faire vivre cette pratique qui a su résister face aux nouvelles possibilités qu’offre le numérique.

Pratique magique et virale, le photographe a développé le magazine Flash ! avec ses deux fils et son compère Thomas Chauvin. Ainsi, il continue à chérir sa passion d’enfance qui ne l’a jamais quittée.

Photo Robin Santus

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Ma vie de cannette

Ma vie de cannette

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Fatma Ben Hamad : du pastel à gratter

Jeune journaliste passionnée par les voyages, la photo et le vintage, Manon s'intéresse dans son dossier numérique aux mutations de la société 2.0 dans notre quotidien.

L'édito

Touche pas à mon info !

L’investigation vit-elle ses derniers mois sur l’audiovisuel public en France ? Contraints par une réduction budgétaire de 50 millions d’euros en 2018 par rapport au contrat d’objectifs et de moyens conclu avec l’ancien gouvernement, les magazines « Envoyé Spécial » et « Complément d’enquête » verront leurs effectifs drastiquement diminués et une réduction du temps de diffusion au point de ne plus pouvoir assurer correctement leur mission d’information. Depuis l’annonce, les soutiens s’accumulent, notamment sur Twitter avec le hashtag #Touchepasàmoninfo, pour tenter de peser sur les décisions de Delphine Ernotte, présidente de France Télévisions, déjà visée par une motion de défiance. L’association Fragil, défenseur d’une information indépendante et sociétale, se joint à ce mouvement de soutien.

Après la directive adoptée par le Parlement européen portant sur le secret des affaires en avril 2016, il s’agit d’un nouveau coup porté à l’investigation journalistique en France. Scandales de la dépakine, du levothyrox, du coton ouzbek (pour ne citer qu’eux), reportages en France ou à l’étranger sur des théâtres de guerre, à la découverte de cultures et de civilisations sont autant de sujets considérés d’utilité publique. Cela prend du temps et cela coûte évidemment de l’argent. Mais il s’agit bien d’éveiller les consciences, de susciter l’interrogation, l’émerveillement, l’étonnement ou l’indignation. Sortir des carcans d’une société de consommation en portant la contradiction, faire la lumière sur des pratiques, des actes que des citoyens pensaient impensables mais bien réels. Telle est « la première priorité du service public », comme le considère Yannick Letranchant, directeur de l’information.

En conclusion, nous ne pouvions passer à côté d’une citation d’Albert Londres ô combien au goût du jour, prix éponyme que des journalistes d' »Envoyé Spécial » ont déjà remporté : « Je demeure convaincu qu’un journaliste n’est pas un enfant de chœur et que son rôle ne consiste pas à précéder les processions, la main plongée dans une corbeille de pétales de roses. Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort, il est de porter la plume dans la plaie. »


Valentin Gaborieau – Décembre 2017